1. Le droit à réintégration
1.1.Salariés bénéficiaires
Selon l’article L. 2422-1 du Code du travail, en cas d’annulation de la décision d'autorisation de licenciement, le salarié concerné a le droit, s'il le demande dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, d'être réintégré dans son emploi ou dans un emploi équivalent.
Cette faculté de réintégration bénéficie aux salariés investis d'un des mandats suivants :
- Délégué syndical ou ancien délégué syndical ;
- Délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ancien délégué du personnel ou candidat aux fonctions de délégué du personnel, salarié ayant demandé à l'employeur l'organisation des élections pour la désignation des délégués du personnel ;
- Membre élu du comité d'entreprise, titulaire ou suppléant, représentant syndical au comité d'entreprise, ancien membre ou candidat aux fonctions de membre du comité d'entreprise, salarié ayant demandé à l'employeur l'organisation des élections au comité d'entreprise ;
- Salarié siégeant ou ayant siégé en qualité de représentant du personnel au CHSCT.
Le texte offre cette faculté à d’autres salariés protégés, comme le représentant des salariés au conseil de surveillance ou d'administration des entreprises du secteur public.
1.2.Conditions de mise en œuvre
Le droit à réintégration n'est pas subordonné au caractère définitif de l’annulation de l’autorisation de licenciement (Cass. crim. 14 mars 2006, n° 05-81805).
En d’autres termes, il s’applique même si l’employeur a formé un recours contre la décision annulant l’autorisation de licenciement.
Cela étant, le droit à réintégration n’est pas automatique, et doit être expressément demandé par le salarié, et ce dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision (article L. 2422-1 précité).
La demande de réintégration, formée par le salarié plus de deux mois après la notification de la décision d'annulation, est purement et simplement irrecevable (Cass. soc. 23 juin 1999, n° 97-41825).
La demande de réintégration peut être formée par le salarié ou par un mandataire (syndicat, avocat, etc.) disposant d’un pouvoir spécial (Cass. soc. 22 mars 1995, n° 93-42183).
Le Code du travail ne précise pas la forme que doit revêtir la demande du salarié, et celle-ci peut intervenir par tout moyen incontestable : lettre recommandée avec avis de réception, acte d’huissier, etc.
1.3.Poste de réintégration
Aux termes de l’article L. 2422-1 du Code du travail, le salarié doit être réintégré « dans son emploi ou dans un emploi équivalent. »
Pour la Cour de cassation, ce n’est que si son poste n'existe plus ou n'est pas vacant que le salarié peut être réintégré dans un emploi équivalent (Cass. soc. 12 mai 1998, n° 96-40967).
La notion de poste équivalent implique « le même niveau de rémunération, la même qualification et les mêmes perspectives de carrière que l'emploi initial, et permettant l'exercice du mandat représentatif » (Cass. soc. 13 mai 2008, n° 06-46108).
Bien entendu, le salarié doit également retrouver l’ancienneté dont il bénéficiait avant son licenciement.
Enfin, précisons que le périmètre de réintégration d'un salarié protégé s'étend uniquement à l'entreprise et à l'unité économique et sociale reconnue entre cette entité et d'autres personnes juridiques (Cass. soc. 19 novembre 2008, n° 07-43215).
1.4.Sort du mandat du salarié protégé
La question se pose de savoir ce qu’il advient du mandat de représentation du personnel que détenait le salarié antérieurement à son licenciement.
Selon l’article L. 2422-2 du Code du travail, le délégué du personnel ou le membre du comité d'entreprise dont la décision d'autorisation de licenciement a été annulée doit être réintégré dans son mandat si l'institution n'a pas été renouvelée.
Dans le cas contraire, il doit bénéficier, pendant une durée de six mois à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la protection contre le licenciement.
Le texte est muet concernant les autres salariés protégés, et notamment les délégués syndicaux.
Pour la Cour de cassation, la réintégration du délégué syndical dans son emploi « n'entraîne pas le rétablissement de plein droit de ce salarié dans son mandat, de sorte qu'il doit, pour être rétabli dans ses fonctions représentatives, faire l'objet d'une nouvelle désignation » (Cass. soc. 22 janvier 2002, n° 00-60356).
2. Le droit à indemnisation
2.1.Salariés concernés
Selon l’article L. 2422-4 du Code du travail, lorsque l'annulation d'une décision d'autorisation est devenue définitive, le salarié investi d'un des mandats mentionnés à l'article L. 2422-1 (cf. § 1.1. ci-dessus) a droit au paiement d'une indemnité correspondant à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration, s'il en a formulé la demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision.
Pour la Cour de cassation, le droit à indemnisation est ouvert également aux anciens délégués du personnel, aux candidats aux élections, aux salariés dont la candidature est imminente, aux salariés ayant demandé l'organisation d'élections et aux délégués institués par voie conventionnelle (Cass. soc. 19 décembre 1990, n° 88-40502).
2.2.Conditions de mise en œuvre
Selon l'article L 2422-4 du Code du travail, le droit à indemnisation ne peut être exercé que lorsque l'annulation de la décision d'autorisation est devenue définitive.
Il en résulte que ce droit est subordonné au fait qu’aucun recours (hiérarchique ou contentieux) ne peut plus être exercé à l’encontre de la décision d’annulation.
L’indemnisation est acquise au salarié indépendamment d'une faute de l'employeur ou d'une demande de réintégration du salarié, dès l'instant qu'une décision d'annulation de l'autorisation administrative est devenue définitive (Cass. soc. 21 janvier 1998, n° 95-45253).
2.3.Montant de l’indemnisation
Si le salarié a sollicité sa réintégration, l'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et sa réintégration.
S'il n'a pas demandé sa réintégration, l'indemnité correspond à la totalité du préjudice subi au cours de la période écoulée entre son licenciement et l'expiration du délai de deux mois.
La jurisprudence considère que le préjudice subi correspond aux rémunérations que le salarié aurait perçues pendant cette période s'il n’avait pas été licencié, déduction faite des revenus perçus par ailleurs, en particulier les allocations d’assurance-chômage ou des salaires (Cass. soc. 13 novembre 2008, n° 07-41331).
Attention : le salarié a également droit aux primes annuelles (ex. 13ème mois), calculées au prorata temporis (Cass. soc. 18 mai 2005, n° 02-40370).
Le paiement de l’indemnité constitue un complément de salaire et doit donc s'accompagner du versement des cotisations sociales afférentes (article L 2422-4, alinéa 3 du Code du travail).
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
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