- Rappel des règles applicables
En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (C. trav. art. L. 3171-4, al. 1er).
L’alinéa 2 du texte ajoute qu’au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Cette règle de preuve, dérogatoire au droit commun, a pour but de faciliter au salarié l’administration de la preuve des heures supplémentaires.
Depuis un arrêt de principe du 25 février 2004, la Cour de cassation considère ainsi que la preuve des heures de travail n'incombe spécialement à aucune des parties et que, si l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande (Cass. soc. 25 février 2004, n° 01-45.441).
- Eléments probatoires
La preuve des heures supplémentaires est libre et le salarié peut donc verser aux débats tous les éléments factuels établissant l’accomplissement et le nombre des heures supplémentaires.
A titre d’exemple, lorsque le salarié est tenu d'établir des fiches de temps, les juges du fond peuvent se fonder sur ces fiches pour estimer que la preuve des heures supplémentaires est rapportée (Cass. soc. 19 janvier 1999, n° 96-45.628).
De même, rapporte la preuve d’heures supplémentaires le salarié qui verse aux débats un décompte établi au crayon, auquel l'employeur peut répondre (Cass. soc. 24 novembre 2010, n° 09-40.928).
Les heures supplémentaires peuvent également résulter de nombreux autres éléments, comme des attestations (Cass. soc. soc. 18 avril 2000 n° 98-40.314), des fiches de temps servant de base à la facturation des clients (CA Paris 5 mai 2011, n° 08/10231) ou, encore, l’horaire d’ouverture du magasin où le salarié exerce son activité (CA Paris 9 octobre 2012, n° 10/10320).
En défense, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et ne peut pas se borner à contester globalement le décompte fourni par ce dernier, sans en proposer un autre ni fournir aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (Cass. soc. 14 octobre 1998, n° 96-42440).
Cela étant, dans la plupart des litiges, il est impossible de déterminer précisément le quantum des heures supplémentaires effectuées par le salarié.
La Cour de cassation a résolu -en partie- cette difficulté en considérant que le juge ne peut pas rejeter une demande en paiement d'heures complémentaires aux motifs que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de cette demande (Cass. soc. 10 mai 2007 n° 05-45.932).
Cette jurisprudence ne résolvait cependant pas la question du chiffrage des heures supplémentaires, que traitent les quatre décisions commentées.
- Apport jurisprudentiel
Dans les quatre arrêts du 3 décembre 2013, la Cour de cassation considère qu’il appartient au juge du fond, qui a constaté l'existence d'heures supplémentaires, d'en évaluer souverainement l'importance, après avoir apprécié et analysé l'ensemble des éléments de fait qui lui ont été soumis et sans être tenu de préciser le détail du calcul appliqué.
En d’autres termes, si le juge du fond ne peut se contenter de retenir un montant forfaitaire, il apprécie librement le quantum des heures supplémentaires au vu des éléments fournis par les parties.
Bien entendu, si le juge n’est pas tenu de préciser le détail du calcul appliqué aux heures supplémentaires, il n’en reste pas moins que la valorisation de ces heures dépend du taux horaire du salarié et des taux de majorations applicables.
En définitive, l’intérêt des décisions réside dans le fait qu’elles mettent fin à l’éternel débat portant sur le nombre des heures supplémentaires.
Désormais, la décision du juge du fond sur ce point ne devrait plus pouvoir être utilement contestée devant la Cour de cassation.
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
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