Le contrat de travail international

Publié le 28/03/2014 Vu 4 101 fois 0
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Le contrat de travail est dit « international » dès lors qu’il présente au moins un lien d’extranéité (nationalité de l’une ou des deux parties, lieu d’exécution à l’étranger, etc.). Dans un tel cas, il est alors soumis à des règles particulières.

Le contrat de travail est dit « international » dès lors qu’il présente au moins un lien d’extranéitÃ

Le contrat de travail international

  1. Principe : libre choix de la loi applicable

Les règles de conflit permettant de déterminer la loi applicable au contrat de travail international sont fixées par règlement CE 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles, dit Règlement « Rome I » (JOCE 4 juillet).

NB. Les dispositions du règlement s'appliquent même si la loi qu'il désigne n'est pas celle d'un Etat membre (art. 2). En conséquence, le texte, à vocation universelle, s’applique quelle que soit la loi choisie par les parties.

Le principe posé par le règlement Rome I est celui de la liberté de choix des parties sur la loi qui régira le contrat de travail.

Ainsi, selon l’article 3.1 du Règlement :

  • « Le contrat individuel de travail est régi par la loi choisie par les parties. Le choix est exprès ou résulte de façon certaine des dispositions du contrat ou des circonstances de la cause. Par ce choix, les parties peuvent désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat. »

L’intérêt majeur de ce texte est que les parties peuvent soumettre, à la loi de leur choix, une partie seulement du contrat (pratique dite du « dépeçage du contrat »).

A titre d’exemple, un contrat de travail soumis au droit français, exécuté à l’étranger, peut parfaitement prévoir que la durée du travail sera celle de la loi applicable au lieu où il est exécuté.

En pratique, les contrats conclus par des entreprises françaises avec des ressortissants français, en vue d’un travail à l’étranger, stipulent d’ailleurs que la durée du travail applicable est « la loi locale. »

En effet, la durée de 35 heures par semaine, les durées maximales de travail et le repos dominical n’ont aucun sens dans beaucoup de pays.
 

  1. Limites

2.1. Dispositions impératives de la loi applicable à défaut de choix

Le choix des parties ne peut avoir pour résultat de priver le travailleur de la protection que lui assurent les dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord en vertu de la loi qui, à défaut de choix, aurait été applicable (art. 8.1).

Le Règlement précise à cet égard qu’à défaut de choix exercé par les parties, le contrat individuel de travail est régi par la loi du pays dans lequel ou, à défaut, à partir duquel le travailleur, en exécution du contrat, accomplit habituellement son travail (art. 8.2).

Le texte ajoute que le pays dans lequel le travail est habituellement accompli n'est pas réputé changer lorsque le travailleur accomplit son travail de façon temporaire dans un autre pays.

Si la loi applicable ne peut être déterminée sur la base de l’article 8.2, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel est situé l'établissement qui a embauché le travailleur (art. 8.3).

Enfin, s'il résulte de l'ensemble des circonstances que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays, la loi de cet autre pays s'applique (art. 8.4).

Le Code du travail contient de nombreuses dispositions impératives qui s’appliquent obligatoirement aux salariés exécutant leur prestation de travail sur le territoire français.

En ce sens, l’article L. 1262-4 du Code du travail dispose que les employeurs détachant temporairement des salariés sur le territoire national sont soumis aux dispositions légales et aux stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d'activité établies en France, en matière de législation du travail, pour ce qui concerne les matières suivantes :

  • Libertés individuelles et collectives dans la relation de travail ;
  • Discriminations et égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;
  • Protection de la maternité, congés de maternité et de paternité et d'accueil de l'enfant, congés pour événements familiaux ;
  • Conditions de mise à disposition et garanties dues aux salariés par les entreprises exerçant une activité de travail temporaire ;
  • Exercice du droit de grève ;
  • Durée du travail, repos compensateurs, jours fériés, congés annuels payés, durée du travail et travail de nuit des jeunes travailleurs ;
  • Conditions d'assujettissement aux caisses de congés et intempéries ;
  • Salaire minimum et paiement du salaire, y compris les majorations pour les heures supplémentaires ;
  • Règles relatives à la santé et sécurité au travail, âge d'admission au travail, emploi des enfants.

Il en résulte que, si des salariés étrangers sont détachés en France, les dispositions susvisées sont obligatoirement applicables à la relation contractuelle, même si les parties ont choisi l’application d’une autre loi.
 

2.2. Lois de police « du for »

Par ailleurs, les dispositions du règlement Rome I ne peuvent pas porter atteinte « à l'application des lois de police du juge saisi » (art. 9.2).

La notion de « loi de police » est définie par l’article 9.1 du règlement Rome I :

  • « Une loi de police est une disposition impérative dont le respect est jugé crucial par un pays pour la sauvegarde de ses intérêts publics, tels que son organisation politique, sociale ou économique, au point d'en exiger l'application à toute situation entrant dans son champ d'application, quelle que soit par ailleurs la loi applicable au contrat d'après le présent règlement. »

La Cour de cassation s’est prononcée sur la question, jugeant que les lois françaises relatives aux CDD ne sont pas des lois de police ou d'application immédiate s'imposant aux rapports de travail exécutés sur le territoire français (Cass. soc. 29 mai 1991, n° 88-42.335).

De même, la Cour d’appel d’Aix-en Provence a jugé que les dispositions de la loi du Vanuatu prévoyant que les cotisations de retraite peuvent être déduites de l'indemnité de licenciement ne sont pas contraires à l'ordre public français car elles ne privent pas le salarié de toute indemnité (CA Aix-en-Provence 9 septembre 1996, n° 93-1437).

D’une manière générale, la notion de « loi de police » est plus restrictive que celle de « disposition impérative applicable à défaut de choix »

Comme l’énonce le considérant n°37 du règlement Rome I :

  • « Des considérations d'intérêt public justifient, dans des circonstances exceptionnelles, le recours par les tribunaux des États membres aux mécanismes que sont l'exception d'ordre public et les lois de police. La notion de "lois de police" devrait être distinguée de celle de "dispositions auxquelles il ne peut être dérogé par accord" et devrait être interprétée de façon plus restrictive. »

Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
www.ocean-avocats.com  

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