Inaptitude professionnelle : les indemnités spéciales ne sont pas toujours dues

Publié le 21/02/2016 Vu 2 802 fois 0
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Le Code du travail tient compte de la situation du salarié dont l’inaptitude est consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle. Celui-ci bénéficie, en principe, d’indemnités plus favorables qu’en cas d’inaptitude non professionnelle. Mais à certaines conditions…

Le Code du travail tient compte de la situation du salarié dont l’inaptitude est consécutive à un acciden

Inaptitude professionnelle : les indemnités spéciales ne sont pas toujours dues

Quelles sont les indemnités spéciales ?

Selon l’article L. 1226-14 du Code du travail, la rupture du contrat de travail du salarié inapte à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle ouvre droit, pour ce dernier, à une indemnité compensatrice « d’un montant égal à celui de l’indemnité compensatrice de préavis... »

Pour la Cour de cassation, cette indemnité compensatrice n’a pas la nature d’une indemnité de préavis et n’est donc pas soumise à une indemnité compensatrice de congés payés sur préavis (Cass. soc. 4 décembre 2001, n° 99-44677).

En revanche, les cotisations sociales afférentes à cette indemnité doivent être acquittées par l’employeur.

Par ailleurs, le licenciement d’un salarié inapte à la suite d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail ouvre droit à une indemnité spéciale de licenciement qui est égale au double de l’indemnité légale de licenciement (C. trav. art. L. 1226-14).

Il convient donc, dans un premier temps, de calculer l’indemnité légale de licenciement et, dans un second temps, de la multiplier par deux.

Si la convention collective prévoit le versement d’une indemnité de licenciement plus favorable, celle-ci s’applique à la place de l’indemnité spéciale de licenciement (même texte).
 

Le salarié en bénéficie-t-il toujours ?

La réponse à cette question est négative.

En effet, selon l’article L. 1226-14, al. 2 du Code du travail :

- « Toutefois, ces indemnités ne sont pas dues par l'employeur qui établit que le refus par le salarié du reclassement qui lui est proposé est abusif. »

Ainsi, le texte exclut le droit aux indemnités spéciales de rupture si l'employeur est en mesure de justifier que le refus par le salarié du reclassement proposé est abusif.

Comme le juge la Cour de cassation, le refus sans motif légitime par un salarié d'un poste approprié à ses capacités et comparable à l'emploi précédemment occupé peut revêtir un caractère abusif et le priver du bénéfice des indemnités spéciales de rupture de l'article L. 1226-14 du Code du travail (Cass. soc. 20 février 2008, n° 06-44867).

A titre d’illustration, si l’employeur propose au salarié inapte, en accord avec le médecin du travail, un poste spécialement aménagé en fonction de son état de santé, et que le salarié le refuse au motif qu'il est incompatible avec son état de santé, ce refus est abusif (Cass. soc. 21 novembre 2012, n° 11-23306).

De même, est considéré comme abusif le refus de l'emploi de reclassement, dès lors que la fiche de poste est conforme aux réserves émises par le médecin du travail lors de l'avis d'inaptitude, et qu'aucun élément ne permet au salarié d’affirmer que la fonction allait le soumettre à l'une des restrictions du médecin (Cass. soc. 7 janvier 2015, n° 13-20433).

Ces jurisprudences de la Cour de cassation ne sont pas neutres, car elles peuvent aboutir à priver le salarié inapte – pour un motif professionnel – des indemnités spéciales du Code du travail.

Cela étant, le refus « non légitime » du salarié est rarement retenu par la Cour de cassation.

Ainsi, le refus par un salarié du poste de reclassement ne peut pas être abusif dès lors que la proposition de reclassement entraîne une modification du contrat de travail  (Cass. soc. 19 mars 2008, n° 07-40327).

De même, n'est pas abusif le refus par un salarié inapte d'un poste de reclassement entraînant son déclassement professionnel et une diminution de son salaire (Cass. soc. 7 juillet 1993, n° 90-40770) ou la réduction de son coefficient hiérarchique (Cass. soc. 11 avril 1991, n° 87-41006).

La Cour de cassation a également pu juger qu’un salarié inapte à la suite d'un accident du travail, se voyant proposer un poste de travail éloigné de la région où il habitait, pouvait légitimement refuser cette offre de reclassement (Cass. soc. 22 janvier 1992, n° 89-40147).
 

En conclusion, tant l’employeur que le salarié doivent être vigilants en cas d’inaptitude professionnelle. Toutes les solutions doivent être mises en œuvre pour le reclassement du salarié inapte, et ce dernier ne peut les refuser sans condition.
 

Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
www.ocean-avocats.com  

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