En quoi consiste le motif d’insuffisance de résultats ?
L’insuffisance de résultats est un motif de licenciement relativement proche de l’insuffisance professionnelle.
En effet, elle correspond à la situation dans laquelle le salarié ne parvient pas à atteindre les résultats fixés, faisant donc preuve d’insuffisance.
La différence entre les deux motifs tient au fait que la non-atteinte des résultats peut se mesurer objectivement, alors que l’insuffisance professionnelle revêt un caractère plus subjectif.
Pour la Cour de cassation (Cass. soc. 23 janvier 2002, n° 99-44154) « l'insuffisance de résultats ne constitue pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement » et les juges doivent « rechercher si les objectifs fixés étaient réalisables et si le fait de ne pas les avoir atteints était imputable au salarié. »
Exemples :
- Le volume des ventes réalisées par un salarié très nettement en dessous de la moyenne atteinte par les vendeurs du même site, alors qu'aucun élément extérieur n'est susceptible d'altérer l'homogénéité des résultats (Cass. soc. 31 octobre 2007, n° 06-44165).
- La « non atteinte des résultats commerciaux à fin 1997 » d’un ingénieur commercial, alors qu’il avait acceptés les objectifs, lesquels étaient réalisables, qu’il disposait des moyens nécessaires à leur accomplissement, et qu'il n'était pas établi que ce secteur d'activité connaissait des difficultés particulières de nature à expliquer ses résultats limités (Cass. soc 2 décembre 2003, n° 01-44192).
- Les résultats d’un collaborateur commercial ne cessant de se dégrader, sans que l'intéressé puisse imputer cette baisse à des causes extérieures (Cass. soc du 22 mai 2001, n° 99-41838 et 99-41970.
Les résultats doivent-ils avoir été fixés d’un commun accord ?
La Cour de cassation considère que les objectifs peuvent être définis par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction.
Ainsi, une cour d'appel ne saurait juger qu’il incombe à l'employeur de démontrer l'existence d'un seuil de chiffre à réaliser résultant d'un accord des parties (Cass. soc. 20 octobre 2009, n° 08-41036).
Le salarié ne peut donc pas valablement soutenir que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse, au motif que les résultats ont été fixés unilatéralement par l’employeur.
L’employeur peut même, sous conditions, modifier les objectifs fixés au salarié.
La Cour de cassation (Cass. soc. 2 mars 2011 n° 08-44.977) a en effet jugé que, lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.
Ainsi, en présence d'un avenant au contrat de travail stipulant que les objectifs sont unilatéralement fixés par l'employeur, ce dernier peut les modifier sans avoir à recueillir l'accord du salarié, peu important les éventuelles incidences sur la rémunération.
La Cour de cassation pose cependant deux conditions :
- les objectifs fixés doivent être réalisables. Il s'agit d'un rappel d'une jurisprudence classique en matière de fixation unilatérale des objectifs (Cass. soc. 2 décembre 2003 n° 01-44.192) ;
- ces objectifs doivent avoir été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.
Comment caractériser l’insuffisance de résultats ?
Si les objectifs peuvent être définis de manière unilatérale, encore faut-il qu’ils soient fixés compte tenu de la conjoncture et des conditions d'exercice de l’activité du salarié.
Ainsi, le licenciement peut être jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse si le salarié parvient à établir que les objectifs fixés n’étaient pas réalistes ou que la situation du marché ne lui permettait pas de les atteindre.
Pour savoir si la non-atteinte des résultats est imputable au salarié, il est conseillé de comparer sa situation à celle de ses collègues. En effet, si le salarié ne remplit pas ses objectifs alors que ses collègues parviennent à atteindre des chiffres similaires, il est permis de penser que cette carence lui est imputable.
Quelle est la portée des clauses « couperet » ?
Certaines clauses prévoient que la non-atteinte des objectifs pendant une certaine durée est automatiquement constitutive d’un motif de licenciement.
La Cour de cassation (Cass. soc. 14 novembre 2000 n° 98-42.371) censure de telles dispositions, au motif « qu'aucune clause du contrat de travail ne peut valablement décider qu'une circonstance quelconque constituera une cause de licenciement ; qu'il appartient au juge d'apprécier (…) si les faits invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement peuvent caractériser une cause réelle et sérieuse de licenciement. »
Par conséquent, en dépit de la clause couperet, l’employeur doit faire ressortir, dans la lettre de licenciement, que la non-atteinte des objectifs est imputable au salarié.
A quel moment s’apprécie l’insuffisance de résultats ?
L’employeur doit être particulièrement vigilant quant à la période de réalisation des objectifs.
En effet, lorsque les objectifs sont fixés sur une période déterminée, le licenciement du salarié en cours de période n’est pas justifié (Cass. soc. du 29 septembre 2009, n° 07-45722).
Cette solution est logique car, si la période d’appréciation des objectifs n’a pas expiré, il est par définition impossible de savoir si le salarié aurait pu atteindre ses objectifs.
Cette solution peut poser des problèmes pratiques, si les objectifs sont fixés sur une longue période. Il peut ainsi sembler préférable de retenir des objectifs trimestriels plutôt que des objectifs annuels.
L’insuffisance de résultats doit-elle être d’une certaine importance ?
En d’autres termes, l’employeur peut-il envisager le licenciement du salarié, dès lors qu’il est établi que la non-atteinte des objectifs est imputable à ce dernier ?
Pour la Cour de cassation (Cass. soc. 18 avril 1991, n° 89-45471), le licenciement du salarié n’est pas justifié si les résultats obtenus sont proches des objectifs fixés.
Par conséquent, il est nécessaire que l’insuffisance professionnelle revête une certaine importance, étant précisé que tout dépend naturellement des circonstances.
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN AVOCATS