1/ Les faits
En l’espèce, il s’agissait d’une salariée protégée en qualité d'ancienne déléguée du personnel et d'ancienne déléguée syndicale.
Le 17 juillet 2009, cette salariée a fait l’objet d’une convocation à l’entretien préalable à son éventuel licenciement.
Le 24 septembre 2009, l’inspecteur du travail a refusé d'autoriser son licenciement et l’employeur a formé un recours hiérarchique.
Deux mois après, le 28 novembre 2009, la salariée a été désignée représentante de la section syndicale (RSS) CFDT.
Par décision du 19 mars 2010, le Ministre du travail a annulé la décision de l'inspecteur du travail et accordé l'autorisation de licenciement.
La décision du Ministre a été contestée avec succès par la salariée devant la juridiction administrative, ayant relevé que sa désignation comme RSS aurait dû être portée à la connaissance de l’autorité administrative.
2/ Les enjeux
A l’issue de l’entretien préalable et de la consultation du comité d’entreprise - chaque fois qu’elle est requise -, l’employeur doit adresser une demande d’autorisation à l’inspecteur du travail.
Cette demande d’autorisation doit être adressée par lettre recommandée avec avis de réception, mentionner le motif de licenciement et préciser les mandats détenus par le salarié protégé (CE 20 mars 2009, n° 308346 et n° 309195).
Cette dernière précision a pour objectif de permettre à l'inspecteur du travail :
- d'apprécier le motif invoqué par l'employeur par rapport au/x mandat/s détenu/s par le salarié (le motif est-il suffisant ? Est-il lié au mandat ?) ;
- de déterminer s’il existe un motif d'intérêt général exigeant de refuser l’autorisation.
Si le salarié acquiert un nouveau mandat au cours de la procédure de licenciement, celui-ci ne lui offre aucune protection, puisqu'il est postérieur à sa convocation à l’entretien préalable (Cass. soc. 6 décembre 2011, n° 10-18.071).
Cela étant, la jurisprudence considère, depuis longtemps, que l’autorisation de licenciement doit être refusée si l’employeur n’a pas porté à la connaissance de l’inspecteur du travail un mandat acquis par le salarié après l’engagement de la procédure.
Ainsi, le Conseil d’Etat a pu juger que doit être annulée la décision autorisant le licenciement d'un salarié protégé, lorsque l'inspecteur du travail n'a pas pris en compte le mandat obtenu par l'intéressé à une date comprise entre celle de sa saisine et celle de sa décision (CE 21 avril 1997 n° 161714).
Cette solution, réaffirmée par l’arrêt du 27 mars 2015, s’explique par le fait que l'autorité administrative se prononçant sur le licenciement d'un salarié protégé prend sa décision en fonction des circonstances de fait et de droit existant « au moment où elle statue » (CE 11 décembre 2006 n° 282699).
Or, si un nouveau mandat ne confère aucune protection au salarié protégé, des motifs d’intérêt général peuvent conduire l’administration (inspecteur du travail ou Ministre) à refuser l’autorisation de licenciement.
Comme l’énonce l’arrêt du 27 mars 2015 (4ème considérant) :
- « Si les dispositions du code du travail ne sauraient permettre à une protection acquise postérieurement à la date de l'envoi par l'employeur de la convocation à l'entretien préalable au licenciement de produire des effets sur la procédure de licenciement engagée par cet envoi, l'autorité administrative doit toutefois avoir connaissance de l'ensemble des mandats détenus à la date de sa décision, y compris ceux obtenus le cas échéant postérieurement à cette convocation, afin d'être mise à même d'exercer son pouvoir d'appréciation de l'opportunité du licenciement au regard de motifs d'intérêt général. »
Cette solution illustre parfaitement la complexité de la procédure de licenciement des salariés protégés, qui requiert la plus grande attention.
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats