1. Missions du CHSCT
a. Les trois types de mission
Il résulte de l’article L. 4612-1 du Code du travail que le CHSCT a trois types de missions :
1° Contribuer à la protection de la santé physique et mentale et de la sécurité des travailleurs de l'établissement et de ceux mis à sa disposition par une entreprise extérieure,
2° Contribuer à l'amélioration des conditions de travail, notamment en vue de faciliter l'accès des femmes à tous les emplois et de répondre aux problèmes liés à la maternité,
3° Veiller à l'observation des prescriptions légales prises en ces matières.
Le législateur a souhaité que le CHSCT ne soit pas une instance de décision, mais une véritable instance de concertation, chargée d'émettre des avis et de formuler des propositions destinées à informer l’employeur.
b. Le cas particulier des conditions de travail
La rédaction très large de l’article L. 4612-1 du Code du travail conduit à s’interroger, notamment sur les contours de la notion de « conditions de travail », qui fait naître une certaine insécurité juridique.
Pour l’administration (Circ. DRT 93-15 du 25 mars 1993), le CHSCT doit en particulier être associé à la recherche de solutions concernant :
- l'organisation matérielle du travail (charge de travail, rythme, pénibilité des tâches, élargissement et enrichissement des tâches) ;
- l'environnement physique du travail (température, éclairage, aération, bruit, poussière, vibrations) ;
- l'aménagement des postes de travail ;
- l'aménagement des lieux de travail et leurs annexes ;
- la durée et les horaires de travail ;
- l'aménagement du temps de travail (travail de nuit, travail posté).
Cette liste administrative n’est pas exhaustive. A titre d’exemple, les problématiques liées aux nouvelles technologies (Internet, email, smartphone) doivent être considérées comme faisant partie des « conditions de travail. »
Afin de remplir sa mission, le CHSCT dispose de plusieurs modes d’action, qui diffèrent selon la nature de la mission considérée.
2. Modes d’action du CHSCT
a. Prévention des risques
Selon l’article L. 4612-2 du Code du travail, le CHSCT procède à l'analyse des risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs de l'établissement, les femmes enceintes, ainsi qu'à l'analyse des conditions de travail.
Outre cette mission d’analyse, le CHSCT joue un rôle direct de prévention des risques professionnels dans l’entreprise, puisqu’il peut « susciter toute initiative » qu'il estime utile dans cette perspective.
Il peut notamment proposer des actions de prévention du harcèlement moral et du harcèlement sexuel (article L. 4612-3 du Code du travail).
Cette mission de prévention a vocation à s’exercer lors des réunions trimestrielles organisées par l'employeur, étant précisé que la fréquence de ces réunions doit être plus importante dans les branches d'activité présentant des risques particuliers (article L. 4614-7 du Code du travail).
Enfin, le CHSCT doit être réuni à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves ou à la demande motivée de deux de ses membres représentants du personnel (article L. 4614-10 du Code du travail).
b. Inspections
Les pouvoirs d’inspection du CHSCT sont fixés par l’article L. 4612-4 du Code du travail, selon lequel le CHSCT « procède, à intervalles réguliers, à des inspections. »
La fréquence de ces inspections est « au moins égale à celle des réunions ordinaires du comité », ce qui signifie qu’elle sont trimestrielles, sauf si des inspections plus fréquentes sont justifiées par des risques particuliers.
Les inspections du CHSCT ont notamment pour but de vérifier le respect, dans l’entreprise, des prescriptions législatives et réglementaires et de la mise en œuvre des mesures de prévention décidées par le CHSCT.
c. Enquêtes
Le CHSCT réalise des enquêtes en matière d'accidents du travail ou de maladies professionnelles ou à caractère professionnel (article L. 4612-5 du Code du travail).
Ces enquêtes sont réalisées par une délégation comprenant au moins l'employeur, ou un représentant désigné par lui, et un représentant du personnel siégeant au CHSCT.
Comme l’a précisé l’administration (Circ. DRT 93-15 du 25 mars 1993), en cas d'accident du travail grave, de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave, ou de situation de risque grave, « les enquêtes ont lieu obligatoirement. »
Enfin, le représentant du personnel au CHSCT qui constate l’existence d’une cause de danger grave et imminent, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, doit en alerter immédiatement l'employeur en consignant son avis par écrit.
La procédure à suivre en ce cas est fixée par les articles D. 4132-1 et suivants du Code du travail.
L'avis du représentant du personnel, daté et signé, est consigné sur un registre spécial dont les pages sont numérotées et authentifiées par le tampon du comité.
Il doit mentionner :
- les postes de travail concernés par la cause du danger constaté ;
- la nature et la cause de ce danger ;
- le nom des travailleurs exposés.
Au vu de cet avis, l'employeur doit immédiatement procéder à une enquête avec le représentant du CHSCT qui lui a signalé le danger, et prendre les dispositions nécessaires pour y remédier.
Parallèlement aux modes d’action susvisés, le CHSCT est une instance consultative dans de multiples domaines liés aux risques professionnels et aux conditions de travail.
3. Rôle consultatif du CHSCT
a. Consultation annuelle
Selon l’article L. 4612-16 du Code du travail, l'employeur doit présenter au CHSCT, au moins une fois par an, deux types de documents distincts :
- Un rapport annuel écrit faisant le bilan de la situation générale de la santé, de la sécurité et des conditions de travail dans son établissement et des actions menées au cours de l'année écoulée dans les domaines de compétence du CHSCT. La question du travail de nuit doit être traitée spécifiquement dans ce rapport ;
- Un programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail. Ce programme doit fixer la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l'année à venir, ainsi que, pour chaque mesure, ses conditions d'exécution et l'estimation de son coût.
Le CHSCT est appelé à émettre un avis sur le rapport et sur le programme annuels de prévention.
Par conséquent, l’ordre du jour de la réunion, établi conjointement par le président et le secrétaire, doit nécessairement mentionner la consultation du CHSCT sur ces documents.
L’avis doit être transmis pour information à l'inspecteur du travail.
Il importe enfin de préciser que l'employeur doit transmettre pour information le rapport et le programme au comité d'entreprise, accompagnés de l'avis du CHSCT (article L. 4612-17, alinéa 3 du Code du travail).
b. Consultations ponctuelles
En plus de la consultation annuelle, le CHSCT doit être consulté toutes les fois qu’est en jeu une question relevant de sa compétence.
En effet, comme l’énonce l’article L. 4612-13 du Code du travail, « indépendamment des consultations obligatoires prévues par la présente section, le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail se prononce sur toute question de sa compétence dont il est saisi par l'employeur, le comité d'entreprise et les délégués du personnel. »
Ce texte envisage donc la saisine du CHSCT, non seulement par l’employeur mais aussi par les représentants du personnel.
Il consacre la primauté du CHSCT en matière d’analyse des risques professionnels et des conditions de travail.
Le Code du travail prévoit enfin l’obligation pour l’employeur de consulter le CHSCT dans de nombreux cas particuliers (introduction de nouvelles technologies : article L. 4612-9 du Code du travail ; règlement intérieur : article L. 4612-12 ; aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail : article L. 4612-8 ; conditions dans lesquelles les équipements de protection individuelle sont mis à disposition et utilisés : R 4323-97, etc.).
Sur le fondement de ces textes, la jurisprudence a tendance à étendre l’obligation de consultation du CHSCT.
Ainsi, dans un arrêt du 28 novembre 2007 (n° 06-21.964), la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que le CHSCT doit être préalablement consulté avant la mise en place d’entretiens individuels d’évaluation des salariés.
Cette décision a suscité d’abondants commentaires, dans la mesure où la solution était loin d’être évidente.
Plus récemment, la Cour de cassation a considéré que constitue une décision d'aménagement important modifiant les conditions de travail et nécessitant la consultation du CHSCT le regroupement en un même lieu d'un service commun réparti sur plusieurs sites (Cass. soc. 30 juin 2010 n° 09-13.640).
En définitive, si la notion de risques professionnels paraît relativement circonscrite, la notion de conditions de travail est beaucoup plus vague et doit conduire le chef d’entreprise ou le DRH, en toute circonstance, à s’interroger sur le rôle du CHSCT dans leurs prises de décision.
Xavier BERJOT
Avocat Associé
OCEAN AVOCATS