- La rémunération variable sur objectifs fixés par l’employeur
Selon une jurisprudence classique de la Cour de cassation, le contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération du salarié, à condition que celle-ci soit fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, ne fasse pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et n'ait pas pour effet de réduire sa rémunération en dessous des minima légaux et conventionnels (Cass. soc. 2 juillet 2002, n° 00-13.111).
Cela étant, la jurisprudence exigeait traditionnellement que les modalités de la rémunération variable soient déterminées d’un commun accord entre l’employeur et le salarié.
A titre d’exemple, la Cour de cassation a pu admettre la validité de la clause prévoyant que les commissions seraient calculées sur le chiffre d'affaires mensuel, défini en fonction d'un indice résultant d’un système de facturation pratiqué par un fournisseur, dans la mesure où une telle clause est fondée sur un élément objectif étranger à la volonté de l'employeur (Cass. soc. 4 mars 2003, n° 01-41.864).
Plus récemment, un arrêt a jugé que, lorsque les objectifs à réaliser pour bénéficier d'une prime sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice (Cass. soc. 2 mars 2011, n° 08-44.977).
La portée de la décision est importante puisque la Cour de cassation admet explicitement que l’employeur fixe lui-même les objectifs du salarié, conditionnant son éventuelle rémunération variable.
Plus encore, il résulte de cet arrêt que l’employeur peut modifier les objectifs du salarié sans avoir à recueillir son accord, et ce quelles que soient les éventuelles incidences sur la rémunération.
La Cour de cassation pose cependant deux conditions :
- Les objectifs fixés doivent être réalisables. Il s'agit d'un rappel d'une jurisprudence classique en matière de fixation unilatérale des objectifs (Cass. soc. 2 décembre 2003, n° 01-44.192) ;
- Ces objectifs doivent avoir été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice.
Cet arrêt est particulièrement intéressant dans la mesure où il permet à l’employeur de modifier unilatéralement la rémunération variable.
Attention : dans un arrêt du 10 juillet 2013 (n° 12-17.921), la Cour de cassation a jugé qu’à défaut d'objectifs assignés au salarié pour l’obtention de sa rémunération variable, celle-ci est due en totalité.
Ainsi, si une partie du salaire peut dépendre d’objectifs fixés unilatéralement par l'employeur, ce salaire est intégralement acquis au salarié si l'employeur n'a ni précisé ces objectifs ni fixé les conditions de calcul de cette rémunération.
- La rémunération variable discrétionnaire
Si l’employeur peut déterminer les objectifs que le salarié devra remplir pour percevoir sa rémunération variable, il lui est également loisible de privilégier un système de prime discrétionnaire.
En effet, le contrat de travail peut parfaitement prévoir, en plus de la rémunération fixe, l'attribution d'une prime laissée à la libre appréciation de l'employeur (Cass. soc. 10 octobre 2012, n° 11-15.296).
Il en résulte que les paramètres d’attribution de la prime (mérite, qualité du travail, atteinte d’objectifs…) n’ont pas à être dévoilés par l’employeur.
A noter : n'a pas le caractère de salaire et ne doit pas être prise en compte dans l'assiette de calcul des indemnités de rupture et de l'indemnité minimale due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse une gratification bénévole dont l'employeur fixe discrétionnairement les montants et les bénéficiaires et qui est attribuée à l'occasion d'un événement unique (Cass. soc. 14 octobre 2009, n° 07-45.587).
Le libre versement d’une rémunération variable par l’employeur est remis en cause par une jurisprudence récente de la Cour de cassation selon laquelle le caractère discrétionnaire d'une rémunération ne permet pas à l’employeur de traiter différemment des salariés placés dans une situation comparable au regard de l'avantage considéré (Cass. soc. 10 octobre 2012, n° 11-15.296).
Ainsi, l'employeur ne peut pas opposer son pouvoir discrétionnaire pour se soustraire à son obligation de justifier, de façon objective et pertinente, une différence de traitement entre des salariés effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.
Il convient enfin de préciser que la prime discrétionnaire versée selon une certaine fixité peut devenir obligatoire pour l’employeur.
A titre d’exemple, une cour d'appel, qui constate que le versement d’une prime revêt les caractères de constance et de généralité, caractérise l'existence d'un usage rendant obligatoire le paiement de cette prime (Cass. soc. 28 octobre 1998, n° 96-44.469).
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats
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