1. Quelle est la différence entre un véhicule de fonction et un véhicule de service ?
Le véhicule de service est un véhicule d’entreprise utilisé par le salarié à des fins exclusivement professionnelles.
A l’inverse, le véhicule de fonction peut être défini comme celui qui peut être utilisé par le salarié à la fois à des fins professionnelles et personnelles (usage dit « mixte »).
Le critère de distinction entre ces deux notions tient donc à l’utilisation, personnelle ou non, du véhicule mis à la disposition du salarié.
2. Quel est le régime applicable au véhicule de fonction ?
Dans la mesure où le salarié peut utiliser le véhicule de fonction à des fins personnelles, il s’agit d’un avantage en nature, assimilé comme tel à un élément de salaire.
A ce titre, il doit faire l’objet d’une ligne distincte sur le bulletin de salaire.
Par ailleurs, la Cour de cassation considère que l’employeur ne peut priver le salarié de son véhicule de fonction, cette mesure étant assimilée à une modification du contrat de travail (Cass. soc. 14 juin 2007, n° 06-40877).
Il convient de noter que l’employeur ne peut pas non plus décider de la mise à disposition d'un véhicule de fonction en remplacement d’une indemnité kilométrique prévue par le contrat de travail en compensation des frais engagés par le salarié pour l'utilisation de son véhicule à des fins professionnelles (Cass. soc. 30 mars 2011, n° 09-68723).
Plus largement, l’ensemble des règles applicables au salaire (protection, soumission aux cotisations sociales, etc.) s’appliquent au véhicule de fonction.
3. Comment évaluer l’avantage en nature que constitue le véhicule de fonction ?
Pour l’URSSAF, l’avantage en nature résultant de l’utilisation du véhicule à titre privé durant la semaine peut être négligé lorsque cette utilisation pour les trajets domicile-travail constitue le prolongement des déplacements effectués à l’aide du véhicule (Circ. DSS du 19 août 2005).
Au-delà de cette tolérance, l’avantage en nature que constitue le véhicule de fonction doit être évalué aux fins du paiement des cotisations sociales.
L’évaluation peut se faire soit sur la base des dépenses réellement engagées par l’employeur pour le compte du salarié (amortissement de l’achat du véhicule, assurance et entretien, carburant, etc.), soit sur une base forfaitaire.
Les règles en la matière sont fixées principalement par l’arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale.
Enfin, précisons que cet avantage en nature est soumis à l’impôt sur le revenu et doit donc être ajouté aux salaires perçus.
4. Qu’advient-il du véhicule de fonction en cas de suspension du contrat de travail ?
La Cour de cassation considère qu’un véhicule de fonction, dont le salarié conserve l’usage dans sa vie personnelle, ne peut, sauf stipulation contraire, être retiré à l’intéressé pendant une période de suspension du contrat de travail (Cass. soc. 24 mars 2010, n° 08-43996).
A défaut, le salarié est fondé à solliciter des dommages-intérêts du fait de la privation du véhicule de fonction.
Cette règle est valable également si la mise à disposition du véhicule de fonction résulte d’un engagement unilatéral de l’employeur.
Dans un tel cas, l’employeur ne peut supprimer unilatéralement le véhicule de fonction utilisé par le salarié (Cass. soc. 23 juin 2010, n° 08-44899).
5. Le véhicule de fonction peut-il être repris par l’employeur en cas de dispense de préavis ?
Il résulte de l’article L. 1234-5 du Code du travail que la dispense par l’employeur de l’exécution du travail pendant le préavis ne doit entraîner, jusqu’à l’expiration de ce délai, aucune diminution des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail.
Sur ce fondement, la jurisprudence considère que l’employeur ne peut demander au salarié de restituer le véhicule de fonction constituant un avantage en nature, en cas de dispense de préavis.
La Cour de cassation a récemment jugé qu’une clause du contrat de travail ne peut pas prévoir que le salarié devra restituer un véhicule de fonction à la date de la notification du la rupture (Cass. soc. 11 juillet 2012, n° 11-15649).
6. L’avantage que constitue le véhicule de fonction entre-t-il en compte dans le calcul de l’indemnité de licenciement ?
Il résulte de l’article L. 1234-9, alinéa 2 du Code du travail que les modalités de calcul de l’indemnité légale de licenciement sont fonction « de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. »
Selon l’article R. 1234-4 du Code du travail, le salaire à prendre en compte est la formule la plus avantageuse parmi les deux suivantes :
- Soit le douzième de la rémunération des 12 derniers mois précédant le licenciement ;
- Soit le tiers des 3 derniers mois.
Dans la mesure où le véhicule de fonction constitue un avantage en nature, il entre en compte dans la base de calcul de l’indemnité de licenciement (Cass. soc. 11 décembre 1991, n° 88-40330).
7. Le véhicule de fonction peut-il être doté d’un dispositif de géolocalisation ?
Pour la CNIL, l’utilisation d’un traitement de géolocalisation « ne doit pas conduire à un contrôle permanent de l’employé concerné. Ainsi, la CNIL recommande la désactivation du système embarqué dans les véhicules des employés en dehors des horaires de travail ou lors des temps de pause (ex : déjeuner). » (Guide pour les employeurs et les salariés – Edition 2010).
A fortiori, l’employeur ne peut pas activer le dispositif de géolocalisation pour contrôler les activités du salarié le week-end.
8. L’utilisation du véhicule de fonction le week-end peut-il donner lieu à sanction ?
Pour la Cour de cassation, un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut, en principe, justifier un licenciement disciplinaire, sauf s'il constitue un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
Sur le fondement de ce principe, elle considère que le fait, pour un salarié qui utilise un véhicule dans l'exercice de ses fonctions de commettre, dans le cadre de sa vie personnelle, une infraction entraînant le retrait de son permis de conduire, ne saurait être regardé comme une méconnaissance par l'intéressé de ses obligations découlant de son contrat de travail (Cass. soc. 3 mai 2011, n° 09-67464).
Cet arrêt est naturellement applicable au véhicule de fonction.
Xavier Berjot
Avocat Associé
OCEAN Avocats