Alors que la pandémie a significativement augmenté les dépenses liées aux arrêts de travail, le gouvernement envisage des mesures pour réduire ces coûts. Ce sujet complexe implique à la fois des enjeux économiques et sociaux importants. Explorons les différentes pistes envisagées par les institutions compétentes.
L'augmentation des dépenses liées aux arrêts de travail, qui a atteint le chiffre record de 12 milliards d'euros en 2022, représente une hausse de 56% par rapport à 2017. Cette inflation est principalement due à des facteurs exceptionnels liés à la pandémie de COVID-19. La suppression du délai de carence pendant la crise sanitaire visait à encourager les travailleurs à rester chez eux en cas de symptômes ou après un contact avec le virus, pour éviter une propagation plus large. Cette mesure, bien que nécessaire, a considérablement augmenté la charge financière pour l'État.
En outre, l'augmentation du nombre d'arrêts pour raisons psychologiques a également contribué à cette hausse. Les périodes de confinement et l'incertitude généralisée ont exacerbé les troubles mentaux tels que l'anxiété et la dépression, entraînant une augmentation des arrêts maladie. Parallèlement, les revalorisations automatiques du SMIC ont influé sur le montant des compensations versées, puisque les indemnités journalières sont calculées en fonction du salaire.
Les causes de l'augmentation des dépenses des arrêts de travail
La crise sanitaire comme facteur d'accélération
L'augmentation des dépenses liées aux arrêts de travail s'explique en grande partie par les mesures dérogatoires prises pendant la crise sanitaire. Ces mesures ont entraîné une explosion des charges financières pour l'État.
- Compensation exceptionnelle des arrêts liés à la COVID-19
- Augmentation du nombre d'arrêts de travail pour raisons psychologiques
- Revalorisation automatique du salaire minimum impactant les compensations
Durant la crise sanitaire, la suppression du délai de carence pour encourager les arrêts en cas de symptômes ou de contact avec le virus a augmenté les charges financières pour l'État, contribuant fortement à l'escalade des coûts observée.
En 2022, les dépenses pour les arrêts de travail ont grimpé à 12 milliards d’euros, marquant une hausse de 56% par rapport à 2017, où elles s’élevaient à 7,7 milliards d’euros. Cette augmentation souligne la charge croissante pour la Sécurité sociale face à la gestion des arrêts maladie.
Les indemnités pour les arrêts de travail de plus de six mois, bien qu'ils ne représentent que 6% du total des arrêts, comptent pour 45% de la dépense totale, mettant en évidence le poids financier significatif des arrêts de longue durée.
Le poids de l'absentéisme et des hausses salariales
Outre la crise sanitaire, le taux élevé d'absentéisme, notamment lié à des troubles psychologiques, contribue également à cette montée en flèche des dépenses. Les diverses augmentations salariales, y compris celles du SMIC, jouent aussi un rôle crucial puisque les indemnités journalières sont calculées en fonction du niveau de revenu.
Les propositions de la Cour des Comptes
Renforcement de la lutte contre la fraude
Pour endiguer cette tendance, la Cour des Comptes propose avant tout de renforcer les mécanismes de prévention et de contrôle de la fraude. Une telle mesure permettrait de vérifier plus rigoureusement la légitimité des arrêts de travail octroyés.
Modifications des paramètres de compensation
En parallèle, la Cour des Comptes recommande d'ajuster les paramètres de compensation afin de réduire les dépenses liées aux arrêts de travail.
- Introduction d'un jour de carence supplémentaire pris en charge par les entreprises
- Réduction du taux de couverture par la Sécurité sociale pour les arrêts de courte durée
Pour freiner cette tendance, la Cour des comptes propose de porter le délai de carence de trois jours actuellement à sept pour tous les salariés du secteur privé, une mesure qui permettrait d'économiser jusqu'à 945 millions d'euros. En outre, l'introduction d'un jour de carence d’ordre public, sans indemnisation par la Sécurité sociale ni par les employeurs, pourrait réduire les coûts pour les entreprises de près d'un milliard d’euros.
L'impact de ces mesures sur les entreprises serait significatif. Selon les scénarios, les employeurs pourraient voir leurs charges augmenter de 330 à 660 millions d'euros. Actuellement, les entreprises prennent souvent en charge le complément de salaire dès le premier jour d'absence, une pratique coûteuse qui a atteint environ 5 milliards d'euros en 2022. Les nouvelles mesures pourraient donc soulager ces coûts mais aussi transférer une partie de la charge financière de l'État vers le secteur privé.
Cependant, avant d'implémenter ces changements, une concertation approfondie avec les partenaires sociaux est cruciale pour assurer que les mesures soient équitables et ne favorisent pas des disparités entre les différents secteurs et catégories d'employés. Le dialogue social permettra d'identifier et de mitigier les impacts potentiellement négatifs sur les travailleurs, en particulier ceux à revenus modestes.
Les conséquences financières pour les entreprises
Impact direct sur les employeurs
Deux scénarios principaux sont envisagés, chacun ayant des implications financières distinctes pour les entreprises :
- Augmentation des jours de carence appliqués aux employés, coût estimé : 330 à 660 millions d'euros selon le scénario retenu.
- En comparaison, la charge financière directe supportée par les entreprises pour maintenir le salaire pendant les périodes de maladie est évaluée à 5 milliards d'euros en 2022.
Soulagement potentiel grâce aux nouvelles mesures
L'introduction d'une journée de carence publique pourrait faire économiser environ 1 milliard d'euros aux entreprises, bien que cela n'impacterait pas directement les dépenses de la Sécurité Sociale.
L'opinion des partenaires sociaux
Préférence du Medef pour une solution alternative
Contrairement à l'idée d'augmenter le délai de compensation par l'Assurance Maladie, le Medef a exprimé sa préférence pour d'autres solutions telles que celles recommandées par la Cour des Comptes en 2019, qui pourraient potentiellement inclure des aménagements plus favorables aux entreprises.
Nécessité d'une consultation collective
Avant toute mise en œuvre de ces mesures, il est impératif de consulter les partenaires sociaux afin de prévoir et de minimiser les effets différenciés selon les catégories d'employés et les secteurs d’activité.
Avant l'application de ces mesures, une concertation approfondie avec les partenaires sociaux est essentielle pour anticiper les impacts différenciés sur les diverses catégories d'employés et secteurs, assurant ainsi une mise en œuvre équitable et adaptée.
Avenir des arrêts de travail : une question d'équilibre
Réduire les dépenses liées aux arrêts de travail sans compromettre le bien-être des employés représente un défi de taille pour le gouvernement. Il est indispensable de trouver un équilibre entre les impératifs économiques et les besoins sociaux, tout en assurant la viabilité du système de santé et la justice sociale.