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Indemnité d'occupation et droit d'option du bailleur : quelles conséquences en matière de bail commercial ?

Publié le 07/04/2025 Vu 1 066 fois 0
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Droit d'option du bailleur : conséquences de l'indemnité d'occupation rétroactive pour le locataire d'un bail commercial renouvelé.

Droit d'option du bailleur : conséquences de l'indemnité d'occupation rétroactive pour le locataire d'un ba

Indemnité d'occupation et droit d'option du bailleur : quelles conséquences en matière de bail commercial ?

Comprendre l'indemnité d'occupation dans les baux commerciaux

Définition et cadre juridique de l’indemnité d’occupation

Lorsqu'un bail commercial arrive à son terme sans renouvellement formel, le locataire, en restant dans les locaux, devient un occupant sans titre régulier. Il doit alors verser une indemnité d’occupation dont le régime juridique diffère profondément de celui du loyer. En effet, alors que le loyer résulte d'un contrat renouvelé ou tacitement prolongé, l'indemnité d'occupation sanctionne l'occupation effective et irrégulière des lieux.

Cette indemnité est fixée en fonction de la valeur locative réelle du bien loué, conformément à l'article L.145-28 du Code de commerce, en tenant compte notamment :

  • des caractéristiques propres du local,

  • des prix pratiqués à proximité,

  • des facteurs économiques locaux.

Le droit d’option : notion et modalités pratiques

Le droit d’option, prévu par l'article L.145-57 du Code de commerce, permet au bailleur, initialement favorable au renouvellement, de se rétracter si le loyer fixé judiciairement ne lui convient pas. Ce droit doit être exercé impérativement dans un délai d'un mois suivant la décision judiciaire fixant le nouveau loyer.

Lorsque ce droit est exercé, il produit un effet rétroactif : le locataire n’est plus redevable d’un loyer à compter de la fin initiale du bail, mais d’une indemnité d’occupation fixée à la valeur locative.

La portée juridique de la décision de la Cour de cassation du 27 février 2025 (Cass. 3e civ. n°23-18.219)

Faits et enjeux principaux du litige

Dans l’arrêt du 27 février 2025, la Cour de cassation a été amenée à trancher une problématique délicate. Un locataire avait sollicité un renouvellement de bail commercial à compter du 1er janvier 2015. Bien que le bailleur eût initialement accepté, il a ultérieurement demandé la fixation judiciaire d’un loyer déplafonné. Devant le refus du juge de fixer un loyer supérieur au plafonné, le bailleur a exercé son droit d’option et réclamé une indemnité d'occupation rétroactive à compter du 1er janvier 2015, date initiale d’expiration du bail.

La Cour d'appel avait cependant restreint cette indemnité à compter du 1er janvier 2016, en estimant qu’avant cette date, le bailleur n'avait pas encore manifesté clairement sa volonté de réclamer une valeur locative supérieure au loyer plafonné.

Analyse juridique et portée de l’arrêt de la Cour de cassation

La Cour de cassation a censuré cette position restrictive. Elle rappelle fermement que lorsque le bailleur exerce son droit d'option après la fixation judiciaire du loyer, l'indemnité d’occupation est due rétroactivement à partir de la date d’expiration du bail initial, indépendamment du moment précis où le bailleur manifeste cette décision.

La rétroactivité opérée par l’exercice du droit d’option entraîne des conséquences financières importantes pour le locataire :

  • Fin du bénéfice du loyer plafonné à compter de la date d’expiration du bail.

  • Mise en place immédiate d'une indemnité calculée selon la valeur locative réelle, généralement plus élevée.

  • Risque accru de précarisation du maintien du locataire dans les locaux loués.

Conséquences pratiques pour les bailleurs et les locataires

Les précautions nécessaires pour les bailleurs commerciaux

Les bailleurs doivent particulièrement veiller au respect du délai légal strict prévu par le Code de commerce. Le non-respect du délai d’un mois fixé par l’article L.145-57 pour exercer le droit d’option entraîne la perte irrévocable de ce droit.

Le bailleur prudent doit donc :

  • Surveiller précisément les échéances judiciaires liées à la fixation du loyer renouvelé.

  • Exercer formellement son droit d'option dans le délai légal afin d’optimiser ses intérêts financiers et stratégiques.

La vigilance recommandée aux locataires commerciaux

Pour les locataires, cette décision est une alerte importante quant au risque financier et juridique que représente l’indemnité d’occupation rétroactive. Un locataire avisé devra impérativement :

  • Évaluer le risque d’une fixation d’indemnité d'occupation supérieure au loyer initial, notamment en cas de contentieux sur la fixation judiciaire du loyer.

  • Anticiper une éventuelle précarité d’occupation et intégrer cette donnée dans les négociations précontentieuses avec le bailleur.

  • Se prémunir contre ce risque en tentant une fixation amiable rapide du nouveau loyer.

Comment gérer efficacement l'indemnité d’occupation et le droit d’option ?

Insérer des clauses spécifiques dans le bail commercial

Compte tenu des risques, les contrats commerciaux devraient désormais intégrer explicitement les conséquences du droit d’option et les modalités de fixation éventuelle d’une indemnité d’occupation :

  • Prévoir les conditions précises d’évaluation de la valeur locative,

  • Définir clairement les modalités de déclenchement du droit d’option,

  • Éventuellement fixer contractuellement une durée maximale ou des montants plafonds pour l’indemnité d’occupation.

Le recours à la négociation amiable ou à la médiation

Les parties peuvent privilégier des solutions amiables ou des mécanismes de médiation, accompagnés par des avocats spécialisés. Ces démarches offrent des avantages notables :

  • Rapidité et réduction des coûts par rapport à un contentieux judiciaire.

  • Sécurisation juridique par un accord mutuellement acceptable évitant l’aléa judiciaire.

  • Conservation d’une relation commerciale saine entre bailleur et locataire.

Rôle essentiel du conseil juridique spécialisé en droit des baux commerciaux

Dans ces contextes complexes, la consultation d’un avocat en droit des baux commerciaux constitue une garantie essentielle. Celui-ci aura notamment pour rôle de :

  • Prévenir les risques liés à l’exercice du droit d’option.

  • Conseiller précisément le locataire ou le bailleur sur la conduite à tenir devant le juge des loyers commerciaux.

  • Accompagner les négociations pour sécuriser contractuellement le renouvellement du bail.

Textes juridiques clés à connaître :

  • Article L.145-28 du Code de commerce : Fixation de l'indemnité d'occupation à la valeur locative réelle.

  • Article L.145-33 du Code de commerce : Critères juridiques de la valeur locative commerciale.

  • Article L.145-57 du Code de commerce : Encadrement du droit d’option du bailleur commercial.

Synthèse : points essentiels à retenir sur l’indemnité d’occupation et le droit d’option

Pour conclure cet article juridique détaillé, il est important de retenir les points clés suivants :

 

  • Le droit d’option exercé par le bailleur commercial entraîne une indemnité d’occupation rétroactive depuis la date d'expiration du bail.

  • Cette indemnité correspond à la valeur locative réelle du local loué et échappe aux règles de plafonnement.

  • Une anticipation contractuelle et une gestion amiable des conflits sont fortement recommandées pour limiter les risques financiers et juridiques.

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