Blog de Le Bouard Avocats Versailles

Spécialiste Droit du Travail, Droit des Sociétés, Droit Commercial, Droit Médical

Rupture conventionnelle en arrêt maladie : négocier sereinement et protéger ses droits

Publié le 06/01/2025 Vu 257 fois 0
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La rupture conventionnelle permet de mettre fin à un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) de manière amiable. Lorsque le salarié se trouve en arrêt maladie, la mise en œuvre de cette démarche soulève des questions

La rupture conventionnelle permet de mettre fin à un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) de man

Rupture conventionnelle en arrêt maladie : négocier sereinement et protéger ses droits

La rupture conventionnelle est un dispositif permettant de mettre fin à un contrat de travail à durée indéterminée (CDI) de manière amiable. Lorsque le salarié se trouve en arrêt maladie, la mise en œuvre de cette démarche soulève des questions spécifiques : le consentement demeure-t-il libre et éclairé ? Quel est l’impact sur les indemnités journalières et l’assurance chômage ? Que faire en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle ? Cet article s’attache à répondre à ces interrogations de façon exhaustive et pédagogique.


Qu’est-ce qu’une rupture conventionnelle ?

Définition légale

  • Prévue aux articles L.1237-11 et suivants du Code du travail.
  • Résulte d’un accord amiable entre le salarié et l’employeur, soumis à l’homologation de l’autorité compétente (DREETS).
  • Se distingue du licenciement (décision unilatérale de l’employeur) et de la démission (initiative du salarié).

Caractéristiques principales

  • Libre consentement : ni l’employeur ni le salarié ne peuvent être contraints de signer la convention.
  • Procédure formelle : entretien(s) préalable(s), délai de rétractation (15 jours calendaires), homologation administrative (15 jours ouvrables).
  • Indemnité : le salarié perçoit une somme au moins égale à l’indemnité légale de licenciement.

Pourquoi s’interroger sur la rupture conventionnelle en arrêt maladie ?

Contexte d’incapacité

  • Le contrat de travail est suspendu pendant un arrêt maladie.
  • L’employeur ne peut exiger aucune prestation professionnelle, le salarié bénéficiant d’une protection contre tout licenciement fondé sur son état de santé.

Risques potentiels

  • Vice du consentement : un salarié fragilisé pourrait se voir imposer une solution inadaptée.
  • Questions de maintien des droits : quelles conséquences sur les indemnités journalières, sur l’ouverture des droits au chômage, ou encore sur la prise en charge en cas d’accident du travail ?

Objectif

  • Démontrer qu’une rupture conventionnelle reste légalement possible, à condition de respecter une démarche transparente, sans pression, et conforme aux dispositions du Code du travail.

 

Vous cherchez un avocat pour négocier une rupture conventionnelle à Versailles ? Contactez Le Bouard Avocats

 


Cadre juridique et principes généraux

Code du travail et arrêt maladie

  • L’arrêt maladie n’entraîne pas la rupture, mais la suspension du contrat.
  • Le salarié conserve ses droits, dont l’ancienneté et les avantages conventionnels.
  • Le licenciement demeure interdit s’il est motivé par la seule maladie, sauf situations encadrées par la loi (inaptitude réelle, motif économique non lié à la santé du salarié, etc.).

Circulaire et jurisprudences

  • Une circulaire administrative a un temps considéré qu’il ne fallait pas signer de rupture conventionnelle pendant une période de suspension (accident du travail, congé maternité, etc.).
  • La Cour de cassation, toutefois, a admis la validité de conventions conclues en période d’arrêt, sous réserve de l’absence de fraude ou de pression.
  • En pratique, la jurisprudence estime que si le salarié a pu donner son consentement sans contrainte, la convention est jugée licite.

Peut-on conclure une rupture conventionnelle malgré un arrêt maladie ?

Avis des juges

  • Les tribunaux procèdent à un examen détaillé des circonstances de la signature.
  • La convention est validée si l’employeur prouve qu’aucune contrainte ne l’a imposée au salarié.
  • En cas de maladie professionnelle ou d’accident du travail, un contrôle plus approfondi peut être exercé afin de vérifier que l’entreprise n’élude pas ses obligations de reclassement ou d’indemnisation complémentaire.

Exigences pratiques

  • Organiser un entretien pendant les plages de sortie autorisées, si l’arrêt maladie le prévoit.
  • Proposer, si nécessaire, un aménagement (visioconférence, déplacement à domicile) sans que cela ne soit imposé, afin de ne pas porter atteinte au libre choix du salarié.
  • Permettre au salarié de se faire assister (représentant du personnel ou toute personne habilitée).

En résumé
La signature d’une rupture conventionnelle pendant un arrêt maladie n’est pas formellement interdite. Il faut cependant s’assurer que le salarié, même en incapacité de travail, est conscient de ses droits et consent effectivement à l’opération, sans intimidation ni méprise sur les conséquences.


Comment sécuriser la démarche ?

Étapes essentielles

  1. Prise de contact

    • L’employeur ou le salarié peut initier la demande de rupture conventionnelle.
    • Rédiger un bref courrier ou un courriel pour garder une trace de la proposition.
  2. Entretien préalable

    • Prévoir un rendez-vous conciliant l’état de santé du salarié et la nécessité de le rencontrer.
    • Aborder la date de fin de contrat, l’indemnité, et tout autre élément substantiel (congés payés, clause de non-concurrence, etc.).
  3. Signature de la convention

    • Rédiger le document en respectant les mentions obligatoires (identité des parties, date envisagée de fin de contrat, montant de l’indemnité, etc.).
    • Faire dater et signer par les deux parties.
  4. Délai de rétractation

    • Quinze jours calendaires à compter du lendemain de la signature.
    • Possibilité d’envoyer une lettre recommandée pour annuler la convention.
  5. Demande d’homologation

    • Transmettre le dossier à la DREETS (formulaire complété, convention signée).
    • L’administration dispose de 15 jours ouvrables pour valider ou refuser.

Points de vigilance

  • Consentement : veiller à ce que le salarié ne subisse pas de pression ou de manipulation, particulièrement s’il traverse une période de fragilité psychologique.
  • Informations claires : exposer les impacts sur les indemnités journalières, la couverture sociale, ou l’éventuel délai de carence chômage.
  • Aucun contournement de la loi : une fraude visant à échapper à l’indemnisation d’un accident du travail serait passible de sanctions.

Quelles indemnités pour le salarié en arrêt maladie ?

Indemnités de rupture conventionnelle

  • Montant au moins égal à l’indemnité légale de licenciement.
  • Calcul basé sur l’ancienneté, la rémunération de référence et d’éventuelles clauses conventionnelles plus favorables.

Maintien des indemnités journalières

  • Tant que l’arrêt maladie est médicalement prescrit, le salarié peut percevoir ses indemnités journalières jusqu’à la date effective de rupture.
  • Après la fin du contrat, si le salarié est toujours en incapacité de travail, les prestations de la Sécurité sociale continuent d’être versées dans les conditions habituelles, jusqu’à la consolidation de l’état de santé.

Allocations chômage

  • L’homologation de la rupture conventionnelle ouvre droit à l’assurance chômage, sous réserve de remplir les critères d’affiliation et d’aptitude à la recherche d’emploi.
  • Le salarié doit informer l’organisme gestionnaire (France Travail) de son état de santé s’il reste en arrêt. Dans ce cas, il peut y avoir une suspension temporaire de l’inscription jusqu’au rétablissement.

Que se passe-t-il en cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle ?

Protection renforcée

  • Le Code du travail interdit la rupture motivée par un accident du travail ou une maladie professionnelle, sauf en cas de faute grave ou d’impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à l’accident.
  • La conclusion d’une rupture conventionnelle demeure toutefois réalisable, pourvu que le consentement soit exempte de vice, et que l’employeur ne cherche pas à se soustraire à une obligation de reclassement.

Majoration et taux AT/MP

  • Un salarié victime d’un accident du travail peut bénéficier de majorations spécifiques si une incapacité est reconnue.
  • Le taux AT/MP de l’employeur pourrait être impacté par la sinistralité, indépendamment de la signature d’une convention de rupture.

Précautions pratiques

  • Consulter le médecin du travail, si nécessaire, pour évaluer la compatibilité du reclassement.
  • Ne pas éluder la visite de reprise.
  • Faire preuve de transparence sur les indemnités complémentaires dues.

Quels recours en cas de litige ?

Contestation par le salarié

  • Si le salarié se juge lésé ou contraint, il peut saisir le conseil de prud’hommes dans l’année suivant l’homologation.
  • Il devra prouver l’existence d’un vice du consentement (harcèlement, pression morale, tromperie, etc.).

Conséquences de l’annulation

  • Le salarié peut obtenir des indemnités au titre du licenciement abusif ou se voir réintégré si la rupture est déclarée nulle.
  • L’employeur risque également une requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse, assortie de dommages-intérêts.

Responsabilité de l’employeur

  • L’entreprise est invitée à respecter scrupuleusement la procédure et à faire preuve d’honnêteté.
  • Les juges peuvent considérer qu’une rupture conventionnelle conclue pendant un arrêt maladie n’a d’effet que si toutes les garanties légales ont été assurées.

Bullet points récapitulatifs et bonnes pratiques

  • Toujours vérifier le libre consentement du salarié : un état dépressif, un burn-out ou une maladie professionnelle accroissent la vigilance requise.
  • Planifier l’entretien pendant les horaires de sortie autorisée et laisser un temps de réflexion suffisant.
  • Respecter scrupuleusement la procédure : formulaire, signature, délai de rétractation, homologation.
  • Expliquer clairement les conséquences sur les droits sociaux, l’assurance chômage et les indemnités journalières.
  • Conserver des écrits (courriels, lettres, compte-rendus d’entretien) afin de prouver la bonne foi de chaque partie.
  • Ne pas omettre la visite de reprise en cas d’AT/MP ou d’inaptitude déclarée par le médecin du travail, sauf si la rupture intervient avant la fin de l’arrêt.

Conclusion

La rupture conventionnelle et l’arrêt maladie ne sont pas incompatibles, sous réserve d’une observation stricte des règles de droit et de la protection due au salarié. Le Code du travail autorise la cessation amiable d’un CDI pendant cette période de suspension, mais impose un cadre procédural rigoureux destiné à protéger la liberté de consentement de chacun. L’employeur doit démontrer que le salarié, même en incapacité de travail, n’a pas été privé de ses moyens de discernement ou soumis à des pressions.

En pratique, le salarié conserve ses indemnités journalières jusqu’à la fin de son contrat et pourra percevoir des allocations chômage, dès lors qu’il remplit les conditions légales et qu’il est en mesure de reprendre une activité à l’issue de son arrêt. En cas de litige, le conseil de prud’hommes reste compétent pour vérifier l’absence de vice du consentement et sanctionner d’éventuels abus.

Ainsi, pour éviter tout risque d’annulation ou de requalification, la négociation doit être transparente, loyale et menée selon les étapes prévues (entretien, signatures, homologation). L’accent doit être mis sur la clarté des informations et l’intégrité de la démarche. À ce prix, la rupture conventionnelle peut constituer une solution satisfaisante pour l’employeur comme pour le salarié, y compris dans le contexte délicat de l’arrêt maladie.

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles