Une aide d'État est définie par l'article 87§1 du Traité CE. Celui-ci dispose que « sauf dérogations, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États sous quelque forme que ce soit qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ».
De cette définition donnée par le Traité européen se dégage clairement quatre critères. Ainsi une aide est d'État lorsque elle est accordée par un État, sous une forme qui importe peu (subvention, prêt, dispense de taxe...), qu'elle menace de fausser la concurrence, et enfin qu'elle favorise certaines entreprises ou certaines productions. Si l'aide accordée ne remplit pas l'un de ces quatre critères, elle ne pourra pas être qualifiée d'aide d'État.
En pratique, le dernier critère est le plus difficile à déterminer. En effet, il est aisé de déterminer si une aide provient d'un État ou non. Il faut comprendre cette notion dans son sens large, une collectivité locale étant assimilée à l'État. La raison en est que dans l'Union européenne chaque État membre à son propre système de délimitation des entités inférieure à la forme étatique. Si en France nous avons les régions et départements, l'Allemagne à ses Länder, par exemple. Mais tous sont assimilés à l'État, le droit européen ne faisant pas de distinction entre les entités infra-étatiques et l'État. Ensuite, parler dans la définition de « sous quelque forme que ce soit » permet d'y inclure n'importe quelle forme, et d'en donner une interprétation très large, voir illimitée. Enfin, dire qu'il faut que cette aide étatique soit en mesure de menacer de fausser la concurrence permet là encore d'en faire une interprétation très large, donnant à la Cour de justice un large pouvoir de qualification de ces aides. Ainsi, une menace s'appréciera en fonction de l'effet qu'elle pourrait éventuellement produire, de l'hypothèse de son action sur la concurrence. Donc tout.
Le dernier critère est alors bien le plus important dans la définition. Parler d'une aide étatique favorisant certaines entreprises ou certaines production amène à parler du critère de sélectivité d'une aide d'État. Il est d'ailleurs en relation avec le troisième critère, puisque accorder un avantage sous-tend la distorsion de concurrence, une menace pour celle-ci. Car une aide actuelle n'aura pas toujours d'effet immédiat pour la concurrence, mais cet effet pourra être ressentie plus tard. Aussi la Cour s'attache t-elle à apprécier l'effet futur (CJCE, 16 mai 2000, France c/Ladbroke Racing). Ce critère a pu prendre de l'importance avec le temps, puisque dans les débuts du contentieux des aides d'États, celles ci étaient évidente, et ne demandaient pas d'essayer de voir les effets futurs. Mais aujourd'hui les aides sont devenues plus indirectes, plus cachées, sous forme de mesures fiscales, sociales ou autres.
Ainsi la sélectivité revient à porter atteinte à l'équilibre entre l'entreprise bénéficiaire et ses concurrentes. Cette définition se doit d'être large, sous risque d'exclure tous les programmes d'aides ayant pour caractéristique de n'énoncer que des critères abstraits pour déterminer le cadre des bénéficiaires.
Le critère de sélectivité permet également de distinguer les aides d'États des mesures générales de soutien économique susceptibles de s'appliquer à toutes les entreprises de l'ensemble des secteurs économiques d'un État membre. Il s'agit en effet du pouvoir des États membres d'élaborer leur politique économique, fiscale ou sociale en fonction de la conjoncture. Vous l'aurez compris, dans ce cas-là la mesure est d'ordre générale et ne relève pas de l'article 87§1 CE.
En revanche, l'aide étatique peut être qualifiée de sélective, et donc relever de cet article, mais elle pourra être justifier soit par la nature et l'économie d'un système, soit parce qu'elle entre dans la définition de l'article 87§3 CE qui énumère les aides compatibles avec le marché commun, comme par exemple celles « destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques [...] ».
Benjamin Chouteau