La concurrence fiscale internationale

Publié le 27/01/2025 Vu 99 fois 0
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Les efforts de l'OCDE et de l'Union européenne, ainsi que la réforme de la fiscalité numérique, sont des étapes importantes vers une gouvernance fiscale internationale

Les efforts de l'OCDE et de l'Union européenne, ainsi que la réforme de la fiscalité numérique, sont des Ã

La concurrence fiscale internationale

 

Introduction

La concurrence fiscale internationale désigne la situation où des pays, par l’intermédiaire de leurs politiques fiscales, cherchent à attirer des investissements étrangers ou des ressources financières en offrant des régimes fiscaux plus attractifs que ceux de leurs voisins ou concurrents. Cette compétition se manifeste par des réductions d’impôts sur les sociétés, des exonérations fiscales ou des taux d’imposition préférentiels, dans le but d’attirer des entreprises ou des particuliers. Si elle peut stimuler la croissance économique et la compétitivité, la concurrence fiscale soulève également des questions juridiques importantes, notamment en matière d’équité fiscale, de transparence, et d'harmonisation internationale.

Cet article explore les enjeux juridiques liés à la concurrence fiscale internationale, en analysant les mécanismes de cette concurrence, les effets sur les systèmes fiscaux nationaux, ainsi que les efforts internationaux pour réguler et limiter ses impacts négatifs.

I. Les mécanismes de la concurrence fiscale internationale

1.1. L’objectif de la concurrence fiscale : attirer les investissements

Les pays recourent à la concurrence fiscale pour renforcer leur attractivité économique et encourager l’implantation d’entreprises multinationales ou d’investisseurs étrangers. Les principaux outils utilisés pour cette concurrence sont :

  • La réduction des taux d’imposition des sociétés : De nombreux pays, en particulier les petites juridictions financières ou les territoires dits « paradis fiscaux », adoptent des taux d’imposition très faibles sur les sociétés pour attirer des entreprises internationales. Par exemple, certains pays comme l'Irlande ou le Luxembourg ont historiquement proposé des taux d’impôt sur les sociétés plus bas que ceux pratiqués dans d’autres pays européens.

  • Les exonérations fiscales : Certains États offrent des exonérations fiscales spécifiques ou des incitations fiscales aux entreprises établissant une activité dans leur territoire, en particulier pour certaines industries ou secteurs comme la recherche et développement, les technologies ou les investissements en infrastructures.

  • Les régimes fiscaux préférentiels : Les régimes fiscaux avantageux peuvent inclure des exonérations de taxe sur les dividendes, les plus-values ou les intérêts, ou encore des dispositifs permettant aux entreprises de minimiser leur imposition par le biais de règles favorisant l’amortissement accéléré ou l’imposition d'un impôt minimal sur certaines transactions.

Ces politiques visent à attirer des capitaux étrangers, à encourager la création d'emplois, et à dynamiser l'économie d’un pays en stimulant l'investissement direct étranger.

1.2. Les paradis fiscaux et la concurrence fiscale agressive

Les paradis fiscaux jouent un rôle central dans la concurrence fiscale internationale. Ces territoires, souvent caractérisés par des régimes fiscaux très faibles, voire inexistants, attirent les multinationales, les investisseurs et les particuliers fortunés cherchant à réduire leur charge fiscale. Les paradis fiscaux permettent également l’optimisation fiscale agressive, où les entreprises exploitent des failles dans la législation pour transférer leurs bénéfices vers des juridictions à faible imposition, en contournant ainsi les impôts dus dans d’autres pays.

1.3. Les mécanismes de planification fiscale agressive

En parallèle des paradis fiscaux, les entreprises multinationales ont développé des stratégies de planification fiscale agressive pour réduire leur impôt sur les sociétés au niveau global. Cela inclut l’utilisation d’entités dans des juridictions à fiscalité favorable pour réaliser des transactions intra-groupes (comme des transferts de prix) qui minimisent artificiellement les bénéfices dans les pays à forte imposition. Les mécanismes de « double non-imposition » sont également utilisés, permettant à des entreprises d’éviter l’impôt en profitant de divergences dans les systèmes fiscaux de plusieurs pays.

II. Les conséquences juridiques et économiques de la concurrence fiscale

2.1. L’impact sur l’équité fiscale internationale

L’un des principaux problèmes associés à la concurrence fiscale est la question de l’équité fiscale. En permettant à certaines entreprises de payer des impôts dérisoires, la concurrence fiscale aggrave les inégalités fiscales entre les pays. Les États à forte imposition, souvent des économies développées, peuvent être contraints de réduire leurs taux d’imposition pour rester compétitifs, ce qui peut entraîner une réduction des recettes fiscales nationales. Cela nuit à la capacité des gouvernements à financer des services publics essentiels comme l’éducation, la santé ou les infrastructures.

De plus, la concurrence fiscale peut créer un environnement où les grandes entreprises et les particuliers fortunés peuvent se permettre d’optimiser leur fiscalité de manière disproportionnée, tandis que les petites entreprises et les citoyens ordinaires n’ont pas accès aux mêmes opportunités d'évasion fiscale. Ce déséquilibre peut engendrer un sentiment d’injustice et de méfiance envers les systèmes fiscaux nationaux.

2.2. L'érosion de la base d’imposition mondiale

La concurrence fiscale, en particulier via les paradis fiscaux et la planification fiscale agressive, entraîne une érosion de la base d’imposition. Les pays perdent ainsi des recettes fiscales essentielles, et ce phénomène peut avoir des répercussions négatives sur les finances publiques mondiales. Les données des organisations internationales telles que l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) ont montré que des sommes considérables échappent chaque année au fisc mondial en raison des stratégies d’optimisation fiscale des multinationales.

L’érosion de la base d’imposition est particulièrement problématique pour les pays en développement, qui dépendent largement des recettes fiscales pour financer des projets de développement et lutter contre la pauvreté. Les entreprises multinationales peuvent profiter de la concurrence fiscale pour minimiser leurs contributions fiscales dans les pays où elles réalisent leurs profits, privant ainsi ces pays des ressources nécessaires pour leur croissance.

2.3. L’incitation à des pratiques fiscales non transparentes

La concurrence fiscale internationale encourage parfois des pratiques fiscales opaques et non transparentes. Les régimes fiscaux complexes et les pratiques d'optimisation fiscale sophistiquées rendent difficile la compréhension pour les gouvernements et les citoyens des mécanismes réels de la fiscalité des multinationales. Cela contribue à l'opacité du système fiscal global et nuit à la capacité des autorités fiscales à garantir que les entreprises paient leur juste part d'impôts.

III. Les efforts internationaux pour réguler la concurrence fiscale

3.1. L’OCDE et les initiatives pour une meilleure coopération fiscale

L’OCDE, en tant qu’organisation internationale d’élaboration de politiques économiques, a été un acteur clé dans la lutte contre la concurrence fiscale agressive. En 2013, l’OCDE a lancé l'Action Plan on Base Erosion and Profit Shifting (BEPS), un ensemble de recommandations visant à lutter contre l'érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices. L’initiative BEPS cherche à mettre en place des règles fiscales plus transparentes et à renforcer la coopération internationale pour éviter que les entreprises multinationales ne profitent des différences de régimes fiscaux entre pays.

L’OCDE a également travaillé sur la mise en place d’un mécanisme d’échange automatique d’informations fiscales entre les autorités fiscales nationales pour lutter contre la fraude et les pratiques fiscales non transparentes. Ces efforts visent à garantir que les entreprises paient des impôts dans les pays où elles génèrent réellement des bénéfices, plutôt que dans des juridictions à faible imposition.

3.2. L’UE et l’harmonisation fiscale

L’Union européenne a également pris des mesures pour limiter les effets de la concurrence fiscale interne. Des initiatives comme le Code de conduite en matière de fiscalité des entreprises visent à réduire les pratiques fiscales dommageables entre les États membres. Par ailleurs, l’UE a adopté des directives sur la transparence fiscale et la lutte contre l’évasion fiscale. Cependant, l’harmonisation fiscale complète au sein de l’UE reste un objectif difficile à atteindre, notamment en raison des divergences d’intérêts fiscaux entre les États membres.

3.3. La réforme de l’impôt mondial : la taxation du numérique

L’un des défis récents dans la régulation de la concurrence fiscale concerne la taxation des entreprises numériques, telles que les géants du secteur technologique. Ces entreprises réalisent souvent des profits considérables dans de multiples juridictions sans y être suffisamment taxées. En réponse, des initiatives telles que la proposition de l’OCDE pour un impôt mondial minimum et la taxation des services numériques ont vu le jour. En 2021, plus de 130 pays ont adhéré à un accord historique visant à instaurer un impôt minimum mondial sur les sociétés, dans le but de réduire les incitations à la concurrence fiscale agressive et d’assurer une taxation plus équitable des grandes entreprises. 

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