PRINCIPE DE LA REPARATION INTEGRALE DU PREJUDICE

Publié le 08/11/2016 Vu 2 479 fois 0
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Arrêt de la Deuxième Chambre civile, 14 avril 2016 ( N° de pourvoi: 15-16625 15-22147 - Recueil Dalloz du 28 avril 2016) L’assureur débiteur de la dette indemnitaire doit, en vertu du principe de réparation intégrale, indemniser la victime de l’ensemble des dépenses nécessaires à l’aménagement du logement de cette dernière, quand bien même cela impliquerait l’achat d’un logement.

Arrêt de la Deuxième Chambre civile, 14 avril 2016 ( N° de pourvoi: 15-16625 15-22147 - Recueil Dalloz du

PRINCIPE DE LA REPARATION INTEGRALE DU PREJUDICE

Deuxième Chambre civile, 14 avril 2016 ( N° de pourvoi: 15-16625 15-22147 -  Recueil Dalloz du 28 avril 2016)

"Qu’ayant constaté que M. Z..., qui n’était pas propriétaire de son logement avant l’accident, avait d’abord été hébergé chez ses parents dont le logement avait dû être aménagé pour le recevoir, puis, une fois son état consolidé, avait acheté une maison adaptée à son handicap, la cour d’appel, qui n’avait pas à procéder à la recherche visée à la première branche, en a exactement déduit que l’assureur devait le garantir de l’intégralité des dépenses occasionnées par cet aménagement puis par cet achat ; " 

*   *   *

Monsieur David X, âgé de 26 ans, a été victime d'un accident de la circulation dans lequel il était gravement blessé, le laissant paraplégique.

A sa sortie du centre de rééducation, il était contraint de rejoindre le domicile de ses parents, ayant dû être totalement aménagé au handicap de leur fils.

Une fois consolidé (lien hyperteste), Monsieur David X faisait ensuite l'acquisition d'une maison adaptée à son handicap.

Monsieur X décidait donc d'assigner son assureur en exécution de contrat d'assurance, comportant notamment une garantie conducteur.

Il demandait réparation intégrale de son préjudice, et notamment des frais de logement adapté, à savoir non seulement l'achat de sa maison, mais également remboursement des aménagements réalisés par ses parents à leur domicile.

En effet, la réparation intégrale du préjudice lié aux frais de logement adapté prévu au contrat commandait que l’assureur prenne en charge les dépenses nécessaires pour permettre à la victime de bénéficier d’un habitat adapté à son handicap.

C'est pourquoi, la Juridiction de première instance faisait droit à l'intégralité de demandes de Monsieur X relatives à ce poste de préjudice.

L'assureur de Monsieur X interjetait appel de cette décision, et contestait le remboursement des frais d'aménagement du logement de ses parents, estimant qu'il n'avait pas d'intérêt à agir (lien hypertexte), les frais ayant été pris en charge par ces derniers.

Elle refusait en outre d'assumer en totalité le coût de l'achat d'un nouveau logement considérant que l'acquisition du logement ne devient un préjudice réparable que lorsqu'il est démontré que l'ancienne habitation n'est pas appropriée et ne peut être aménagée, et que la voie de l'acquisition a été imposée à la victime compte-tenu de l'ampleur des aménagements.

La compagnie d'assurances considérait qu'il était nécessaire de déterminer ce qui est en relation directe avec le handicap et qui est strictement nécessaire au regard du handicap.

La Cour d'Appel de PAU dans son Arrêt du 9 mars 2015 confirmait la jugement de première instance et décidait que :

"L'indemnisation allouée à la victime doit réparer l'entier préjudice subi résultant directement du handicap.

En particulier, les frais de logement adapté concernent les frais que doit débourser la victime directe à la suite du dommage pour adapter son logement à son handicap et bénéficier ainsi d'un habitat en adéquation avec ce handicap.

Ce poste de préjudice comprend non seulement l'aménagement du domicile préexistant, mais éventuellement celui découlant de l'acquisition d'un domicile mieux adapté prenant en compte le surcoût financier engendré par cette acquisition, lorsqu'il apparaît que le handicap rend nécessaires des aménagements incompatibles avec le caractère provisoire d'une location.

Pour apprécier ce préjudice, il convient de tenir compte non seulement du degré de handicap de la victime mais également de sa situation personnelle, des caractéristiques du logement et de la nécessité au regard des conséquences de l'accident d'engager les frais litigieux.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur X a été contraint de venir s'installer chez sa mère à sa sortie du centre de rééducation alors qu'avant l'accident il avait son propre logement.

C'est bien son état de santé résultant des séquelles de l'accident qui a imposé cette situation, puisque l'expert a estimé qu'il a subi un déficit fonctionnel total jusqu'en mai 2012.

L'aménagement de la maison des parents de Monsieur X a donc été rendu nécessaire par la prise en charge adaptée de son handicap et à ce titre, les frais d'aménagement du logement de ses parents constituent bien un préjudice personnel directement imputable à l'accident.

Ces frais, en relation directe avec le handicap de Monsieur X, seront mis à la charge de l'assurance.

Même si Monsieur X a, dans un premier temps, pour des raisons de commodité évidentes, pris la décision de venir vivre chez sa mère avec sa fille âgée de quelques mois, rien ne justifie de lui imposer de prolonger cette cohabitation et il paraît, bien au contraire, légitime qu'il puisse désormais, une fois son état consolidé, bénéficier d'un logement autonome.

La nature de son handicap puisqu'il est paraplégique et la particularité de sa situation familiale, puisqu'il assume seul l'éducation de sa fille âgée aujourd'hui de 4 ans, justifient l'achat du bien immobilier situé en face de chez ses parents.

En effet, cette acquisition était une opportunité qu'il ne pouvait laisser passer dans la mesure où, située à proximité immédiate, ce logement lui permet de bénéficier ponctuellement de l'aide de sa mère pour palier aux difficultés pratiques qu'il doit affronter quotidiennement non seulement pour lui-même mais surtout pour prendre en charge sa fille et ce, au-delà du besoin en tierce personne évalué par l'expert.

En effet, les conséquences physiques de cet accident le contraignent à faire un choix de vie à proximité immédiate de membres de sa famille, susceptibles de prendre en charge l'enfant pour le cas où il ne pourrait le faire lui-même sans inconvénient grave pour sa santé et pour l'équilibre de cet enfant.

Dès lors, les frais d'acquisition et d'aménagement de cette maison qui sont en relation directe avec l'accident doivent être mis à la charge de l'assureur indépendamment de toute notion de placement immobilier ou d'économies réalisées sur des frais de location."

L'assurance formait pourtant un pourvoi en cassation, invoquant les moyens suivants :

" 1/que l'indemnisation allouée à la victime doit réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; que les frais d'aménagement d'un logement adapté au handicap constituent un préjudice propre de la victime, excluant de ce fait toute prétention indemnitaire de la victime pour des frais engagés par des tiers pour l'aménagement de leur logement en vue de l'y l'accueillir ; 

2/que l'indemnisation allouée à la victime doit réparer le préjudice subi sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit ; que l'acquisition en pleine propriété d'un logement financé par l'assureur de l'auteur de l'accident constitue un enrichissement patrimonial, qui va au-delà de la réparation du préjudice subi."

La Deuxième Chambre de la Cour de Cassation dans son arrêt du 14 avril 2016 rejetait ces moyens, en décidant que :

"Mais attendu que la réparation intégrale du préjudice lié aux frais de logement adapté prévue au contrat d'assurance commande que l'assureur prenne en charge les dépenses nécessaires pour permettre à la victime de bénéficier d'un habitat adapté à son handicap ;

Qu'ayant constaté que Monsieur X..., qui n'était pas propriétaire de son logement avant l'accident, avait d'abord été hébergé chez ses parents dont le logement avait dû être aménagé pour le recevoir, puis, une fois son état consolidé, avait acheté une maison adaptée à son handicap, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche visée à la première branche, en a exactement déduit que l'assureur devait le garantir de l'intégralité des dépenses occasionnées par cet aménagement puis par cet achat "

CONCLUSIONS

Cet arrêt précise et affirme ainsi que l’assureur débiteur de la dette indemnitaire doit, en vertu du principe de réparation intégrale, indemniser la victime de l’ensemble des dépenses nécessaires à l’aménagement du logement de cette dernière, quand bien même cela impliquerait l’achat d’un logement.

Dans le même sens - Deuxième chambre civile, 5 février 2015 (n° de pourvoi : 14-16015)

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