Bien que disposé à l’article 1185 du Code Civil, le terme n’y est défini qu’à contrario, suscitant ainsi certaines difficultés pratiques pour le distinguer de la condition.
L’arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de cassation en date du 13/12/1994 contribue à propos de cette appréhension à donner une définition précise de ce que sont le terme et la condition en tant qu’ils constituent la modalité d’une obligation, c'est-à-dire sa manière d’être.
Monsieur Z. avait acquis avec l’aide financière de Mme Y. une sculpture.
Il avait souhaité la vendre en 1988 au Musée national d’art moderne, mais Mme Y. s’estimant propriétaire indivise s'était opposée à la vente.
Une transaction était intervenue en date du 18/01/89 dont les termes prévoyaient en échange de l’absence de toute action en revendication de Mme Y. sur l’œuvre, la vente par Monsieur X. de la sculpture au musée intéressé et le paiement à Mme Y. le surlendemain du prix versé à Mr Z. de la somme de 100000 de francs.
Le Musée méfiant a refusé cet achat et Mr Z. l’a alors vendu en 1991 à un autre musée sans verser la somme convenue à Mme Y.
Un appel est interjeté, la Cour d’appel de Paris, en date du 02/10/92 accueille favorablement la demande de Mme Y. en déclarant valable l’engagement contracté par Monsieur Z.
Mr Z. forme un pourvoi en cassation au motif que l’engagement pris par Monsieur Z serait formé sur une condition potestative.
Saisie de cette contestation, la Cour de cassation était interrogée sur le fait de savoir comment distinguer le terme incertain de la condition potestative ?
Apportant une réponse, la Cour suprême rejette le pourvoi formé par Monsieur Z. au motif qu’il ressortait de l’analyse souveraine des juges du fond que Monsieur Z s’était engagé à vendre l’œuvre et que seul le terme de cette obligation était incertain.
De ces faits simples et de cette motivation lapidaire, la Cour de cassation détermine la distinction à opérer entre le terme et la condition comme modalités d’une obligation (I) et entre le terme incertain et la condition potestative (II)
I – La nécessaire détermination du terme et de la condition comme modalité des obligations
Le terme et la condition sont tous deux des évènements futurs qui proviennent de la même source (A), mais ils se différencient cependant quant à la certitude de la survenue de l’évènement auquel les parties sont attachées (B)
A – Un événement futur
Le terme présente un élément commun avec la condition dans la mesure où il est nécessairement un évènement futur, ce qui permet de distinguer par ailleurs l’engagement ferme ou l’absence de cet engagement, car en l’espèce, l’obligation serait déjà formée.
Or, l’existence de cette échéance diffère soit l’exigibilité de l’obligation (terme suspensif) ou la réalisation de cette obligation (condition suspensive).
Il provient de la même source, il appartient ainsi aux parties par convention de stipuler une manière d’être de l’obligation en y ajoutant un terme ou une condition, sans quoi cette dernière est pure et simple et devra être exécutée immédiatement.
Néanmoins, la certitude de la survenance de l’évènement est fondamentale pour distinguer le terme de la condition, bien que parfois, la notion de terme incertain puisse prêtre à confusion avec la définition de la condition
B – Dont la certitude de la survenance est l’élément fondamental de leur distinction
Le terme et la condition se différencient par la notion de certitude, ainsi la jurisprudence estime que le terme est un évènement futur et certain auquel est subordonné l’exigibilité ou l’extinction d’une obligation, mais que, dès lors que l’évènement est incertain quant à sa date et quant à sa réalisation, il s’agit d’une condition « Cass.Civ.13/04/99 ».
Il existe cependant un terme incertain dont la date pour être certaine est pourtant indéterminée (la mort), or l’incertitude d’un tel terme affecte seulement le moment de sa réalisation et non son principe « Cas du prêt sans échéance, Cass.Civ.1. 19/01/83 ».
Ainsi, si le terme est incertain, Monsieur Z. doit verser le montant prévu à Mme Y. car la vente au Musée MNAM n’est pas décisif pour les parties, il n’est pas érigé en condition potestative, c'est-à-dire qu’il ne profite pas uniquement au propriétaire de la statue, on est en l’espèce certain que Monsieur Z. vendra quel que soit le musée qui souhaitera acquérir, mais seul le délai est indéterminé.
Or, la difficulté dans cette affaire était justement de distinguer entre la notion de terme incertain et de condition potestative (II).
II – Distinction entre le terme incertain et la condition potestative
Le terme incertain et la condition potestative présentent un intérêt pratique pour les parties (A), avec des conséquences diamétralement opposées (B)
A – Un intérêt pratique pour les parties
Définie à l’article 1170 du Code Civil, la condition potestative est celle qui fait dépendre l’exécution de la convention d’un évènement qu’il est au pouvoir de l’une ou l’autre des parties contractantes de faire arriver ou d’empêcher.
On comprend en l’espèce l’enjeu du pourvoi de Monsieur Z. car si l’obligation est potestative, elle est réputée conclue à son seul bénéfice, il peut alors décider d’être ou non engagé auprès de Mme Z.
S’il accepte un prix supérieur à 1 million de francs lors de la vente de l’œuvre, il intéresse Mme Y, dans le cas contraire, s’il décide de la vendre moins chère que sa valeur, il n’est pas contraint de verser la somme correspondante à l’autre partie.
Alors que présenter la vente comme étant pourvue d’une modalité constituée par un terme incertain, choix qu’a effectué tant al Cour d’appel de Paris en accueillant la demande de Mme Y. que la Cour de cassation en rejetant le pourvoi de Monsieur Z. permet dans tous les cas d’intéresser Mme Y. à la vente de l’œuvre, quelque soit le délai de celle-ci et son prix.
Un tout autre choix aurait eu cependant des conséquences radicalement différentes.
B – Avec des conséquences diamétralement opposées
Si la Cour de cassation avait cassé l’arrêt de la Cour d’appel et reconnue cet évènement futur et incertain comme une condition potestative, Mme Y. aurait pu demander la nullité de la transaction sur le fondement de l’article 1174 du Code Civil, car une condition purement potestative qui n’engage le débiteur qu’en fonction de sa volonté est nulle de plein droit « Cass.Com.09/12/80 », la transaction aurait été rétroactivement inefficace et Mme Y aurait pu fort opportunément choisir la voie de l’action en revendication à l’encontre de Mr Z.
L’intérêt de cet arrêt est donc de nous éclairer sur la difficile appréciation d’un évènement futur dont la certitude est subordonnée à un élément qui conditionne sa réalisation ou qui le retarde dans le temps toute ne sachant que son caractère est inéluctable.