En matière civile, la solidarité ne se présume pas, elle trouve sa source soit dans une disposition légale, soit dans une stipulation conventionnelle, tel que l’article 220 du Code Civil qui dispose que les époux seront solidairement responsables des contrats passés pour l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants.
Ainsi, l’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation en date du 04/06/09, contribue à qualifier les cotisations d’assurance vieillesse afin de savoir si ces dernières doivent ou non entrer dans un champ de solidarité légal.
Mr et Mme Y s’étaient mariés en 1995, Mr X, médecin, décédé en 2003 payaient ses cotisations d’assurance vieillesse à la CARMF, or en l’espèce, ces dernières n’avaient pas été honorées pour la période allant de 1995 à 2001.
L’organisme a dès lors assigné Mme Y en paiement de l’arriéré de ces cotisations restant dû.
La Cour d’appel de Nîmes, en son arrêt rendu le 18/04/06, accueille favorablement la demande de la CARMF et condamne Mme Y une somme arrêtée au 31/01/06 et majorée d’intérêts de retard.
Saisie d’un pourvoi, la Cour de cassation était interrogée sur le fait de savoir si l’article 220 du Code civil disposant de la solidarité entre époux devait être étendu à toute dette, même non contractuelle, dès lors qu’elle avait pour objet, l’entretien et l’éducation des enfants ?
Apportant une réponse, la Cour suprême, rejette le pourvoi formé par Mme Y aux motifs que les cotisations dues par un époux au titre d’un régime légal obligatoire d’assurance vieillesse a pour objet de permettre au titulaire d'assurer après la cessation de son activité professionnelle, l’entretien du ménage et l’éducation des enfants.
De ces faits simples et de cette motivation lapidaire, la Cour en déduit que le principe de solidarité est le fruit d’une disposition légale (I), et qu’il s’étend sous réserve de l’application du texte à toutes dettes quelque soient leur nature (II)
I – Le principe de solidarité est le fruit d’une disposition légale
La solidarité ne se présume pas en matière civile mais elle doit être le fruit d’une disposition légale ou conventionnelle (A), il revient cependant au créancier de prouver que la dette contractée tombe sous le coup de la solidarité (B)
A – Le principe d’absence de présomption de solidarité en matière civile
La solidarité passive est le fait par lequel l’acte accompli par l’une quelconque des parties à un rapport d’obligation à un effet sur l’ensemble des autres débiteurs.
L’article 1202 du Code Civil dispose que la solidarité ne se présume point, mais que cette règle cesse dans les cas ou la solidarité a lieu de plein droit, en vertu d’une disposition de la loi.
Ainsi, la lecture de l’article 220 du Code Civil, les époux sont considérés comme solidairement responsables des dettes contractées pour l’entretien du ménage ou pour l’éducation des enfants, la jurisprudence a par ailleurs interprété cette disposition comme étant le fruit d’une obligation et non d’une contribution à la dette « Lyon, 27/06/00 », ce qui signifie que le créancier peut demander la condamnation de l’un quelconque des époux et pour autant bénéficier du principe de la solidarité de ces derniers à son égard.
La solidarité passive a ainsi pour effet principal de permettre au créancier de demander le paiement de la totalité de la dette à l’un quelconque des débiteurs, et ces derniers sont tenus pour le montant total de la créance indépendamment de leur part dans la dette.
La charge de la preuve incombe néanmoins au créancier qui doit pouvoir se prévaloir d’une disposition légale à l’appui de sa demande.
B - La dette contractée doit tomber sous le coup de la solidarité
La position défendue par Mme Y, visait à démontrer que le créancier n’était pas légitime à lui réclamer ces sommes au titre de la solidarité de l’article 220 du Code Civil, car il aurait fallut qu’il rapporte la preuve que la pension versée à Mme Y assure son l’entretien du ménage monoparental par le versement d’une pension de réversion.
Or, en l’espèce, la charge de la preuve en matière de solidarité pèse sur le créancier et non sur Mme Y.
Cependant, en cette matière, la position de la jurisprudence n’a guère évolué et il avait été jugé que la Cour d’appel saisie de la créance relative à des cotisations d’assurance viellesse faisait une exacte interprétation de l’article 220 du Code Civil « Cass.1ère .09/10/91 » en décidant que les ex-époux étaient solidairement responsables des dettes contractées au cours du mariage.
La Cour de cassation dans son arrêt du 04/06/09 réitère ainsi une position constante et confirme l’application de ce texte aux dettes de nature non contractuelle.
II – Confirmation de l’extension de l’application de ce texte aux dettes non contractuelles
La jurisprudence de la Cour confirme ses interprétations antérieures (A) refusant de distinguer entre l’entretien actuel et futur du ménage (B)
A – Confirmation des jurisprudences antérieures de la Cour
Dans un arrêt du 07/06/89, la 1ère Civ avait décidé que l’article 220 du Code Civil trouvait à s’appliquer à toute dette y compris celle qui n’était pas de nature contractuelle dès lors qu’elle avait pour objet l’entretien du ménage ou l’éducation des enfants, sous réserve cependant que celle-ci ne soit pas manifestement excessive.
B- Le refus de la Cour de distinguer une temporalité dans l’entretien du ménage
Afin de déterminer l’application de ce texte, la Cour établit qu’il est de droit de reconnaître la solidarité de l’époux survivant quant à la dette envers un organisme légal d’assurance vieillesse dès lors que le versement dû à cet organisme avait pour objet de permettre à Mme Y de bénéficier d’une pension de réversion et donc de permette à Mme Y de subvenir au besoin du ménage, sans qu’il soit besoin d’établir une temporalité quant à la prise en charge de ce besoins