RAPPEL DES FAITS
Entre juillet 2017 et novembre 2017, Madame B. a été démarchée par une plateforme frauduleuse d’investissements sur le marché des diamants avec d’une part, la promesse de gains importants et d’autre part, une rentabilité rapide et certaine de son investissement.
Depuis son compte bancaire ouvert auprès du Crédit Agricole, Madame B. a émis, à la demande de la plateforme frauduleuse, 6 virements pour un montant total de 50 270,19 euros vers des comptes domiciliés à l’étranger.
Très rapidement, la plateforme frauduleuse est devenue injoignable et Madame B. n’a jamais pu récupérer ses fonds. A ce titre, Madame B. a déposé une plainte pour escroquerie et blanchiment en bande organisée contre la plateforme frauduleuse.
Dans ces circonstances et estimant que sa banque, le Crédit Agricole, n’avait pas respecté son devoir de vigilance à l’égard des nombreuses anomalies apparentes affectant son compte bancaire, Madame B. a assigné le Crédit Agricole afin d’obtenir réparation de son préjudice financier.
MOTIVATION DU JUGEMENT
1) Le banquier, dans le cadre de ses obligations contractuelles, est tenu d'un devoir de vigilance
Le Tribunal judiciaire de La Rochelle a, avant toute chose, rappelé la teneur exacte du devoir de vigilance auquel est soumis tout établissement bancaire, dont le Crédit Agricole.
En effet, les juges ont rappelé que le devoir de vigilance constitue une véritable exception au principe de non-immixtion (non-ingérence) du banquier et qu’il trouve à s’appliquer en présence d’anomalies apparentes manifestes :
"Le principe de non-ingérence, ou principe de non- immixtion impose aux établissements bancaires de ne pas intervenir dans les affaires de leurs clients. Toutefois, par exception à ce principe, le banquier est tenu à un devoir de vigilance ou de prudence, qui lui impose de procéder à des vérifications pour détecter les anomalies et irrégularités manifestes et de mettre en garde son client sur les risques encourus"
2) Sur le fonctionnement anormal et inhabituel du compte bancaire de Madame B.
Les juges ont énuméré plusieurs anomalies intellectuelles apparentes qui affectaient le compte bancaire de Madame B. :
- Première anomalie intellectuelle : les montants des virements qui étaient parfaitement inhabituels par rapport au fonctionnement normal et habituel du compte bancaire. Les juges, tout en s’appuyant sur un graphique élaboré par le cabinet Colman Avocats, ont en effet déclaré que l’analyse du fonctionnement du compte bancaire de Madame B. « ne comportent pas de virements d’un montant comparable aux virements litigieux » ;
- Deuxième anomalie intellectuelle : les destinations des virements (« sociétés basées à l’étranger avec lesquelles Madame B. n’entretenait pas de relations particulières ») ;
- Troisième anomalie intellectuelle : la présence de la plateforme frauduleuse sur la liste noire de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) antérieurement à l’exécution des virements de Madame B par le Crédit Agricole ;
- Quatrième anomalie intellectuelle : la fréquence d’exécution des virements.
Au regard de ces anomalies apparentes, le Tribunal judiciaire de La Rochelle a déclaré que le Crédit Agricole était tenu d’un devoir de vigilance envers sa cliente.
CONDAMNATION DU CREDIT AGRICOLE A REPARER LE PREJUDICE FINANCIER SUBI PAR SA CLIENTE A HAUTEUR DE 60%
Au regard de ces manquements, les juges ont suivi les demandes formulées par le cabinet Colman Avocats et ont déclaré que la banque, en l’espèce le Crédit Agricole, n’avait à aucun moment alerté sa cliente :
"(La banque), sur laquelle repose la charge de la preuve, ne produit aucun élément démontrant qu’elle a questionné Madame B. sur les opérations effectuées, dont le caractère anormal était apparente et qu’elle l’a alertée du risque d’escroquerie, de sorte qu’il est établi qu’elle a manqué à ses obligations contractuelles."
Le Crédit Agricole a ainsi été condamné à verser à sa cliente une somme représentant 60% du préjudice financier.
Décision commentée : TJ La Rochelle, 6 décembre 2022, n°22/00309
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Me Céline CHAPMAN / Me Gaël COLLIN
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