Les chauffeurs UBER sont-ils désormais des salariés ?

Publié le Modifié le 05/03/2020 Vu 3 761 fois 0
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Dans une décision très attendue rendue ce 4 mars 2020, la Cour de cassation vient de trancher un débat juridique sur le travail des chauffeurs Uber dans un litige qui concernait un ancien travailleur de la société « Uber Bv ».

Dans une décision très attendue rendue ce 4 mars 2020, la Cour de cassation vient de trancher un débat juri

Les chauffeurs UBER sont-ils désormais des salariés ?

Dans une décision très attendue rendue ce 4 mars 2020 (Cass. soc.4 mars 2020, n°19-13.316), la Cour de cassation vient de trancher un débat juridique sur le travail des chauffeurs Uber dans un litige qui concernait un ancien travailleur de la société « Uber Bv ». Ce travailleur n’était pas un indépendant mais en fait un véritable salarié.

 

A la lecture de cet arrêt, on pourrait être tenté d’y voir une décision révolutionnaire, tant le phénomène d’ « uberisation » a souvent été présenté comme un phénomène nouveau, doté de ses propres règles.

 

On peut surtout y lire que la Cour de cassation n’est pas dupe des apparences et en revient toujours à la réalité : qui dit subordination dit salariat. Et peu importe que ce salarié soit déguisé en auto-entrepreneur joyeux et moderne qui surferait en toute liberté sur une plateforme numérique.

 

Que dit concrètement cet arrêt ?

 

L’arrêt rappelle, sans surprise, que ce n’est pas parce qu’on a un statut d’indépendant qu’on l’est réellement. Dès lors que l’on est sous l’autorité d’une société qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution, et de sanctionner les manquements du travailleur, alors il s’agit bien d’un contrat de travail. Concrètement, s’agissant du chauffeur Uber, le fait qu’entre autres choses, il n’ait aucune clientèle propre au travers de la plateforme, qu’il ne fixe pas librement ses tarifs, que l’itinéraire soit imposé (Uber ayant la possibilité de modifier le tarif à la baisse en cas d’itinéraire considéré comme inefficace), qu’il puisse se voir désactiver ou restreindre son accès selon la volonté de la société... sont des éléments caractérisant ce contrat de travail.

 

Que change cette décision de la Cour de cassation ?

 

Elle change beaucoup de choses. Pour rappel, la Cour de cassation est la plus haute juridiction française de l’ordre judiciaire, ce qui donne à ses décisions une portée bien plus large que celle du cercle des parties aux litiges. Par un mimétisme judiciaire bien connu sous le nom de jurisprudence, l’ensemble des juridictions française devraient être amenées à s’aligner sur cette décision pour toutes les situations de travail similaires, et donc notamment pour les autres chauffeurs « Uber ». Cette décision aidera aussi tous les travailleurs des plateformes du même type - qu’elles concernent les VTC ou d’autres domaines - à faire valoir leurs droits.

 

Les chauffeurs Uber deviennent-il automatiquement tous des salariés à partir d’aujourd’hui ?

 

A vrai dire, il ne tiendrait qu’à la société Uber de s’y résoudre, mais ce n’est manifestement pas ce qu’elle a décidé au vu de ses premières déclarations. Pas conséquent, la seule solution pour un chauffeur Uber d’obtenir la requalification de son contrat d’indépendant en contrat de travail est de saisir le Conseil de prud’hommes, sachant que cet arrêt rendu par la Cour de cassation favorisera grandement une issue positive pour ces travailleurs.

 

Quel est l’intérêt de la requalification en contrat de travail ?

 

L’intérêt de la requalification est très important, car le chauffeur dont le contrat aura été requalifié en contrat de travail bénéficiera de l’ensemble des protections du droit travail. Pendant la relation de travail c’est, par exemple, le droit de bénéficier de congés payés, de toucher les indemnités prévues par la convention collective (en l’occurrence la convention collective des transports), de voir sa santé et sa sécurité protégée par l’entreprise... A l’occasion de la rupture du contrat par l’entreprise, c’est pouvoir toucher notamment une indemnité de licenciement, ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et après la rupture, c’est pouvoir prétendre aux allocations chômage.

 

 

Nicolas CHARAGEAT

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