Les délits de presse (sauf exception des infractions de publication à motivation raciste ou sectaire) se prescrivent par trois mois révolus en application de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881.
La partie civile devra donc veiller à interrompre cette prescription, en manifestant, au minimum tous les trois mois, son intention de poursuivre la procédure.
Ce délai de prescription extrêmement court, peut toutefois être suspendu en application du principe « contra non valentem agere non currit prescriptio » : la prescription ne court pas contre celui qui ne peut valablement agir.
En effet, dans certaines hypothèses, la jurisprudence prend en compte un événement qui, faisant obstacle aux poursuites, a pour effet d’arrêter provisoirement le cours de la prescription.
Cet empêchement entravant l'exercice de l'action publique, qu'il soit strictement juridique ou un simple fait matériel, doit nécessairement revêtir un caractère absolu et insurmontable : il doit s'agir, non pas de simples difficultés, mais bien d'un « empêchement absolu, infranchissable, étranger à la volonté du ministère public ou du plaignant » (F. Ehrhard, La suspension de la prescription de l'action publique : Rev. sc. crim. 1937, p. 640).
La jurisprudence permet, dès lors, à la partie civile d'invoquer la suspension de la prescription, lorsque celle-ci se trouve dépourvue de tout moyen juridique susceptible d'empêcher l'accomplissement de la prescription.
A titre d’illustration, l'existence d'une « erreur de procédure non imputable aux parties civiles », rendant impossible « tout accès effectif au dossier » (Cass. crim., 17 déc. 2013, n° 12-86.393 : JurisData n° 2013-029907) ou encore l'absence de communication à la partie civile des réquisitions du Parquet (Cass. crim., 19 nov. 2013, n° 12-86.062 : JurisData n° 2013-026190) justifient la suspension de la courte prescription de l’article 65.
Que se passe-t’il pendant la période dite de délibéré : entre l’audience des plaidoiries et le prononcé du jugement ?
La période de délibéré des tribunaux est typiquement un laps de temps au cours duquel les parties ne peuvent plus signifier d’actes de poursuite : l’audience des plaidoiries a eu lieu, les débats sont clos et le Tribunal doit délibérer au vu des arguments échangés au cours de l’audience des débats.
Il parait donc logique que la jurisprudence considère que la prescription de l’action se trouve suspendue pendant la durée du délibéré.
S’agissant des actions en diffamation devant les juridictions répressives, la Cour avait récemment eu l'occasion de préciser que la prescription se trouvait suspendue pendant la durée du délibéré (Cass. crim., 22 oct. 2013, n° 12-84.408 ).
C’est ce que vient de confirmer, s’agissant des procédures devant les juridictions répressives, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation dans un arrêt du 17 février 2015.
« Il résulte [des articles 8 du Code de Procédure Pénale et 65 de la loi du 29 juillet 1881] que si l’action publique résultant d’une infraction prévue par la loi du 29 juillet 1881 se prescrit après trois mois révolus à compter du jour où l’infraction a été commise, ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite s’il en a été fait, la prescription est interrompue par l’audience à laquelle ont lieu les débats, et suspendue pendant la durée du délibéré, les parties poursuivantes étant alors dans l’impossibilité d’accomplir un tel acte de procédure avant le prononcé du jugement ». (Cass. Crim. 17 février 2015, n°13-88.129)
Le délai de prescription de trois mois recommencera à courir à compter du prononcé de la décision du Tribunal Correctionnel …