Droit de la presse et droit des nouvelles technologies : Notions générales

Publié le Modifié le 13/10/2014 Vu 2 120 fois 0
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Définitions de termes juridiques et explications sur des notions de base en matière de droit de la presse et droit des nouvelles technologies.

Définitions de termes juridiques et explications sur des notions de base en matière de droit de la presse et

Droit de la presse et droit des nouvelles technologies : Notions générales

1) L’e-réputation

Origines :

De l’anglais « e » (electronic) et du latin « reputatio » (« considération »), l’e-réputation représente l’image que les internautes se font d’une personne physique ou morale, en fonction des informations, propos, opinions, photos, véhiculés sur Internet. L’image et la notoriété de cette personne se dégagent ainsi de ce que les internautes diffuseront, aussi bien sur des sites Internet que des blogs, forums, et réseaux sociaux.

Problèmes et enjeux juridiques relatifs à l’e-réputation :

Comment protéger notre réputation sur le net ? Les informations que l’on trouve sur Internet sont la plupart du temps positives ou neutres. Toutefois, les difficultés surviennent  lorsque celles-ci deviennent négatives, malveillantes et qu’elles portent atteinte à notre réputation ou à celle d’un tiers.

Ce concept d’e-réputation ou Web-réputation est apparu avec l’arrivée du Web 2.0. De nos jours, la protection de nos données personnelles sur la Toile ou les propos nous concernant sont en effet souvent mis à mal par la prolifération croissante des informations circulant  sur  le  net. Notre réputation devient ainsi publique, mondiale, et même souvent imprescriptible.

Avec les réseaux sociaux, les blogs et le Web 2.0, Internet est devenu le lieu de tous les avis, commentaires, images, concernant chacun d’entre nous. Il est aujourd’hui difficile d’effacer les traces qu’on y laisse. Ces  interfaces qui permettent aux internautes d’échanger, de s’exprimer, peuvent ainsi parfois nous porter préjudice en diffusant une image de nous qui peut déplaire.

Il est donc important de gérer notre e-réputation.

2) La Diffamation

Définition :

Selon l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881, est considérée comme diffamatoire «Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la  personne ou du corps auquel le fait est imputé (…)». La diffamation représente ainsi le fait d’entacher la  réputation d’une personne par des paroles, des écrits ou des gestes.

Eléments constitutifs de la diffamation :

Pour être qualifiés de diffamatoire, les propos doivent  remplir certaines conditions. Tout d’abord, le fait  imputé doit être précis et déterminé. Le fait dont la victime est accusée peut ainsi faire l’objet d’un débat probatoire, contradictoire et peut être prouvé. Le propos doit quant à lui, porter atteinte à l’honneur ou à la considération de celui ou de ceux qu’il vise. L’appréciation de l’atteinte à l’honneur de la victime doit être effectuée de manière objective, c’est à dire sans tenir compte de la subjectivité de la victime. Enfin, le propos doit viser une personne ou une collectivité identifiée ou identifiable. Ainsi, même désignée sous un pseudonyme ou surnom, une personne physique peut faire l’objet  de propos diffamatoires, dès lors qu’elle reste identifiable.

La vigilance s’impose :

Attention donc aux critiques et opinions que l’on pourrait  partager sur la Toile, surtout sous l’effet  de  la colère ! Qui n’a jamais été tenté de déblatérer sur le Net, un avis peu favorable sur  une personne/société que l’on n’affectionne peu ?

Délais et prescriptions :

La diffamation publique est réputée commise le jour où l’écrit  est  porté à  la connaissance du public et mis à sa disposition. Dès lors, le délai de prescription de trois  mois commence à courir. Ainsi, si vous vous sentez diffamé, agissez avant qu’il ne soit trop tard !

A noter toutefois que l’auteur des propos « diffamatoires » pourra soulever deux moyens afin  de tenter de se disculper : Il pourra tout d’abord essayer de démontrer la véracité des propos tenus en soulevant l’exception de  vérité. En second lieu, il pourra tenter de démontrer sa bonne foi. Encore faut-il apporter la preuve de la vérité des faits mais également celle de la légitimité du commentaire qui interprète le fait diffamatoire…tâche pour le moins difficile.

3) L’injure

Définition :

Selon l’article 29 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, constitue une injure « Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait (...) » L’injure est ainsi une parole, écrite ou orale, qui offense et attaque verbalement ou par écrit un individu, un corps ou une institution.  A l’inverse de la diffamation, l’injure ne repose sur aucun fait. Impossible donc de démontrer la véracité des  propos  injurieux allégués.

L’injure publique est constituée de quatre éléments : L’individu portant les propos injurieux doit  viser une ou des personnes clairement déterminées. Elle doit également avoir une intention coupable en les portant. Elle doit rendre les propos publics, d’une manière ou d’une autre (forums, réseaux sociaux, écrits…) Et enfin, l’injure doit être constituée de propos injurieux ou outrageants.

Vigilance et moyen soulevé :

Attention, l’injure peut rapidement être constituée, pour peu que l’on perde son sang  froid ! Sous l’effet  de la colère, personne n’est à l’abri d’insultes dépassant souvent ses pensées. Faites donc attention  à ce que vous dites et écrivez, si vous ne voulez pas que cela se retourne contre vous. Un moyen peut tout de même être soulevé pour tenter de disculper la personne qui a tenu des  propos injurieux, il s’agit de l’excuse de provocation. La jurisprudence reconnaît et définit en effet  la  notion de provocation comme un « fait accompli volontairement par la personne injuriée, de nature à expliquer l’injure ». Toutefois, cette excuse peut être prise en considération seulement lorsque celui qui a  proféré l’injure est encore sous le coup de l’émotion. Cette qualification relève donc de l’appréciation souveraine des juges.

Délai de prescription :

L’article 65 de la loi de 1881 mentionne un délai de prescription de trois mois à compter de la mise à disposition publique de l’injure. Ne tardez donc pas  à agir si vous vous sentez offensé par des propos injurieux !

4) Diffamation/ Injure : action au civil ou au pénal ?

La diffamation et l’injure sont évoquées aussi bien dans le Code pénal que dans la loi du 29 juillet 1881. Deux actions, au civil et au pénal, sont ainsi possibles selon la qualification précise du délit en question.

En ce qui concerne l’injure : Au civil, l’action devra porter sur une injure publique. Ce type d’injure est évoqué à l’article 29 de la loi de 1881.L’injure non publique quant à elle, est visée par l’article R621-2 du Code pénal et constitue une contravention de 1ère classe soumise à une amende de 38 euros.

Concernant la diffamation : Au civil, l’action devra porter sur la diffamation publique évoquée à l’article 29 de la loi de 1881. La diffamation non publique quant à elle, est visée à l’article R621-1du Code pénal et constitue une contravention de 1ère classe. 

5) La particularité des délits de presse 

Historique de la loi du 29 juillet 1881 :

La loi du 29 juillet 1881 sur le droit de la presse est une loi emblématique dans le monde de la presse et des médias et est le texte juridique fondateur en matière de liberté de la presse. Elle constitue le fruit d’un compromis entre  la  liberté d’information et  la protection des droits des personnes. La Déclaration des droits de l’homme de 1789 et la Convention européenne des droits de l’homme protègent également cette liberté de presse, respectivement aux articles 11 et 10. Ainsi, si cette loi pose à son article 1er, le principe de liberté selon lequel « l’imprimerie et la librairie sont  libres », elle confère toutefois un certain nombre de dispositions limitant cette liberté  (article 23 et suivants).

L’évolution de la loi à travers le temps :

Si cette loi a relativement bien su s’adapter à la radio (1933), et au cinéma (1934), qu’en est-t-il de son adaptation à l’Internet d’aujourd’hui ? Bien qu’une certaine protection juridique existe, la sensation d’irresponsabilité sur internet demeure ressentie par beaucoup d’internautes. Nombreux sont ceux qui pressentent en effet, un problème de pertinence du droit de la presse appliqué à Internet. Avec l’émergence des  webmagazines, blogs et autres outils de communications numériques, il ne s’agit plus vraiment d’une loi sur la liberté de la presse mais plutôt d’une loi sur la liberté d’expression publique qui s’applique à tous les médias. A l’origine, le législateur visait évidemment les modes d’expression existants, à savoir le  média  écrit  et la parole proférée en public, mais avec l’arrivée des nouveaux modes de communication,  la  loi sur  la presse a dû intégrer tous les moyens d’expression publics apparus depuis ces dernières années, tels que la presse écrite, l’audiovisuel, et depuis peu Internet. Heureusement d’autres textes de lois comme la loi de 1982 ou la LCEN de 2004 sont  venus compléter cette loi en matière audiovisuelle et numérique.

Les délits de presse :

Plusieurs délits de presse peuvent ainsi être invoqués à l’aide de cette loi. Le délit de presse est une infraction qui peut se définir comme l’expression d’une pensée ou d’une opinion, commise par  voie de la presse sur des réseaux sociaux, forums communautaires ou autre plateforme numérique. La  loi peut ainsi sanctionner les abus de la liberté d’expression. Mais aujourd’hui, le délit de presse ne porte-t-il pas mal son nom ? A l’heure où les médias recourent à des canaux de communications audio-visuels et  numériques et où l’on peut sanctionner les propos diffamatoires d’internautes sur des forums, le terme « délit de presse » n’est-il pas désormais inapproprié ?

Le délai pour agir :

Au risque de déplaire aux victimes de délits de presse,  le délai pour agir mentionné à l’article 65 de la loi de 1881 est de trois mois à compter de la mise à disposition publique du délit. Ainsi, si vous êtes confronté à un tel délit, agissez rapidement avant que le bref délai de prescription ne s’éteigne ! Cette loi qui ne cesse d’évoluer dans ce contexte de Web 2.0,  n’a ainsi pas fini de voir son étendue et sa portée varier au fil des années…

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A propos de l'auteur
Blog de E-Reputation et droit

Avocat fondateur de Dalet-Venot Avocats, avec plus de 15 années d'expérience, je suis passionnée par le droit de la presse et des médias, qui est l'un de mes domaines d'intervention.

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