Le droit au respect de la vie privée est consacré par l’article 9 du Code Civil.
Relèvent ainsi notamment du domaine de la vie privée protégée des éléments tels que la vie affective, l’intimité corporelle, l’adresse ou l’image d’une personne.
Toutefois, le droit au respect de la vie privée n’est pas absolu. Une atteinte à ce droit peut, classiquement, être autorisée lorsqu’une publication porte sur un événement public, d'actualité ou encore sur un débat d'intérêt général et lorsqu’il existe une relation directe entre cet événement ou ce débat et la personne atteinte dans sa vie privée.
La Cour de Cassation a ainsi rappelé que "le principe de la liberté de la presse implique le libre choix des illustrations d'un débat général de phénomène de société" (Cass. 2è civ., 4 nov. 2004, n°03-15.397) ou encore qu’une « personne ne peut s'opposer à la réalisation et à la divulgation de son image chaque fois que le public a un intérêt légitime à être informé » (Cass. 2e civ., 30 juin 2004, n° 02-19.599).
La Cour de Cassation suit d’ailleurs la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, laquelle rappelle régulièrement que "la presse joue un rôle essentiel dans une société démocratique : si elle ne doit pas franchir certaines limites, notamment quant à la réputation et aux droits d'autrui, il lui incombe néanmoins de communiquer, dans le respect de ses devoirs et de ses responsabilités, des informations et des idées sur toutes les questions d'intérêt général" (CEDH, 24 févr. 1997, De haes et Gijsels c/ Belgique, § 37)
C’est donc la finalité de la publication au regard de l’intérêt général qui va justifier, ou non, une possible atteinte à la vie privée.
Par ailleurs, la nécessité de l'atteinte à la vie privée par la liberté d'expression dépend du lien direct entre l'objet de la publication et, par exemple, le débat d’intérêt général ; jusqu’à présent, chaque élément d’une publication portant sur des faits relevant de la vie privée devait être pertinent. (Cass. 1re civ., 12 juillet 2005, n°04-11.732)
Dans un récent arrêt, la Cour Européenne des Droits de l’Homme était allée plus loin en décidant que « vérifier qu’une publication portant sur la vie privée d’autrui ne tend pas uniquement à satisfaire la curiosité d’un certain lectorat mais constitue également une information d’importance générale, [nécessite d’] apprécier la totalité de la publication et rechercher si celle-ci, prise dans son ensemble et au regard du contexte dans lequel elle s’inscrit se rapporte à une question d’intérêt général.» (CEDH, 10 nov. 2015, Couderc et Hachette Filipacchi/France, n°40454/07, § 102) http://hudoc.echr.coe.int/eng?i=001-158855
S’alignant sur la CEDH, c’est aujourd’hui ce que vient également de décider la Cour de Cassation. https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000034141644&fastReqId=255701442&fastPos=1
Dans cette affaire, un magazine hebdomadaire avait consacré un article à la parution d’un ouvrage relatif à un important scandale financier français. Après avoir décortiqué les mécanismes frauduleux ayant conduit à la ruine de nombreux actionnaires, l’article indiquait que ce « stratagème avait été soufflé à Mr Z , par Mme A (…) avec laquelle il vivait et qu’il avait ultérieurement épousée, après avoir lui-même divorcé ».
Après maintes péripéties judiciaires, la Cour d’Appel de Versailles avait considéré que ces allégations ne constituaient pas une violation répréhensible de la vie privée de Mr Z.
Devant la Cour de Cassation, Mr Z reprochait à la Cour d’Appel de ne pas avoir expliqué « en quoi la révélation par l'article incriminé, non pas de l'existence même de la relation ayant existé entre M. Z...et Mme A..., mais celle de son remariage avec Mme A..., remariage qui en réalité n'a jamais eu lieu, présentait un intérêt général de nature à éclairer le public sur les mécanismes et les responsabilités de la malversation financière dénoncée et à légitimer ces informations ».
La Cour de cassation, faisant sien le raisonnement de la CEDH a toutefois rejeté ce pourvoi et a retenu, à cet effet « si la relation existant entre M. Z...et Mme A... relève, par nature, de leur vie privée, l'évocation des liens personnels unissant les protagonistes de l'opération de rachat de la société Albright & Wilson se trouve justifiée par la nécessaire information du public au sujet des motivations et comportements de dirigeants de sociétés commerciales impliquées dans une affaire financière ayant abouti à la spoliation de l'épargne publique et paraissant avoir agi en contradiction avec la loi ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la publication litigieuse, prise dans son ensemble et au regard du contexte dans lequel elle s'inscrivait, se rapportait à une question d'intérêt général ».
La notion de débat d'intérêt général voit ainsi sa portée nettement renforcée...