Tribune-Afrique :1-Avec la multiplication ces derniers jours des crimes de sang, beaucoup de Sénégalais réclament un retour de l'application de la peine de mort. Quelles conditions doivent être réunies pour une application de cette peine aujourd'hui disparue des sanctions pénales?
Maitre EH.Mame GNING : Au Sénégal, seuls deux condamnés à mort ont été exécutés depuis l'accession à l'indépendance en 1960. Ces exécutions, par les armes, remontent à 1967 : Abdou Faye avait été reconnu coupable du meurtre d'un député savoir Demba DIOP. Et le second, Moustapha Lô avait été reconnu coupable d'une tentative d'assassinat du chef de l’État (Léopold Sedar Senghor, qui a rejeté les deux demandes en grâce).
En juillet 2004, le Conseil des Ministres du Sénégal a examiné et adopté à l'unanimité un projet de loi portant abolition de la peine de mort. Ce texte est ensuite adopté par l'Assemblée nationale le 10 décembre 2004.Les quatre condamnés à mort (dont trois ont été condamnés en 2004) verront leur peine commuée.
Le rétablissement de la peine de mort au Sénégal relève formellement de l’initiative du Gouvernement du Sénégal par un projet de loi, d’un député ou d’un groupe de députés à l’Assemblée nationale, à travers une proposition de loi. Le projet ou la proposition de loi est soumis au vote de l’Assemblée Nationale.
Tribune-Afrique :2- Au vu de la signature par le Sénégal des conventions internationales, le retour de la peine de mort est-il envisageable?
Maitre EH.Mame GNING : La question mérite d’être posée. Notre réponse est négative, si l’on sait que le Sénégal a ratifié de nombreuses conventions internationales parmi lesquelles : la Convention internationale relative aux droits de l'enfant ratifiée en Juillet 1990(CF Art 37),le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié en Février 1978(CF Art.6&7),le Protocole Facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques ratifié en Février 1978 et last but not the least, la convention internationale contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ratifiée le 21 Aout 1986(Art.16).
Tous ces instruments susvisés contiennent des engagements internationaux précis en matière de peine de mort souscrits par le Gouvernement du Sénégal qui a une obligation de mise en œuvre. L’Etat doit respecter et faire respecter ses engagements internationaux.
Tribune-Afrique :3- Un référendum peut-il permettre un retour de la peine de mort?
Maitre EH.Mame GNING : Le Président de la République, s’il le souhaite peut également soumettre un projet de loi sur la question du rétablissement de la peine de mort au referendum, sur proposition du premier ministre, après avis du Président de l’Assemblée Nationale et du Conseil Constitutionnel. Il s’ensuit que, le referendum pourrait juridiquement constituer une porte d’entrée, pour le retour de la peine de mort au Sénégal(en cas de besoin politique).