La crise de l’immobilier et le casse-tête du logement demeurent une réalité difficile à contourner par les pouvoirs publics. Mais la difficulté de trouver un logement devrait-elle contraindre le locataire à demeurer dans des logements indécents ?
La réponse se trouve dans les dispositions de la loi Solidarité et Renouvellement Urbains du 13 décembre 2000 et le décret 2002/120 du 30 janvier 2002. Il s’agit du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains.
Une tendance à l’équilibre des prestations entre propriétaire et locataire se dénote dans la notion de « décence » du logement imposée par la loi.
Si le locataire a l’obligation de payer le loyer, le bailleur en contrepartie se doit de fournir et d’assurer un logement décent au locataire. Qu’est-ce qu’un logement décent ? C’est l’article 1 du décret précité qui définit le « logement décent comme un logement qui répond aux caractéristiques définies par le présent décret ». Plusieurs dispositions protectrices sont en faveur du locataire. Il s’agit d’une part des obligations imposées au bailleur, liées à la sécurité physique et sanitaire des locataires, de la surface habitable et d’autre part des éléments d’équipement et de confort. Le locataire dispose de moyens juridiques de faire sanctionner tout manquement à ces obligations, ce que confirme la jurisprudence en cette matière.
I- Obligations du propriétaire en matière de logement
Le propriétaire ne doit pas se contenter d’offrir d’un logement, mais encore devrait-il s’assurer que son bien immobilier respecte les normes de décence liées à la surface habitable, à la sécurité physique et sanitaire des locataires, (A) et d’autre part dispose des éléments d’équipements et de confort (B).
A- Surface habitable, sécurité physique et sanitaire des locataires
Primo, il n’est pas possible pour un propriétaire de fournir un logement de surface habitable de moins de 9 mètres carrés. C’est l’alinéa 1 de l’article 4 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002. Le logement doit disposer d’au moins d'une pièce principale ayant soit une surface habitable au moins égale à 9 mètres carrés et une hauteur sous plafond au moins égale à 2,20 mètres, soit un volume habitable au moins égal à 20 mètres cubes. L’alinéa 2 du même article précise le mode de calcul ou de vérification de cette surface habitable. « La surface habitable et le volume habitable sont déterminés conformément aux dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article R. 111-2 du code de la construction et de l'habitation ». Il faut le rappeler, le non-respect de la surface habitable peut empêcher le locataire de bénéficier des allocations logement.
Secondo, pour satisfaire aux caractéristiques de décence, le logement doit répondre aux normes suivantes de sécurité et sanitaire des locataires aux termes de l’article 2 dudit décret :
1. Il assure le clos et le couvert. Le gros oeuvre du logement et de ses accès est en bon état d'entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d'eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d'eau dans l'habitation. Pour les logements situés dans les départements d'outre-mer, il peut être tenu compte, pour l'appréciation des conditions relatives à la protection contre les infiltrations d'eau, des conditions climatiques spécifiques à ces départements ;
2. Les dispositifs de retenue des personnes, dans le logement et ses accès, tels que garde-corps des fenêtres, escaliers, loggias et balcons, sont dans un état conforme à leur usage ;
3. La nature et l'état de conservation et d'entretien des matériaux de construction, des canalisations et des revêtements du logement ne présentent pas de risques manifestes pour la santé et la sécurité physique des locataires ;
4. Les réseaux et branchements d'électricité et de gaz et les équipements de chauffage et de production d'eau chaude sont conformes aux normes de sécurité définies par les lois et règlements et sont en bon état d'usage et de fonctionnement ;
5. Les dispositifs d'ouverture et de ventilation des logements permettent un renouvellement de l'air adapté aux besoins d'une occupation normale du logement et au fonctionnement des équipements ;
6. Les pièces principales, au sens du troisième alinéa de l'article R. 111-1 du code de la construction et de l'habitation, bénéficient d'un éclairement naturel suffisant et d'un ouvrant donnant à l'air libre ou sur un volume vitré donnant à l'air libre.
B- Les normes en matière d’équipement et de confort
Une surface habitable ? Oui mais encore faudrait-il équiper convenablement l’appartement ou le studio.
Le logement doit comporter les éléments d'équipement et de confort définis par l’article 3 dudit décret :
1. Une installation permettant un chauffage normal, munie des dispositifs d'alimentation en énergie et d'évacuation des produits de combustion et adaptée aux caractéristiques du logement. Pour les logements situés dans les départements d'outre-mer, il peut ne pas être fait application de ces dispositions lorsque les conditions climatiques le justifient ;
2. Une installation d'alimentation en eau potable assurant à l'intérieur du logement la distribution avec une pression et un débit suffisants pour l'utilisation normale de ses locataires ;
3. Des installations d'évacuation des eaux ménagères et des eaux-vannes empêchant le refoulement des odeurs et des effluents et munies de siphon ;
4. Une cuisine ou un coin cuisine aménagé de manière à recevoir un appareil de cuisson et comprenant un évier raccordé à une installation d'alimentation en eau chaude et froide et à une installation d'évacuation des eaux usées ;
5. Une installation sanitaire intérieure au logement comprenant un w.-c., séparé de la cuisine et de la pièce où sont pris les repas, et un équipement pour la toilette corporelle, comportant une baignoire ou une douche, aménagé de manière à garantir l'intimité personnelle, alimenté en eau chaude et froide et muni d'une évacuation des eaux usées. L'installation sanitaire d'un logement d'une seule pièce peut être limitée à un w.-c. extérieur au logement à condition que ce w.-c. soit situé dans le même bâtiment et facilement accessible ;
6. Un réseau électrique permettant l'éclairage suffisant de toutes les pièces et des accès ainsi que le fonctionnement des appareils ménagers courants indispensables à la vie quotidienne.
Dans les logements situés dans les départements d'outre-mer, les dispositions relatives à l'alimentation en eau chaude prévues aux 4 et 5 ci-dessus ne sont pas applicables.
La force de la loi étant la sanction juridique qui l’accompagne, le locataire peut faire constater et sanctionner au cas échéant les manquements aux obligations par son bailleur.
II- La défense du locataire en cas de logement indécent
Tout locataire qui se serait retrouvé dans un logement indécent dispose des moyens de recours. Il s’agit dans la normalité de demander une mise en conformité à son propriétaire ou de résilier le bail. Face au refus de ce dernier de s’exécuter, saisir le juge du tribunal d’instance.
A- Demande de mise en conformité ou résiliation du bail
Il s’agit d’une mesure normale qui voudrait que le locataire puisse d’abord s’adresser à son propriétaire et exiger une mise en conformité sans délai du logement. En effet, la menace de saisir le juge peut amener un propriétaire à s’exécuter sans délai. La peur du gendarme est le commencement de la sagesse dit-on.
La commission départementale de conciliation peut être saisie, mais à titre purement facultatif avant d’exercer un recours contentieux. Il s’agit d’une forme de règlement amiable, les deux parties (bailleur et locataire y gagnent en temps et en frais) face aux procédures lourdes et longues de la justice.
Le locataire peut aussi résilier de plein droit le bail si aucune faute n’est à sa charge
Il existe des propriétaires manifestement de mauvaise foi. Dans ce cas, la seule possibilité qui s’offre au locataire est la saisine du juge.
B- La saisine du juge
Le juge peut faire droit à la demande d’un locataire qui habite dans un logement indécent par plusieurs mesures suivant le cas d’espèce. Le juge peut contraindre le bailleur à réaliser les travaux nécessaires sans délai, il peut aussi imposer une réduction du loyer ou encore fixer des dommages et intérêts surtout en cas de résiliation du bail par la faute du propriétaire.
La jurisprudence est persuasive à ce sujet et nous permet de déceler plusieurs décisions d’accueil favorable de la demande du locataire : Cour d'appel de PARIS du 8 octobre 2009, CA NIMES, 21 janvier 2010, RG n°09/01281, JurisData n°2010-007430, CA LYON, 6 septembre 2005, RG n°04/02016, JurisData n°2005-283956. Il existe des certitudes mais aussi des incertitudes.
Enfin la jurisprudence permet au locataire en cas de logement indécent, de quitter de plein droit le logement sans respecter le délai de préavis de départ. Toutefois, le locataire doit faire la preuve du caractère indécent insalubrité du logement.
Dans l’arrêt de la Cour d’appel de Versaille du 3 mai 2011, la Cour a constaté que le logement présentait plusieurs désordres d’humidité, ne permettant pas au locataire d’en jouir convenablement. Aussi qu’après plusieurs courriers envoyés au bailleur, celui-ci ne s’est pas exécuté. De ce fait, la Cour a considéré que le locataire était dispensé du respect de 03 mois de préavis avant de quitter de plein droit le logement.
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