Par Nabil FADLI, avocat au barreau de Paris, avocat.fadli@juris-cession.com
Vous avez été informé d’un projet de licenciement économique dans votre entreprise ? Peut-être, êtes-vous d’ores et déjà licencié suite à la suppression de votre poste ? Vous vous posez des questions sur les circonstances dans lesquels il est légalement possible de recourir au licenciement économique ?
Quelle que soit votre situation, il est encore temps d’agir pour s’assurer que vos droits sont respectés.
La crise économique est un thème omniprésent dans l’actualité politique et sociale de ces dernières années. Peu de secteurs semblent épargnés et on constate que même ceux qui le sont, restent dans l’expectative pessimiste d’une sortie de crise.
Dans ce climat morose, il est une réalité que de nombreuses sociétés souffrent de réelles difficultés qui les contraignent parfois à se séparer d’un certain nombre de leurs salariés.
En marge de cette réalité, certains employeurs recours de façon systématique à des licenciements dits économiques comme s’il s’agissait d’un remède miracle à leurs difficultés même s’il s’agit plutôt d’un placébo pour calmer l’anxiété des marchés financiers.
Pire encore, d’autres employeurs peu scrupuleux n’hésitent pas à profiter de la situation pour tenter de justifier des licenciements abusifs en les déguisant en licenciements économiques.
Pour déjouer les plans de ces employeurs opportunistes, les conseillers prudhommaux, les juges des chambres sociales des Cour d’Appel et la Cour de Cassation, n’ont de cesse de préciser la jurisprudence en la matière.
Le code du travail quant à lui retient une définition du licenciement économique qui encadre les possibilités de recours à cette extrémité.
Ainsi constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ou la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité.
Comme tout licenciement, le licenciement pour motif économique doit être motivé et justifié par une cause réelle et sérieuse.
NB : L’analyse du déroulement de la procédure de licenciement économique, de l’ordre des licenciements, de l’obligation de reclassement, etc., ne seront pas abordés dans cet article. L’analyse de ces autres points permet de révéler des fautes de l’employeur de nature à invalider le licenciement économique et à le faire requalifier de licenciement sans cause réelle et sérieuse. C’est la raison pour laquelle nous consacrerons à ces notions plusieurs articles spécifiques.
- La nécessaire pour l’empoyeur de prouver de réelles difficultés économiques
C’est à l’employeur de démontrer la réalité des difficultés économiques censées justifier le licenciement.
A ce propos, les juges sont très attentifs à la manière dont le courrier de licenciement est rédigé.
Le recours à des formules types se bornant à mentionner une baisse d’activité n’est pas suffisant.
De jurisprudence constante, en soi, la seule diminution du chiffre d’affaires ou des bénéfices ne suffit pas à établir la réalité des difficultés économiques.
Qui plus est, de nombreuses décisions précisent que ce sont les résultats de l’ensemble de l’entreprise qui doivent être pris en compte pour déterminer si les conditions du licenciement pour motif économique étaient réunies au moment où la décision a été prise.
En effet, de nombreux employeurs tentent de déformer la réalité de leur situation économique en arguant de la baisse d’activité ou de chiffre d’affaire d’un domaine de leur activité sans faire état de l’ensemble. Ce saucissonnage de circonstance doit être dénoncé.
Pour être retenue, la perte de clientèle doit être durable et toucher à des clients dits « structurants » pour la pérennité de l’activité.
La jurisprudence est allée encore plus loin en exigeant que, lorsque la société appartient à un groupe, l’existence de difficultés économiques doit s’apprécier au niveau du groupe dans son ensemble.
Pour s’opposer à l’existence de réelles difficultés économiques, le salarié doit user de tous les moyens de preuve à sa disposition.
Il est souvent nécessaire de mener une véritable enquête visant à rassembler les éléments comptables de la société (bilans, rapport de gestion, rapport du commissaire au compte), les communiqués ou déclaration publiques faites par l’entreprise et ses dirigeants, ainsi que tous autres éléments permettant de contredire la version des faits présentée par l’employeur.
- La sauvegarde de la compétitivité de l’entreprise
La charge de la preuve incombe là encore à l’employeur.
Il doit être en mesure de faire état de circonstances particulières et nouvelles justifiant de ce que la compétitivité de l’entreprise est en péril.
L’employeur doit être en mesure d’établir l’existence de menaces réelles et concrètes pesant sur la compétitivité de l’entreprise comme l’arrivée d’un nouveau concurrent majeur sur le marché par exemple.
En tout état de cause, même à supposer établie cette menace sur la compétitivité de l’entreprise, la société doit pouvoir justifier en quoi est ce que le licenciement du salarié permet d’y palier.
- La mutation technologique
Il s’agit des cas de licenciements rendus inévitables et nécessaires du fait d’une évolution majeure dans les méthodes de production qui passe par la modernisation des outils de travail.
Dans de telles circonstances, lorsque les mutations technologiques sont importantes et rapides, l’employeur a l’obligation de mettre en place un plan d’adaptation au bénéfice des salariés.
Les contestations relatives au licenciement économiques peuvent faire l’objet d’une tentative de conciliation avec votre employeur et à défaut d’accord être soumise au Conseil de Prud’hommes.
Nous nous tenons prêt à vous accompagner et à défendre vos droits à chaque étape de la procédure.
Sources législatives et règlementaires :
- Articles L. 1233-1 à L. 1233-4, L. 1233-25, L. 1236-1 et L 2323-14 du Code du travail
- Loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail (JO du 26)