LE FONDS DE COMMERCE SUR LE DOMAINE PUBLIC
Quelle définition simple donne-t-on de ces deux notions (A)
Quelles conditions s’appliquent à la reconnaissance du fonds de commerce sur le domaine public (B)
A- DEFINITIONS :
Fonds de commerce : Le fonds de commerce est une notion juridique utilisée en matière commerciale et faisant référence à un ensemble d'éléments corporels (stocks de marchandises, matériel...) et incorporels (clientèle, réputation, droit au bail, achalandage...) constitués en vue de faire fonctionner une activité professionnelle, une activité commerciale.
Domaine public : les biens (meubles et immeubles) appartenant à une personne publique et qui sont :
- soit affectés à l'usage direct du public ;
- soit affectés à un service public pourvu qu'en ce cas ils fassent l'objet d'un aménagement indispensable à l'exécution des missions de ce service public.
Exemple : Les gares, les ports, les places publiques, les marchés etc…
Durant longtemps les notions même de fonds de commerce et de domaine public étaient ou plutôt paraissaient parfaitement inconciliables.
Pour quelles raisons ?
Car, pour exercer une activité commerciale il faut une autorisation de la personne publique et cette autorisation est précaire, révocable et personnelle car la personne publique peut la résilier à tout moment, elle ne peut pas être cédée et elle ne peut être délivrée qu’à une seule personne.
Au contraire, en droit privé le fonds de commerce lui est cessible et appartient à l’occupant.
Donc, jusqu’en 2014, les commerçant installés sur le domaine public ne pouvaient pas être propriétaire d’un fonds de commerce. Ils pouvaient exercer leur activité mais ne pouvaient pas bénéficier des effets juridiques attachés au fonds de commerce : notamment la plus importante la clientèle.
Concrètement cela voulait dire quoi :
- pour s’installer sur le domaine public, prenons l’exemple d’un vendeur de sandwich dans la gare Saint-Jean.
Le commerçant doit y être autorisé par la personne publique.
En contrepartie de cette autorisation : le commerçant va verser une redevance à la personne publique.
Avant 2014, donc, si la personne publique résiliait l’autorisation pour un motif d’intérêt général il n’y avait aucune indemnisation de l’occupant pour la perte de son fonds de commerce.
Il pouvait seulement prétendre à l’indemnisation de la perte de bénéfices.
Depuis la loi PINEL en 2014, l'article L. 2124-32-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose qu’« un fonds de commerce peut être exploité sur le domaine public sous réserve de l'existence d'une clientèle propre ».
Quels en sont alors les conditions ?
B- CONDITIONS :
1- il faut une activité commerciale.
2- Il faut une autorisation délivrée par la personne publique selon 2 moyens :
L’autorisation peut être unilatérale ou contractuelle, comme le prévoit l’article R. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques qui dispose que :
· « L’autorisation d’occupation ou d’utilisation du domaine public peut être consentie, à titre précaire et révocable, par la voie d’une décision unilatérale ou convention ».
· Seuls les commerçants titulaires d’un emplacement fixe pourront se prévaloir des dispositions de la loi PINEL.
3- Le commerçant devra disposer d’une clientèle propre.
Par conséquent il y a nécessité pour lui d'apporter la preuve de l'existence d'une clientèle propre (en cela, l'article L. 2124-32-1 se borne à rappeler une exigence ordinaire du droit commercial).
L'occupant ne pourra donc pas prétendre à la constitution d'un fonds de commerce s'il ne possède pas une clientèle autonome.
Celle-ci est constituée par l'ensemble des personnes se fournissant chez un commerçant ou recourant à ses services.
La question, classique devant les juridictions judiciaires (habituées à l'exercice d'une appréciation factuelle), consiste à savoir précisément à partir de quand une telle clientèle voit le jour et « disparaît ».
Autrement dit, la clientèle ne saurait se confondre avec les usagers du domaine public.
Cette distinction essentielle sera très discriminante dans la constitution du fonds de commerce car pour qu'il y ait clientèle propre, il faudra que les clients du commerçant ne passent sur le domaine public uniquement parce qu'ils souhaitent se rendre chez lui.
S'ils vont s'y fournir en tant qu'usagers du domaine public - c'est-à-dire parce que leur intention originelle et principale consiste à utiliser le domaine public ou à profiter du service public auquel celui-ci est affecté -, ils ne sauraient être considérés comme faisant partie de la clientèle propre du commerçant (puisqu'ils se rattachent en quelque sorte au domaine public et non à une clientèle commerciale distincte).
Les juridictions saisies se forgeront leur conviction en fonction d'éléments de fait, à titre d'illustration :
· Si la clientèle du commerçant continue à exister alors qu'il n'est plus implanté sur le domaine public, ce sera une clientèle propre ;
· De même, si le commerce demeure accessible à la clientèle alors que la dépendance domaniale d'implantation est momentanément fermée au public.
· Il faudra, entre autres, examiner les accès du commerce et déterminer si celui-ci est « divisible » ou « dissociable » du domaine public.
· Et le commerçant devra bénéficier d'une autonomie de gestion vis-à-vis du gestionnaire du domaine public afin de pouvoir faire reconnaître sa propre clientèle. Cette exigence exclura sans doute de nombreux commerces du bénéfice des dispositions de l'article L. 2124-32-1 du CGPPP (comme ceux situés dans les gares, les aéroports ou les parcs publics clos, sans accès propre). En revanche, il ne devrait pas y avoir de difficulté pour faire reconnaître la clientèle des commerçants des halles et marchés.
Cette analyse, qui devra être conduite pour les commerçants occupant le domaine public, correspond à celle qui se rencontre en droit commercial à propos des « commerces inclus », s'agissant de l'exploitation des entreprises commerciales situées dans l'enceinte d'autres entreprises (dans les supermarchés par exemple).