La gestion préventive des risques dans les collectivités territoriales est généralement précédée d'un "porter à connaissance" préfectoral.
Le porter à connaissance est lié aux documents d’urbanisme que sont les schémas de cohérence territoriale et les plans locaux d’urbanisme. Le Code de l'urbanisme précise que l’Etat a l’obligation de porter à la connaissance des communes ou de leurs groupements compétents les informations nécessaires à l’exercice de leurs compétences en matière d’urbanisme. Le même Code a conféré un caractère continu au porter à connaissance pendant la période d’élaboration des documents d’urbanisme.
Par extension, le terme « porter à connaissance » est maintenant utilisé même en l’absence de procédure d’élaboration ou de révision d’un document d’urbanisme (SCOT ou PLU) lorsque le préfet informe officiellement le maire ou le président du groupement de communes compétent des risques dont il a connaissance et qui doivent être pris en compte dans les décisions d’urbanisme.
Il appartient aux maires des communes concernées d'appliquer l'article R. 111-2 du Code de l'urbanisme sur les secteurs présentant un nouveau risque.
Aux termes de cet article :
"Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations".
C’est à ce titre que les Collectivité invoquent parfois, à l'encontre de nouveaux projets d’urbanisme « le principe de précaution ».
Il s’agit en fait du « principe de prévention », constitutionnalisé dans l’article 3 de la Charte de l'environnement, et destiné à faire face aux risques avérés ou du moins probabilisables. Le Conseil constitutionnel a été saisi de plusieurs questions prioritaires de constitutionnalité (Q.P.C.) à propos de la validité de la prise en compte du principe dans les documents d'urbanismes. Le Conseil constitutionnel, comme le juge administratif, accorde une grande importance au principe de prévention, car cet article a constamment été jugé conforme à la Constitution, lorsque le Conseil constitutionnel avait par exemple à connaître de l’absence d'indemnisation des servitudes instituées en application du Code de l'urbanisme.
En ce qui concerne l’opposabilité des Porter à connaissance, il s’agit de mesures préparatoires, de simple information, n'ayant aucun caractère décisoire en soi. Cet acte ne peut être attaqué par la voie du recours pour excès de pouvoir, à l’occasion notamment du recours contre un refus de permis de construire.
Pour autant, la valeur juridique du document ne préjuge pas de l’opposabilité de son contenu. L’interprétation du juge jouera un rôle majeur dans l’appréciation des effets du Porter à connaissance. Il est intéressant de noter au regard de la jurisprudence, que le juge français tire des conséquences de plus en plus sévères des informations fournies par les études de risques.
En réalité, reconnaître des effets juridiques à un plan de prévention des risques au stade de son élaboration n'est pas exceptionnel. Le Conseil d’état a d'ailleurs confirmé cette pratique :
- Conseil d’état, Ministre de l'écologie et du développement durable contre compagnie Des sablières de la Seine, 10 avr. 2005, n° 260285.
Les P.P.R.I en cours d'élaboration peuvent donc être porteurs d'effets juridiques lorsqu’ils prouvent un risque direct, grave et certain. Cette interprétation permet de faire un parallèle avec le contenu des Porter à connaissance.
En tant que documents informatifs, dont l'opposabilité juridique n'est pas automatique, le juge administratif peut décider, au regard du contenu variable des P.A.C., de leur attribuer un poids juridique s’ils établissent la preuve d’un risque.
Un PPRI en cours d'élaboration peut donc être pris en compte pour apprécier le risque d'inondation et la légalité d'une autorisation de construire, notamment afin d'apprécier la portée de l’article R. 111-2 du Code de l’urbanisme.
Par exemple et dans la jurisprudence récente : un maire peut prendre en compte, à titre d'élément d'information, dans l'examen de la légalité de l'autorisation de construire, un PPRI en cours d'élaboration concernant le bassin-versant d’une rivière pour apprécier le risque inondation :
- CAA Marseille, 4 déc. 2009, n° 07MA03785.
Plus précisément, l’autorité administrative peut s'appuyer sur tous les éléments d'information dont elle dispose à la date à laquelle elle statue, et notamment sur les documents préparatoires à l'élaboration d'un PPR contre l'inondation, quand bien même celui-ci ne serait pas encore adopté et donc pas directement opposable. Les risques d'atteinte à la sécurité publique visés par ces dispositions sont aussi bien les risques auxquels peuvent être exposés les occupants de la construction pour laquelle le permis est sollicité que ceux que l'opération projetée peut engendrer pour des tiers :
- CAA Bordeaux, 5e ch., 12 juin 2012, n° 11BX01877
- CAA Bordeaux, 1re ch., 9 juill. 2015, n° 15BX00442.
- CAA Bordeaux, 4 févr. 2016, n° 14BX00525.
Au final, l’autorité administrative pourra légalement opposer un refus sur le fondement de l’article R. 111-2 du Code de l’urbanisme et des risques d’atteintes à la sécurité publique au regard des documents préparatoires d'un futur Plan de prévention des risques, en démontrant la probabilité de réalisation des risques et la gravité de leurs conséquences.