Décision n° 2011-116 QPC du 08 avril 2011
Le Conseil constitutionnel avait été saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 112-16 du code de la construction et de l'habitation.
En effet, ledit article interdit à une personne s'estimant victime d'un trouble anormal de voisinage d'engager, sur ce fondement, la responsabilité de l'auteur des nuisances dues à une activité agricole, industrielle, artisanale, commerciale ou aéronautique lorsque cette activité, antérieure à sa propre installation, a été créée et se poursuit dans le respect des dispositions législatives ou réglementaires en vigueur et, en particulier, de celles qui tendent à la préservation et à la protection de l'environnement.
En d'autres termes, toute personne s'étant installé après la création d'une activité agricole, industrielle,[...] ou aéronautique, ne peut sur le fondement du trouble anormal de voisinage invoquer la responsabilité de l'auteur du trouble, sous réserve que l'activité se poursuive dans le respect des lois et réglements.
Les requérants, pour appuyer leur prétention, considéraient qu'un tel article permettait l'éxonération, pour l'auteur desdites nuisances, de toute obligation de réparer le dommage causé par ces nuisances aux personnes installées après que l'activité dont il s'agit ait commencé à être exercée.
Et que cet article, donc, méconnaitrait les articles 1er à 4 de la Charte de l'environnement.
Le Conseil des Sages pour déclarer cet article conforme aux droits et libertés que la Constitution garantit, affirma que cette même disposition ne faisait pas obstacle à une action en responsabilité fondée sur la faute.
Dès lors, si elle empêche une action en responsabilité fondée sur le trouble anormal de voisinage, l'éxonération de l'article en question ne concerne que le trouble anormal de voisinage, et n'empêche nullement une action en responsabilité fondée sur la faute.
*Il est vrai que le trouble anormal de voisinage ne nécessite pas l'établissement d'une faute, et posséde donc un régime indépendant de cette notion de faute. Tout au contraire, la responsabilité de droit commun, elle, se base sur la faute.
Le Conseil précise d'ailleurs que la faculté d'agir en responsabilité met en œuvre cette exigence constitutionnelle, que le législateur peut aménager, pour un motif d'intérêt général, les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée ; qu'il peut ainsi apporter à ce principe des exclusions ou des limitations à condition qu'il n'en résulte une atteinte disproportionnée ni aux droits des victimes d'actes fautifs ni au droit à un recours juridictionnel effectif qui découle de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ;
Toujours est-il, que la personne victime d'une nuisance causé par une telle activité en conformité avec les lois et réglements et créée avant son installation, ne pourra pas engager la responsabilité de l'auteur sur le fondement du trouble anormal de voisinage, mais le pourra sur celui de la faute.