Il n'existe pas de définition juridique de ce support polymorphe. Toutefois, le TGI de Paris précise que le site, ensemble de données localisées à une adresse internet, est une « des facettes d’internet » [1]. Ce n’est pas un service en soi, mais éventuellement le support de celui-ci [2].
Par ailleurs, un site web est le plus souvent assimilé à un service de communication au public en ligne, ainsi défini par la loi pour la confiance dans l'économie numérique : “Toute transmission, sur demande individuelle, de données numériques n'ayant pas un caractère de correspondance privée, par un procédé de communication électronique permettant un échange réciproque d'informations entre l'émetteur et le récepteur” [3].
Tout un chacun peut se créer un site virtuel sur la toile, en veillant évidemment qu’il soit conforme à la réglementation [4].
Le nombre des sites ne cesse d’augmenter à une vitesse prodigieuse et les entreprises en sont les premières concernées pour promouvoir leurs produits et/ou services. Les sites n’ont d’efficacité que s’ils sont en permanence modifiés, de sorte qu’ils font l’objet d’une création continue. Ils représentent une valeur économique que des tiers ont donc tendance piller.
Les sites personnels qui se développent sont les « blogs ». Le « Journal Du Net » définit le blog comme un type de site Internet particulier qui peut être présenté comme une sorte de journal intime publié sur la Toile, et accessible aux internautes du monde entier. Il s'agit d'une version simplifiée d'un site internet, proposée clé en main aux internautes, et gérée techniquement par un éditeur.
De façon concrète, le blog permet donc à certains internautes, les blogueurs, de partager leurs avis, commentaires, humeurs, points de vue sur l'actualité, via la rédaction d'articles, la publication de photos, etc.
En outre, l'obligation de délivrance d'un produit complexe, tel que la mise en place d'un site internet, n'est pleinement exécutée qu'une fois réalisée la mise au point effective de la chose vendue. Cette mise au point se présente à cet égard comme une obligation connexe à la délivrance puisque sans laquelle le produit complexe ne peut fonctionner conformément à ce qui avait été convenu [5].
Aussi, l’obligation du client dans un contrat de création ou de développement d’un site nécessite au préalable la vérification du bon fonctionnement du site. Cette phase est essentielle pour éviter tout litige quant à la mise à disposition du site. C’est ce qu’a rappelé dans un jugement du 22 avril 2021, « le Tribunal judiciaire de Marseille sur l’obligation du client, qui commande à un prestataire le développement d’un site, de vérifier son bon fonctionnement en procédant à son recettage » [6].
Selon les faits, une société avait commandé à un prestataire le développement d’un site web de vente de piluliers et d’un jeu d’enchères. Ce dernier lui a livré un site actif et lui a demandé de payer le solde. Il s’avère que le jeu fonctionnait mais avec certaines difficultés. Alors que le client avait validé le site sans effectuer de tests, le prestataire a néanmoins continué de résoudre les problèmes qui ne rendait pas le site inutilisable.
Huit mois après la mise en ligne du site, le client l’a mis en demeure d’exécuter « entièrement et correctement » ses obligations. Le Tribunal a considéré qu’en vertu des conditions générales du prestataire, il appartenait cependant au client de vérifier le bon fonctionnement du site internet réalisé par le prestataire en procédant à son recettage et d’effectuer des tests, d’autant qu’il avait les accès administrateur. Disposant de ces codes, il avait de fait la responsabilité du fonctionnement du site.
I. Le développement d’un site internet invite à la participation active du client dans la conception de son site
La réception est souvent dite « recette ». C’est un acte juridique, déchargeant le fournisseur sauf pour les réserves, et faisant courir le délai contre les vices cachés [7]. Elle permettra aux parties de valider le bon fonctionnement du logiciel et éventuellement de permettre au prestataire de corriger les dysfonctionnements qui ont pu être décelés au cours de la phase test et à l’issu de cette phase test on passe à la phase recette car on se dit que les corrections ont été apportées. Autrement dit, il faut le tester et vérifier que tout est conforme à ce qui avait été prévu initialement.
Pour cela, le cahier des charges sera plus que nécessaire. La façon la plus commode et plus répandue d’expression des besoins dans ce domaine est la rédaction d’un cahier des charges. L'existence du cahier des charges est importante pour le prestataire qui se prémunit ainsi contre tout “excès” du client.
Le cahier des charges est rédigé, soit par l’entreprise elle-même qui désire s’informatiser ou modifier son installation ; soit l’œuvre, à sa demande, d’un conseil extérieur.
Par ailleurs, l'élaboration du cahier des charges peut, en particulier lorsque le client n'est pas spécialiste de l'informatique et ne dispose pas de service informatique en interne, faire l'objet d'une convention séparée afin que les besoins soient exprimés conformément aux règles de l'art.
Pour la Cour de cassation, « manque à son obligation de collaboration le client qui s'abstient de fournir au professionnel informatique « les spécificités de fonctionnement de son entreprise » se bornant à exprimer ses besoins sur la seule base de tableaux « Excel » pendant l'avant-vente. » [8]
L’absence de cahier des charges peut être la cause de la défaillance du système livré lorsque le fournisseur n’a pas pu réellement déterminer les besoins spécifiques du client. Mais, son manque n’exonère pas le prestataire lorsque le projet de s’engager en l’état, ou il lui incombait de suppléer son client.
A noter aussi, lorsque le client fait appel à un conseil extérieur pour la rédaction du cahier des charges, l'inadéquation du logiciel ou du développement d’un site à ses besoins peut conduire à une responsabilité in solidum du fournisseur du logiciel ou du développement d’un site spécifique et du professionnel ayant conçu et rédigé le cahier des charges. [9]
Le client se doit d'exprimer ses besoins et il n'est pas possible de reprocher au prestataire une inadéquation à des besoins qui n'ont pas été portés à sa connaissance par la rédaction d'un cahier des charges qui fait défaut. Ce cahier ne doit pas être en outre flou quant aux fonctionnalités et aux échéances.
Il peut être utilement complété par tout type de documentation : fichiers-types, modèles de documents, voire spécifications plus précises, description de l'architecture matérielle destinée à faire fonctionner le logiciel ou du développement d’un site … Le rédacteur du contrat songera ainsi à préciser quelles sont les informations dues par le client et attendues par le prestataire, qui lui permettent de prendre la mesure de sa propre obligation de conseil.
II. L’obligation du donneur d’ordre consiste au recettage de son site
Après avoir développé un site, celui-ci doit être testé sur différents terminaux, que ce soient un smartphone ou un ordinateur. Il faut également vérifier si des bugs surviennent sur les divers navigateurs. La tâche consiste, de plus, à examiner les autres points comme l’affichage des menus et la gestion des cas non passants. Les tests portent aussi sur les cohérences en matière de règles de gestion fonctionnelle, unitaire ou pour un test de bout en bout.
D’abord, l’obligation du concepteur du site est de résultat quant à la conformité du site et aux spécifications du client.
Ensuite, la conception ou la refonte d'un site internet exige la participation active du client, tenu de fournir au prestataire les informations sans lesquelles celui-ci ne peut mener à bien sa mission, ce dont il résulte que cette collaboration fait nécessairement partie du périmètre contractuel [10]. En effet, le client doit nécessairement procéder aux essais et aux tests de fonctionnement du site, avant son lancement, et vérifier notamment le fonctionnement des applets, des liens hypertexte, du renvoi du courrier, du téléchargement des documents, plus généralement à tout test nécessaire à l’utilisation des diverses composantes et parties du site.
La validation des résultats doit se faire donc dans un procès-verbal, pouvant comporter les réserves avant de passer à l’étape suivante. Elle évite par là même les difficultés sur la conformité du site, et sur le changement d’avis du donneur d’ordre.
La réalisation d’une série de tests permet s’il y a lieu d’apporter des corrections après que le client ait formulé des réserves quant au bon fonctionnement du site. La collaboration doit ainsi être parfaite entre le client et le prestataire de service par le mécanisme du recettage.
On rappelle que le recettage doit s’effectuer en deux étapes :
- La recette « provisoire », c’est-à-dire l’aptitude de la solution à fonctionner conformément aux spécifications du contrat conclu ;
- La recette « définitive », c’est-à-dire la confirmation de son bon fonctionnement en service régulier.
Le défaut de test empêche donc la remontée des « bugs » qui permettrait de l’améliorer dans la prochaine série de tests. Le test est l’application concrète de la gestion des risques. Évaluer le risque est donc la raison d’être des tests. [11]
La réception définitive du site se fait après validation de toutes les étapes de la conception du site et sans réserve formulée par le donneur d’ordre ou client.
Sources :
1- TGI Paris, 20 novembre 2000, Yahoo c/Licra et UEJF, CCE 2000, n° 132, obs. J-C. Galloux
2- Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 13 décembre 2005, 04-10.143, Publié au bulletin
3- L. n° 2004-575, 21 juin 2004, art. 1er : JO 22 juin 2004, p. 11168, ci-après "LCEN"
4- M.Griguer, « Mettre en conformité son site internet »
5- Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 26 novembre 2013, 12-25.191, Inédit « SARL Safe & Web Company c/ SARL Locam et a. : JurisData n° 2013-027187 ; Comm. com. électr. 2014, comm. 5, G. Loiseau »
6- Tribunal judiciaire de Marseille, jugement du 22 avril 2021
7- Contrats du numérique, informatiques et électroniques, 11è Ed., Philippe le TOURNEAU
8- Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 janvier 2018, 16-23.790, Inédit
9- CA Bordeaux, 2 mai 2006 : JurisData n° 2006-312039
10- Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 5 juin 2019, 17-26.360, Inédit
11- Tests et recettes dans les projets système d’informations : une étape délicate - https://www.conseilorga.com/tests-recettes-projets-systeme-dinformations-etape-delicate/