La loi du d’orientation agricole du 5 janvier 2006 a modifié l’article L.311-3 du Code rural et de la pêche maritime et a créé le fonds agricole.
En introduisant en agriculture cette nouvelle universalité, fortement inspirée du fonds de commerce, le législateur souhaitait aider les agriculteurs à structurer leur exploitation.
Cependant, le fonds agricole, fondé sur le volontarisme de l’exploitant et jugé trop abstrait et peu utile, n’a pas rencontré le succès escompté.
A l’heure de renouvellement des générations et de la multiplication des cessions entre tiers, le fonds agricole se révèle à l’usage être un outil juridique avantageux à la fois pour le cédant et le cessionnaire.
La création du fonds agricole
Le fonds agricole se crée par simple déclaration gratuite auprès du Centre des Formalités des Entreprises de la Chambre d’Agriculture.
Universalité de fait, il est composé des éléments mobiliers corporels ou incorporels se rattachant à l’exploitation.
L’article L.311-3 du Code rural cite un certain nombre d’éléments qui peuvent y être intégrés : le cheptel, les stocks, les contrats et droits incorporels (notamment les droits à produire et les DPB) ainsi que l’enseigne, le nom de l’exploitation, les dénominations, la clientèle, les brevets et autres droits de propriété industrielle.
Cette liste n’est pas exhaustive ; le fonds agricole peut intégrer d’autres éléments.
Il est même possible de créer un fonds agricole sans indiquer sa composition.
En effet, l‘article D.311-3 du Code rural et de la pêche maritime qui énumère les informations que la déclaration de création doit contenir (nom et adresse du déclarant, numéro d’identification…), n’impose pas la mention des éléments constitutifs du fonds.
Dans son avis du 10 janvier 2008 (n°2008-02), le C.N.C (Conseil national de la comptabilité) précise que lors de l’inscription au bilan, le fonds agricole ne fait pas l’objet d’une évaluation car les immobilisations corporelles générées en interne ne peuvent pas être comptabilisées à l’actif, à l’exception des coûts de développement (lesquels sont peu fréquents en agriculture).
La création d’un fonds agricole n’entrainera donc aucune conséquence fiscale pour l’exploitant, l’évaluation du fonds intervenant lors de sa cession.
Intérêts du fonds agricole pour le cédant
La valeur d’une exploitation agricole ne se résume pas à la somme de la valeur des éléments vendus.
En effet, l’exploitation peut bénéficier de contrats de production avantageux, d’une clientèle fidèle, d’un savoir-faire précieux ou d’une situation recherchée.
L’article L.411-74 du Code rural et de la pêche maritime interdit de surévaluer les biens vendus de plus de 10% de leur valeur vénale sous peine d’action en répétition du prix.
De même, il est impossible de valoriser l’exploitation en valorisant le foncier sous peine de préemption avec baisse de prix par la SAFER.
Une des solutions pour valoriser légalement son exploitation consisterait en la vente d’un fonds agricole précédemment constitué pour un prix correspondant à la survaleur de l’exploitation.
Le fonds agricole permet ainsi de valoriser l’exploitation cédée.
Intérêts du fonds agricole pour le cessionnaire
Le fonds agricole ne se dépréciant pas ni par l’usage ni par temps, il n’est pas, par principe, susceptible d’amortissement.
Cette règle a été codifiée pour la première pour les fonds de commerce par la loi de finances pour 2022, qui modifie l’article 39 du Code Général des Impôts.
Cette même loi prévoit une dérogation à ce principe pour les fonds acquis à titre onéreux entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2025.
L’administration fiscale admet que ces dispositions dérogatoires s’appliquent dans les mêmes conditions au fonds agricole (BOI--BA-BASE-20-30-10-10).
La reprise d’un fonds agricole avant le 1er janvier 2026 permettra au cessionnaire de l’amortir, ce qui augmentera les charges déductibles des bénéfices agricoles et de l’assiette des cotisations sociales.
L’utilisation de cette ouverture par les exploitants est de nature à améliorer le haut du bilan des exploitants qui le souhaitent.
La création d’un fonds agricole est, à n’en pas douter, un outil efficace de cession des exploitations agricoles, offrant des avantages tant pour le cédant que pour le cessionnaire.
Alexandre DUCROCQ
Avocat
SCP NONNON & FAIVRE
www.nonnonfaivre-avocats.fr
Cet article juridique, actualisé au jour de sa rédaction, possède un but purement informatif et ne saurait remplacer l'analyse de votre dosser par un avocat spécialisé. Le rédacteur s'éxonère de toute responsabilité en cas de mauvaise interprétation ou utilisation des informations contenus dans le présent article.