Certains manquements de l’employeur ouvraient systématiquement droit pour le salarié à des dommages et intérêts, sans que ce dernier ait à justifier d’un préjudice particulier.
Dans certains cas, il suffisait alors au salarié d’invoquer un manquement de l’employeur pour obtenir sa condamnation, sans avoir à prouver son préjudice.
A titre d’exemple, la Cour de Cassation a considéré que l’absence de visite médicale d’embauche du fait de l’employeur cause nécessairement un préjudice au salarié dont le juge doit fixer la réparation. Le salarié n’a pas à démontrer un lien entre le défaut de visite et une défaillance de son état de santé que le médecin aurait pu déceler. (Cass. Soc. 11 Juillet 2012 n°11-11709)
La Haute Juridiction a également estimé que la non-remise de l’attestation Pôle emploi ou sa remise tardive à un salarié lui cause nécessairement un préjudice. (Cass. Soc. 13 Juin 2007 n°06-41189)
Toujours selon la Cour de cassation, le salarié qui a respecté une clause de non-concurrence jugée illicite lui cause nécessairement un préjudice, dont il appartient au Juge d’évaluer le montant. Le salarié a donc le droit d’obtenir des dommages et intérêts sans avoir à établir la nature ou l’étendue de son préjudice. (Cass. Soc. 12 Janvier 2011 n°08-45280).
Par un arrêt de principe du 13 Avril 2016, la Cour de Cassation semble revenir sur sa jurisprudence antérieure, et annonce un durcissement de la Chambre sociale. (Cass. Soc. 13 Avril 2016 n°14-28293).
Au cas présent, un salarié demandait des dommages et intérêts en raison de la remise tardive de son certificat de travail et de son bulletin de paye. En effet, ces documents avaient été remis par l’employeur seulement lors de l’audience de conciliation devant le Conseil de Prud’hommes.
La demande de dommages et intérêts du salarié a été rejetée au motif que celui-ci ne rapportait pas la preuve d’un préjudice. Confirmant l’arrêt de la Cour d’Appel, la Cour de Cassation décide que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir d’appréciation des juges du fond.
L’arrêt du 13 avril 2016 étant rédigé dans des termes généraux, il semble donc que la Cour de Cassation ait opéré un revirement de jurisprudence. Cette décision pourrait en effet être étendue à d’autres obligations de l’employeur.
Si tel devait être le cas, le salarié qui invoquerait un manquement de l’employeur devrait alors prouver 1/l’existence de la faute, 2/l’existence d’un préjudice, 3/et le lien de causalité entre ladite faute et le préjudice.
Le préjudice ne serait donc en aucune situation présumé.