Jusqu'en 2007, les prestations de l’hébergement d’urgence se situaient dans le très court terme et constituaient une première étape dans la prise en charge des sans abri. Les centres d’hébergement d’urgence (CHU) étaient chargés d’offrir un accueil ponctuel et de courte durée aux personnes à la rue avec un principe de reconduction journalière de la prise en charge.
Conscients des limites d’une telle organisation marquée par un accompagnement social insuffisant puisque les personnes sont remises à la rue sans perspectives d’insertion, les pouvoirs publics ont alors posé un nouveau principe dans l’accueil des sans abri : "Toute personne accueillie dans un centre d’hébergement d’urgence devra se voir proposer, en fonction de sa situation, une solution pérenne, adaptée et accompagnée si nécessaire, dans le parc public social, dans le parc privé conventionné, dans un CHRS, un CADA, un LogiRelais (résidence hôtelière à vocation sociale), une maison relais ou un hébergement de stabilisation".
Pour cela, le Plan d’action renforcée pour les sans abri (PARSA) prévoyait la transformation de places d’hébergement d’urgence en places d’hébergement de stabilisation et en places de CHRS et définisait ainsi une nouvelle catégorie d’hébergement : l’hébergement de stabilisation qui se situe entre les centres d’hébergement d’urgence et les CHRS.
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Le Conseil d’État dans la présente décision, sur le fondement des articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du CCH, de l'article L. 345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles et à la lumière des travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, renforce cette acception de l'hébergement.
Selon la Haute juridiction, "la reconnaissance du droit à un hébergement par une décision d'une commission de médiation doit constituer, pour les demandeurs qui en bénéficient, une étape vers l'accès à un logement autonome ; que, par suite, l'hébergement attribué à des demandeurs reconnus comme prioritaires par une commission de médiation doit présenter un caractère de stabilité, afin, notamment, de leur permettre de bénéficier d'un accompagnement adapté vers l'accès au logement ; qu'en faisant bénéficier d'un hébergement d'urgence prévu par les dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles, qui se caractérise par son instabilité et sa saisonnalité, une personne dont la demande d'hébergement a été reconnue prioritaire par la commission de médiation, le préfet ne peut être regardé comme procédant à l'exécution de la décision par laquelle le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il a désigné, constatant l'absence de proposition adaptée à la suite de la décision la commission de médiation, a ordonné que soit assuré l'hébergement de l'intéressé".
En conséquence, et contrairement à ce que soutient le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, l'ordonnance attaquée n'est entachée d'aucune erreur de droit en ce qu'elle juge qu'un hébergement dans une structure d'urgence ne pouvait être regardé comme un hébergement adapté au sens des dispositions de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation.
Ainsi, le Conseil d’État après avoir en 2012 (CE, réf., 10 février 2012, Karamoko F. c/ Ministre des solidarités et de la cohésion sociale), consacré l'hébergement d'urgence des personnes sans abri en situation de détresse comme liberté fondamentale, vient aujourd'hui rappelé que l'hébergement s'entend aussi d'un hébergement de stabilisation qui doit constituer une étape vers le logement autonome.
Gageons que cette décision réjouira les acteurs associatifs qui interviennent auprès de ces publics et les accompagnent vers le logement.