L'hébergement dans une structure d'urgence ne peut être regardé comme un hébergement adapté

Publié le 06/05/2013 Vu 2 611 fois 0
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Le Conseil d'État dans un arrêt du 22 avril 2013 considère qu'un "hébergement dans une structure d'urgence ne [peut] être regardé comme un hébergement adapté au sens des dispositions de l'article L.441-2-3 de CCH", pour une personne reconnue prioritaire DALO.

Le Conseil d'État dans un arrêt du 22 avril 2013 considère qu'un "hébergement dans une structure d'urgence

L'hébergement dans une structure d'urgence ne peut être regardé comme un hébergement adapté
Sur le fondement des dispositions des articles L. 441-2-3 du Code de la construction et de l'habitation (CCH) régissant le droit au logement opposable, la Commission de médiation du Nord a, par décision du 5 avril 2011, reconnut M. X. comme prioritaire et devant être hébergé.
A défaut d'offre adaptée dans le délai prescrit par l'article R. 441-16-1 du CCH, le demandeur a saisi le Tribunal Administratif de Lille d'une demande tendant à ce qu'il soit enjoint au Préfet d'exécuter la décision de la Commission. Le tribunal a fait droit à cette requête et par jugement du 1er juillet 2011 a ordonné au Préfet d'assurer l'hébergement de M. X. dans un délai de 3 mois à compter de la notification du jugement sous astreinte de 50 Euros par jour de retard.
 
Sollicité pour liquider l'astreinte, le juge administratif, par ordonnances des 7 février et 19 mars 2012, a décidé que "si le Préfet avait proposé à M. X. un hébergement d'urgence dans le cadre du dispositif hivernal à compter du 29 novembre 2011, ce type d'hébergement qui avait vocation à prendre fin à l'issue de la période de "trêve hivernale" ne pouvait être regardé comme adapté aux besoins de l'intéressé". En conséquence, il a condamné l’État à verser la somme de 9 050 Euros au Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (art. L. 300-2 CCH).
 
Saisi d'un pourvoi à l'encontre de cette décision par le Ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, le Conseil d’État a ainsi saisi l'occasion de préciser ce qu'il convenait d'entendre par "reconnaissance d'un droit à l’hébergement" dans les décisions des commissions de médiation.
 
***

Jusqu'en 2007, les prestations de l’hébergement d’urgence se situaient dans le très court terme et constituaient une première étape dans la prise en charge des sans abri. Les centres d’hébergement d’urgence (CHU) étaient chargés d’offrir un accueil ponctuel et de courte durée aux personnes à la rue avec un principe de reconduction journalière de la prise en charge.

Conscients des limites d’une telle organisation marquée par un accompagnement social insuffisant puisque les personnes sont remises à la rue sans perspectives d’insertion, les pouvoirs publics  ont alors posé un nouveau principe dans l’accueil des sans abri : "Toute personne accueillie dans un centre d’hébergement d’urgence devra se voir proposer, en fonction de sa situation, une solution pérenne, adaptée et accompagnée si nécessaire, dans le parc public social, dans le parc privé conventionné, dans un CHRS, un CADA, un LogiRelais (résidence hôtelière à vocation sociale), une maison relais ou un hébergement de stabilisation".

Pour cela, le Plan d’action renforcée pour les sans abri (PARSA) prévoyait la transformation de places d’hébergement d’urgence en places d’hébergement de stabilisation et en places de CHRS et  définisait ainsi une nouvelle catégorie d’hébergement : l’hébergement de stabilisation qui se situe entre les centres d’hébergement d’urgence et les CHRS.

***

Le Conseil d’État dans la présente décision, sur le fondement des articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du CCH, de l'article L. 345-2-2 du Code de l'action sociale et des familles et à la lumière des travaux parlementaires ayant précédé l'adoption de la loi du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable, renforce cette acception de l'hébergement.

Selon la Haute juridiction, "la reconnaissance du droit à un hébergement par une décision d'une commission de médiation doit constituer, pour les demandeurs qui en bénéficient, une étape vers l'accès à un logement autonome ; que, par suite, l'hébergement attribué à des demandeurs reconnus comme prioritaires par une commission de médiation doit présenter un caractère de stabilité, afin, notamment, de leur permettre de bénéficier d'un accompagnement adapté vers l'accès au logement ; qu'en faisant bénéficier d'un hébergement d'urgence prévu par les dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles, qui se caractérise par son instabilité et sa saisonnalité, une personne dont la demande d'hébergement a été reconnue prioritaire par la commission de médiation, le préfet ne peut être regardé comme procédant à l'exécution de la décision par laquelle le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il a désigné, constatant l'absence de proposition adaptée à la suite de la décision la commission de médiation, a ordonné que soit assuré l'hébergement de l'intéressé".

En conséquence, et contrairement à ce que soutient le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, l'ordonnance attaquée n'est entachée d'aucune erreur de droit en ce qu'elle juge qu'un hébergement dans une structure d'urgence ne pouvait être regardé comme un hébergement adapté au sens des dispositions de l'article L. 441-2-3 du code de la construction et de l'habitation.

Ainsi, le Conseil d’État après avoir en  2012 (CE, réf., 10 février 2012, Karamoko F. c/ Ministre des solidarités et de la cohésion sociale), consacré l'hébergement d'urgence des personnes sans abri en situation de détresse comme liberté fondamentale, vient aujourd'hui rappelé que l'hébergement s'entend aussi d'un hébergement de stabilisation qui doit constituer une étape vers le logement autonome.

Gageons que cette décision réjouira les acteurs associatifs qui interviennent auprès de ces publics et les accompagnent vers le logement.

CE, 22 avril 2013, n° 358427

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