La 1ère chambre Civile de la cour de Cassation a rendu le 23 mars 2011, pourvoi N°09-66.512 un arrêt interéssant aux visas des articles 1421,1427 et 1832-2 du code civil, concernant l'apport de biens communs en société et la fraude des droits de l'époux commun en bien.
La cour rappelle la distinction entre deux actions autonomes.
« Un époux ne peut pas employer des biens communs pour faire un apport à une société sans en avertir son conjoint et sans qu’il en soit justifié dans l’acte. L’action en nullité régie par l’article 1427 du Code civil est soumise à la prescription de deux ans et est exclusive de l’action en inopposabilité ouverte par l’article 1421 du code civil pour sanctionner les actes frauduleux, lequel ne trouve à s’appliquer qu’à défaut d’autre sanction ».
La distinction concernera ainsi L'action en nullité issue de l'obligation d'avertir son conjoint de tout apport en numéraire de biens communs,et l'action issue de la fraude des droits du conjoint, applicable à défaut de pouvoir faire jouer la première.
La cour rappelle aiinsi d'une part l'existence des deux actions autonomes et d'autre part leur prescription respective.
En l'éspèce, un époux avait effectué un apport en numéraire de fonds communs auprès d'une SCI Mafate, en vue d'acquérir un bien immobilier. Cette SCI avait été constituée le 31 janvier 1998 avec sa nouvelle compagne, par un apport en capital du mari sans en aviser sa conjointe.
Dès le 17 août 2006, l'épouse légitime avait agi en nullité de l'apport, le divorce des époux étant prononcé le 4 juin 2007.
La cour d'appel avait annulé l'apport sur le fondement de la fraude, au motif que si l'action engagée sur le fondement de l'article 1427 du code civil, est prescrite, (2 ans) elle ne doit pas être confondue avec l'action fondée sur la fraude, dont le conjoint est victime, dont la prescription est de 30 ans.
La cassation est ici encourue, au regard des textes applicables : 1421,1427 et 1832-2 du code civil
I- Rappel des textes régissant l'apport de biens communs en société
II- Les motifs de l'arrêt : le rappel du principe
Pour la cour :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable comme étant de pur droit :
Vu les articles 1421,1427 et 1832-2 du code civil ;
Attendu qu’un époux, ne peut, à peine de nullité de l’apport, employer des biens communs pour faire un apport à une société sans en avertir son conjoint et sans qu’il en soit justifié dans l’acte ; que cette action en nullité régie par l’article 1427 du code civil est soumise à la prescription de deux ans et est exclusive de l’action en inopposabilité ouverte par l’article 1421 du code civil pour sanctionner les actes frauduleux, lequel ne trouve à s’appliquer qu’à défaut d’autre sanction ;
Attendu que le 31 janvier 1998, M. X..., époux commun en biens de Mme A..., a constitué avec sa compagne, Mme Y..., la SCI Mafate aux fins d’acquérir un bien immobilier ; que le divorce des époux X...-A... a été prononcé par jugement du 4 juin 2007 ; que le 17 août 2006, Mme A... a engagé une action en nullité de l’apport réalisé par M. X... au profit de la SCI Mafate ;
Attendu que pour prononcer la nullité de l’apport en numéraire effectué par M. X... au capital de la SCI Mafate et la nullité de cette société sur le fondement de la fraude, l’arrêt énonce que si l’action engagée sur le fondement de l’article 1427 du code civil est prescrite, elle ne se confond pas avec l’action fondée sur la fraude dont le conjoint est victime, qui se prescrit par trente ans ;
Qu’en statuant ainsi la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 10 mars 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris