Qu'est-ce que l'exécution provisoire ?
I- Quels textes la visent et Quand l'envisager ?
A) L’article 514 du code de Procédure Civile (CPC) :
« L'exécution provisoire ne peut pas être poursuivie sans avoir été ordonnée si ce n'est pour les décisions qui en bénéficient de plein droit. Sont notamment exécutoires de droit à titre provisoire les ordonnances de référé, les décisions qui prescrivent des mesures provisoires pour le cours de l'instance, celles qui ordonnent des mesures conservatoires ainsi que les ordonnances du juge de la mise en état qui accordent une provision au créancier »
2°-L’article 515 du CPC
« Hors les cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par la loi. Elle peut être ordonnée pour tout ou partie de la condamnation. »
Il ressort de ces textes que l’exécution provisoire, ou par provision, constitue une réelle exception au principe de l’effet suspensif attaché à la voie de recours représentée par l’appel.
Un jugement est de fait rendu exécutoire, bien que n'ayant pas acquis l'autorité de la chose jugée (non définitif) il pourra être exécuté nonobstant appel.
On remarque que cette faculté est accordée à une partie victorieuse en Justice (ex créancier), lequel pourra poursuivre à ses propres risques et périls, l’exécution immédiate d’une décision judiciaire (risques et périls au cas où le créancier serait bien évidemment débouté en appel et devrait restituer l’argent).
L’exécution provisoire ordonnée par un juge peut être subordonnée à la constitution d'une garantie, réelle ou personnelle, pour répondre justement de toutes les restitutions ou aux réparations dues au profit de la partie déboutée, qui verrait réformer en appel la décision exécutée provisoirement.
II Quand envisager l'exécution provisoire ?
A) de plein droit
ainsi pour:
- Les ordonnances de référé (rendues par le président du tribunal compétent statuant dans l’urgence pour prendre des mesures conservatoires ou lorsque la demande ne supporte aucune contestation sérieuse.)
- Les créances d’aliments ; (pensions alimentaires)
- Les mesures provisoires pour le cours de l'instance ;( ex en matière de divorce lors de la tentative de conciliation)
- Les ordonnances du juge de la mise en état accordant au créancier une provision ;
-" Les jugements et ordonnances rendus en matière de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires sont exécutoires de plein droit à titre provisoire" article R 661-1 du code de commerce
B) suite à une mention expresse portée dans la décision.
Lorsque l’exécution n’est pas incompatible avec la nature de l’affaire, le Tribunal dans le dispositif de sa décision portera la formule suivante:
« Ordonnons l’exécution provisoire de la décision ». Parfois est ajoutée la mention "...qui est compatible avec la nature de l’affaire »
La conséquence immédiate fera que :
- les voies d’exécution forcées par voie d’huissier peuvent être mises en place ( saisies...).
Ces frais s'ajoutent à la note du débiteur déjà redevable du capital, et des intérêts en cas d'exécution non spontanée !
- Attention : deux mois après leur prononcé et à défaut d’exécution spontanée, les décisions emporteront majoration du taux de l'intérêt légal de 5 points.
article L 313-3 du code monétaire et financier "en cas de condamnation, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision".
En 2011 le taux d’intérêt a encore chuté, si bien que ses baisses régulières ont abouti à un taux très bas devenu dissuasif .
Ainsi 0,38 % l'an en 2011 et sans doute autour de 0,71% en 2012
Sa majoration le ferait donc passer autour de 5,71 % !
C) A défaut d’exécution provisoire de droit ou ordonnée par un juge, il faudra attendre le caractère définitif du jugement pour poursuivre l’exécution.
Le jugement deviendra définitif :
1°- après la signification d'une décision rendue en premier et dernier ressort ( non susceptible d’appel ) ;
2°- après l’expiration du délai d’appel ( un mois après la signification du jugement ) ;
Article 501 du NCPC
Le jugement est exécutoire, sous les conditions qui suivent, à partir du moment où il passe en force de chose jugée à moins que le débiteur ne bénéficie d'un délai de grâce ou le créancier de l'exécution provisoire.
3°- en cas d’appel, après le prononcé de l’arrêt rendu par la cour.
Des voies d’exécution pourront être mises en œuvre par un huissier chargé de recouvrer les sommes accordées à la partie victorieuse avec les intérêts, et frais en sus !
L'usage de la force publique est rendu possible.
On parle d'exécution forcée.
L’article 31 alinéa 1 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution dispose que « l’exécution forcée peut être poursuivie jusqu’a son terme en vertu d’un titre exécutoire à titre provisoire".
Dans un prochain article j'analyserai les possibilités de freiner l' exécution provisoire
Sabine HADDAD
Avocat à la Cour