Après avoir envisagé les notions de cohabitation et d’autorité parentale, susceptibles de mettre en cause la responsabilité des parents,puis, la nature du fait dommageable commis parl’enfant,http://www.legavox.fr/blog/maitre-haddad-sabine/article/affiche-article.php?EXP_AFFICHER_PANNEAU=1&id_article=1679 ,je me pencherai ici sur les causes d’exonération de la responsabilité, lesquelles ont évolué de façon rigoureuse.
L'alinéa 7 de l'article 1384 dispose:
"La responsabilité ... a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité."
I- L’exonération de la responsabilité des parents, réduite en peau de chagrin.
A) Les cas d’exonérations antérieurs à la Jurisprudence BERTRAND
Dans un premier temps, la Cour de cassation admettait l'exonération de responsabilité des parents dans trois cas de figure :
- la faute de la victime
- la force majeure
- le dommage n'est pas dû à un défaut de surveillance ou d'éducation des parents
Antérieurement la responsabilité était fondée sur une présomption simple de faute d'éducation et de surveillance.
B) La restriction des modes d’exonération avec 2e Civ 19 février 1997 BERTRAND gaz. Pal. 19972.572
L'exonération de responsabilité des parents est devenue plus rigoureuse, puisque prise en compte seulement pour les deux premiers cas de figure ci-dessus. La responsabilité civile des père et mère a été consacrée par comme « de plein droit » dont « seule la force majeure ou la faute de la victime » peut les exonérer, et non plus la simple preuve d'une absence de faute d'éducation ou de surveillance.
« Seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer le père ou la mère civilement responsable du fait de leur enfant »
Les arrêts ultérieurs rendus par la deuxième Chambre civile ont trait,s essentiellement, à l'examen des conditions d'exonération fixées par l'arrêt « Bertrand ».
2ème Civ 4 juin 1997, Bull. n° 168 ; 2 mars 2000, Bull. n° 44.
II- Analyse des causes d'exonération
A) La force majeure
C’est une cause d'exonération totale de la responsabilité de plein droit des père et mère. Elle suppose un événement extérieur normalement imprévisible et irrésistible pour les père et mère, ayant eu pour effet de placer ceux-ci dans l'impossibilité d'empêcher le fait dommageable de l'enfant.
La condition d'extériorité doit s'entendre par rapport à l'enfant lui-même ou par rapport aux parents et à l'enfant. C'est une « cause étrangère » au sens strict.
Seul l'événement perturbateur extérieur que les père et mère n'ont pu éviter et qui les a empêchés totalement de s'opposer au fait dommageable de leur enfant peut constituer une cause d'exonération.
La mise en œuvre de ce mode d'exonération est en pratique extrêmement difficile
La sévérité de la jurisprudence est nette et a été citée dans le premier article consacré à la notion de cohabitation physique ou juridique .
- 2ème Civ 9 mars 2000 ,pourvoi n° 98-18.095 ; Bull. n° 44 : le fait qu'un enfant ait été confié par ses parents pour un mois à un centre médico-psychologique géré par une mutuelle, n'avait pas fait cessé la cohabitation, en sorte que les parents devaient répondre de la blessure occasionnée par leur enfant à un camarade avec un crayon durant ce séjour extérieur.
- 2ème Civ 18 mai 2000 Bull. n° 86 : s'agissant d'un accident causé par une élève à son institutrice pendant une leçon de motricité en cours de classe.
La présomption de responsabilité n’a pas été écartée « par la seule circonstance que l'enfant se trouvait dans l'établissement scolaire au moment des faits », cela ne remplit pas les conditions de la force majeure.
Une présomption légale de causalité entre le fait dommageable de l'enfant et le comportement des père et mère apparaît détruite par la preuve d'un tel événement perturbateur…
B) La faute de la victime
Lorsque les circonstances révèlent un concours de fautes entre la victime et l'auteur du dommage, les juges du fond apprécient souverainement les proportions du partage de responsabilité.
Cette solution est fréquemment rappelée. En cas d'exonération totale pour faute de la victime, cette faute devra présenter les caractères de la force majeure:
- 2ème Civ 12 octobre 2000 pourvoi n° K 98-13.741
- 2ème Civ 19 février 1997, Bull. n° 54 : le partage de responsabilité entre l'auteur d'un accident et la victime mineure, dont le comportement était en relation de causalité avec l’ accident, a été retenu, même en l’absence de discernement ( enfant blessée par la balançoire qu'utilisait une de ses camarades ).
- 2ème Civ. 28 février 1996, Bull. n° 54 : censure une cour d'appel qui a estimé « parfaitement prévisible et naturel » le comportement d'un enfant au regard de la situation, suite à l’accident provoqué par un enfant qui jouant sous une table, s'était brusquement relevé, pour courir et avait heurté un camarade qui portait une casserole d'eau bouillante qui l'avait brûlé .
En conclusion, je rappelerai que l'action récursoire du parent condamné est possible à l’égard de l’autre,aux fins d’obtenir la moitié de la dette, lorsque les conditions de mise en jeu de la responsabilité seront réunies pour ce parent.
Demeurant à votre disposition.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris