Comment et pourquoi débloquer l'indivision par intervention judiciaire ?
I- Pour sauver l'intérêt commun mis en péril par le refus d'un indivisaire: article 815-5 du code civil
Un indivisaire peut être autorisé par justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coïndivisaire serait nécessaire, si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun.
Le juge ne peut, à la demande d'un nu-propriétaire, ordonner la vente de la pleine propriété d'un bien grevé d'usufruit contre la volonté de l'usufruitier.
L'acte passé dans les conditions fixées par l'autorisation de justice est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut.
L'autorisation du juge aura un sens important pour une mise à disposition de fonds par exemple.
En effet, tout héritier qui autoriserait une mise à disposition pourrait être considéré comme ayant accepté tacitement la succession de façon irréversible et donc devoir payer les dettes successorales.
C'est souvent pour cette raison, que ce dernier restera inerte, ce qui contraindra le ou les autres héritiers à se faire autoriser par le juge, de récupérer des fonds pour faire face aux besoins urgents de la succession, voir de sommer l'indivisaire d'opter dans la sucession...
1ere Civ. 12 mai 2010, pourvoi n° 09-65.362, cass
"tout indivisaire est en droit de faire cesser les actes accomplis par un autre indivisaire, qui ne respectent pas la destination de l'immeuble ou qui portent atteinte à leurs droits égaux et concurrents sur la chose indivise et d'agir à cet effet, ainsi que pour obtenir réparation du préjudice consécutif aux dits actes, sans attendre le partage."
II- Si l'un des indivisaires se trouve hors d'état de manifester sa volonté
Article 815-4 du code civil
"Si l'un des indivisaires se trouve hors d'état de manifester sa volonté, un autre peut se faire habiliter par justice à le représenter, d'une manière générale ou pour certains actes particuliers, les conditions et l'étendue de cette représentation étant fixées par le juge.
A défaut de pouvoir légal, de mandat ou d'habilitation par justice, les actes faits par un indivisaire en représentation d'un autre ont effet à l'égard de celui-ci, suivant les règles de la gestion d'affaires."
III- Pour toutes mesures urgentes d'administration ou de disposition dans l'intérêt commun: article 815-6 du code civil
Le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun.
Il peut, notamment, autoriser un indivisaire à percevoir des débiteurs de l'indivision ou des dépositaires de fonds indivis une provision destinée à faire face aux besoins urgents, en prescrivant, au besoin, les conditions de l'emploi. Cette autorisation n'entraîne pas prise de qualité pour le conjoint survivant ou pour l'héritier.
Il peut soit désigner un indivisaire comme administrateur en l'obligeant s'il y a lieu à donner caution, soit nommer un séquestre.
Les articles 1873-5 à 1873-9 du présent code s'appliquent en tant que de raison aux pouvoirs et aux obligations de l'administrateur, s'ils ne sont autrement définis par le juge.
par exemple pour autoriser le versement des fonds successoraux.
IV Pour désigner un indivisaire mandataire ad hoc chargé de gérer l'indivision
article 815-4 alinéa 2 du code civil et 815-6 alinéa 3 du code civil
V-Pour autoriser une vente immobilière après saisine des indivisaires représentant au moins 2/3 des droits indivis: article 815-1 du code civil.
La procédure sera spécifique. Rappelons le texte in extenso:
"Sauf en cas de démembrement de la propriété du bien ou si l'un des indivisaires se trouve dans l'un des cas prévus à l'article 836, l'aliénation d'un bien indivis peut être autorisée par le tribunal de grande instance, à la demande de l'un ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis, suivant les conditions et modalités définies aux alinéas suivants.
Le ou les indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis expriment devant un notaire, à cette majorité, leur intention de procéder à l'aliénation du bien indivis.
Dans le délai d'un mois suivant son recueil, le notaire fait signifier cette intention aux autres indivisaires.
Si l'un ou plusieurs des indivisaires s'opposent à l'aliénation du bien indivis ou ne se manifestent pas dans un délai de trois mois à compter de la signification, le notaire le constate par procès-verbal.
Dans ce cas, le tribunal de grande instance peut autoriser l'aliénation du bien indivis si celle-ci ne porte pas une atteinte excessive aux droits des autres indivisaires.
Cette aliénation s'effectue par licitation. Les sommes qui en sont retirées ne peuvent faire l'objet d'un remploi sauf pour payer les dettes et charges de l'indivision.
L'aliénation effectuée dans les conditions fixées par l'autorisation du tribunal de grande instance est opposable à l'indivisaire dont le consentement a fait défaut, sauf si l'intention d'aliéner le bien du ou des indivisaires titulaires d'au moins deux tiers des droits indivis ne lui avait pas été signifiée selon les modalités prévues au troisième alinéa."
VI- Pour ordonner une sortie judiciaire de l'indivision
Il conviendra alors de sortir de cette indivision et de partager l’actif, L'article 815 du code civil disposant :
" Nul ne peut être contraint à demeurer dans l'indivision et le partage peut être toujours provoqué, à moins qu'il n'y ait été sursis par jugement (pour deux années au plus si une vente risquerait de porter atteinte à la valeur des biens indivis) ou convention."
Lorsque un héritier aura accepté la succession, s’il continue à s’opposer à l'indivision ( ex par un refus de délivrance de fonds), ses cohéritiers envisageront l’action en partage judiciaire, prévue à l’article 840 du code civil devant le tribunal de grande instance par l’intermédiaire d’un avocat obligatoire.
Je renverrai le lecteur à mes articles consacrés à cde thème.
Le partage judiciaire lorsque l'indivision va mal...
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Maître HADDAD sabine
Avocate au barreau de Paris