Avec l’évolution des technologies, sont apparus des modes de preuve plus modernes issus des techniques de reproduction ou de communication. Désormais à côté de l’écrit sur support papier, il y aura l’écrit électronique, les sms, les mails ou la signature électronique. A côté de la reine des preuves que constituait aussi l’aveu, il y aura d’autres moyens…Mais seront-ils tous fiables ?
Dans les procédures où la preuve peut se faire librement ou par tous moyens, tel en droit commercial, en matière de divorce, de faits juridiques ( délits, quasi délits), au pénal ou en matière contractuelle où l'écrit n'est pas la reine des preuves en deçà d'une valeur contractuelle de 1500 euros, tous les moyens sont bons pour aboutir.
Toute atteinte à la vie privée pour obtenir un élément de preuve rendrait la preuve irrecevable ou toute preuve obtenue violemment ou de façon déloyale serait irrecevable car la fraude corrompt tout. Dans cette optique, l'évolution prévisible des techniques a rendu prévisible l'évolution législative et jurisprudentielle.
Ainsi le principe qui se dégage réside dans le fait que tous documents protégés par un mot de passe ou un code seraient obtenus de façon déloyale et rejetés des débats.
I- des moyens de preuve dans la reproduction
A) Les photocopies lisibles qui seraient contestées conservent une forte suspicion au regard de leur authenticité susceptible de les rendre irrecevables
B) Les télécopies
Celles-ci, non contestées dans leur authenticité constitueront un commencement de preuve par écrit. Ainsi en matière commerciale où les commandes se font par le biais de tous les procédés modernes de communication... La signature de l'auteur figurant sur un tel document, l'avis d'émission et/ou de réception renforceront le caractère vraissemblable et probant d'une telle production, mais toujours susceptible d'être contestée donc de preuve contraire.
De même l'envoi d'une lettre de mise en demeure par envoi recommandéeavec accusé de réception sera difficilement contestable. Cette même lettre, non retirée par son destinataire pourra permettre d'établir sa mauvaise foi !
C) Les enregistrements téléphoniques ou audio, les photographies ou films
Les enregistrements ne sont pas recevables comme mode de preuve si la partie adverse n'en a pas été tenue au courant et si la conversation a été enregistrée à l'insu de quelqu'un qui pourrait d'ailleurs se retourner contre la personne auteur de l'enregistrement déloyal.
2ème civ 7 octobre 2004, pourvoi N° : 03-12653
Qu’afin de rapporter la preuve de leur allégation, elles ont versé aux débats une cassette contenant l'enregistrement d'une conversation téléphonique effectué par M. Y... à l'insu de son interlocutrice, Mme X….que sa production à la présente instance ne portait pas atteinte à la vie privée de Mme X... dès lors qu'aucun fait relevant de la sphère de son intimité n'était révélée, la discussion rapportée portant exclusivement sur le remboursement du prêt consenti par M. Y... et que la production de la cassette était un moyen de preuve recevable ;Qu'en statuant ainsi, alors que l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué et conservé à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
L'article 226-1 du code pénal prohibe comme preuve les enregistrements obtenus au moyen d'un procédé quelconque de paroles prononcées dans un lieu privé par une personne sans le consentement de celle-ci.
Cependant, deux limites sont à envisager :
-s'agissant de la valeur probante de l'enregistrement de communications téléphoniques ayant pour but d'identifier l'auteur d'appels constituant des violences avec préméditation, celles-ci ont été jugées recevables. Les juges restent libres de déterminer la valeur probante dudit enregistrement (Cass. crim., 13 juin 2001, crim 13 janvier 2007)
- Les « écoutes téléphoniques » sont légales lorsqu'elles ont été valablement ordonnées par un juge d'instruction dans le cadre d'une affaire pénale. Elles sont encadrées par le code de procédure pénale. Ainsi, le juge d'instruction tient des articles 81 et 100 dudit code , le pouvoir de prescrire, lorsque les nécessités de l'information l'exigent, l'interception, l'enregistrement et la transcription des correspondances émises par la voie des télécommunications par une personne mise en examen, dès lors que n'est pas en cause l'exercice des droits de la défense...
Dans la même optique: photographier ou filmer et transmettre l'image d'une personne se trouvant dans un lieu privé, sans son consentement, ne pourrait constituer une preuve . (voire aussi article 9 du code civil sur le droit à l'image)
II- Les moyens de preuve issus de messages modernes
A) Les mails
Ceux-ci obtenus sans fraude (du numéro de code par exemple) constituent l'un des moyens judicieux pour démontrer le haurcèlement moral.... (1 ere Civ 18 mai 2005)
Ainsi des courriers électroniques échangés par un époux avec un autre internaute sur un site ou récupérés dans sa boîte mail à l'aide de l'installation d'un logiciel espion (mouchard) seront écartés des débats du fait de leur obtention déloyale.
B ) Les sms
Ce nouveau mode de preuve a pu trouver applications loyales...
1°- en matière de divorce où la preuve de la faute se fait par tous moyens pour démontrer l'adultère :
Les juges du fond ont prononcé le divorce d'une épouse aux torts exclusifs d'un conjoint , qui pour démontrer l'adultère de son époux, avait produit des sms reçus sur le téléphone portable de celui-ci, dont la teneur était rapportée dans un procès-verbal dressé à sa demande par un huissier de justice. La cour d'appel a en effet considéré que ces SMS relevaient "de la confidentialité et du secret des correspondances et que la lecture de ces courriers à l'insu de leur destinataire constitue une atteinte grave à l'intimité de la personne". Néanmoins, la Cour de cassation a censuré l'arrêt d'appel aux visas des articles 259 et 259-1 du code civil, les juges du fond n'ayant pas constaté "que les sms avaient été obtenus par violence ou fraude". (1 ere civ 17/06/2009 )
2°-en matière de harcèlement sexuel :
Si l'enregistrement d'une conversation téléphonique privée, effectué à l'insu de l'auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice la preuve ainsi obtenue, il n'en est pas de même de l'utilisation par le destinataire des messages écrits téléphoniquement, dont l'auteur ne peut ignorer qu'ils sont enregistrés par l'appareil récepteur ( soc 23 mai 2007).
Dans un autre article http://www.legavox.fr/blog/maitre-haddad-sabine/modes-preuve-issus-nouvelles-technologies-1646.htm
j'envisgerai les contrats éléctroniques et la signature électronique.
Demeurant à votre disposition.
Sabine HADDAD
Avocat au barreau de Paris