Après avoir présenté dans un premier article le principe de la réduction des libéralités ( donations,legs) en valeur, j'analyserai la réduction en nature.
REDUCTION DES LIBERALITES EN VALEUR OU EN NATURE ? (I)
I- Le gratifié peut choisir de déroger à ce principe et exécuter la réduction en nature sous conditions
article 924-1 du code civil
"Le gratifié peut exécuter la réduction en nature, par dérogation à l'article 924, lorsque le bien donné ou légué lui appartient encore et qu'il est libre de toute charge dont il n'aurait pas déjà été grevé à la date de la libéralité, ainsi que de toute occupation dont il n'aurait pas déjà fait l'objet à cette même date."
Cette faculté s'éteint s'il n'exprime pas son choix pour cette modalité de réduction dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle un héritier réservataire l'a mis en demeure de prendre parti.
A) le bien légué ou donné doit appartenir encore au gratifié.
B) le bien doit se trouver libre de toute charge dont il n’aurait pas déjà été grevé à la date de la libéralité
C) le bien doit se trouver libre de toute occupation dont il n’aurait pas déjà fait l’objet à cette date
Le gratifié a trois mois à compter de la date à partir de laquelle l’héritier réservataire l’a mis en demeure de prendre parti pour exprimer son choix.
"Lorsque la réduction s'exécute en nature, le donataire restitue les fruits de ce qui excède la portion disponible, à compter du jour du décès du donateur, si la demande en réduction est faite dans l'année ; sinon, du jour de la demande." article 928 du code civil
La restitution des fruits, ne s'opèrera que si la réduction est exercée en nature.
II- en cas d’insolvabilité, la restitution se fera en nature
Cela résulte des termes a contrario de l’article 924-4 du code civil qui dispose
"Après discussion préalable des biens du débiteur de l'indemnité en réduction et en cas d'insolvabilité de ce dernier, les héritiers réservataires peuvent exercer l'action en réduction ou revendication contre les tiers détenteurs des immeubles faisant partie des libéralités et aliénés par le gratifié. L’action est exercée de la même manière que contre les gratifiés eux-mêmes et suivant l'ordre des dates des aliénations, en commençant par la plus récente. Elle peut être exercée contre les tiers détenteurs de meubles lorsque l'article 2276 ne peut être invoqué.
Lorsque, au jour de la donation ou postérieurement, le donateur et tous les héritiers réservataires présomptifs ont consenti à l'aliénation du bien donné, aucun héritier réservataire, même né après que le consentement de tous les héritiers intéressés a été recueilli, ne peut exercer l'action contre les tiers détenteurs. S'agissant des biens légués, cette action ne peut plus être exercée lorsque les héritiers réservataires ont consenti à l'aliénation."
III- L’article 917 code civil dans le cas de la libéralité excessive portant sur un droit d'usufruit
Ce texte permet une réduction en nature
"Si la disposition par acte entre vifs ou par testament est d'un usufruit ou d'une rente viagère dont la valeur excède la quotité disponible, les héritiers au profit desquels la loi fait une réserve, auront l'option, ou d'exécuter cette disposition, ou de faire l'abandon de la propriété de la quotité disponible."
Cela suppose:
une libéralité d' un droit d’usufruit,
une réserve fixée en pleine propriété,
une libéralité excessive,
ce qui entraînera une option pour les réservataires
- soit de la quotité disponible en pleine propriété pour le gratifié
- soit de l’exécution de la libéralité, si bien que les réservataires accepteront de voir leur réserve grevée de l’usufruit donné.
IV-La réduction partielle de la libéralité en nature
Si la réduction est totale, alors le legs devient caduque si bien que le gratifié perd tous ses droits sur le bien pour peu qu'il ne soit pas lui-même l'un de copartageants et le tiers perd tout droit sur le bien alors que le réservataire aura des droits indivis sur le bien.
Quid si la réduction est partielle ?
Le gratifié conservera ses droits sur la chose à hauteur de la portion non réductible, l'autre fraction retournant dans la masse à partager.
exemple
3 enfants, avec une donation faite à un tiers pour une valeur de 200 (ayant une valeur au jour du décès et au jour du partage de 300 ).
Actif brut : 800
Masse de partage = 300 + 800 =1100
Réserve = 3/4 soit 825 à diviser par 3 =275 par enfant
QD est de 275
La donation de 300 est donc excessive, ce dernier devant restituer ainsi 25.
S'il choisit une réduction en nature, alors il décompose son bien en deux parties :
D'une part, il conservera 275 et d'autre part rendra à l'indivision les 25 restant entre les réservataires.
Ce gratifié se retrouvera ainsi propriétaire indivis sur le bien donné avec les réservataires bénéficiaires de cette réduction partielle en nature.
soit 275 pour lui alors que les 3 réservataire le seront pour 25 /3 chacun, soit 8,33
V- L’option pour une attribution préférentielle de certains biens au profit de ceux qui les ont exploité voire ci-dessus
Ainsi pour une exploitation agricole.
Dans ce cas le juge peut sursoir au partage pour aboutir à une attribution préférentielle.
Si le bien attribué a été donné par le de cujus, le gratifié pourra prendre son temps.
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Sabine HADDAD
Avocat au barreau de Paris