La rupture d'une promesse d'embauche s'analyse en un licenciement abusif (Cass. soc. 15 décembre 2010 n° 08-42.951 (n° 2545 F-PB), Sté Cama c/ Perinet)
Faisant évoluer sa jurisprudence, la Cour de cassation juge qu'une promesse d'embauche précise vaut contrat de travail et sa rétraction s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
A la différence d'une proposition d'emploi, une promesse d'embauche engage les parties de sorte que ni le candidat ni l'employeur ne peuvent par la suite se rétracter, sauf à justifier d'un motif légitime.
Le Code du travail étant muet sur la question, la promesse d'embauche a été définie par la jurisprudence. Il s'agit d'une offre d'emploi ferme et définitive, adressée à une personne désignée, qui contient la nature de l'emploi proposé, la rémunération, la date et le lieu d'entrée en fonction. Le cumul de ces éléments n'est toutefois pas impératif.
En l'espèce, l'employeur avait par écrit proposé d'engager un candidat en précisant son salaire mensuel, la nature de son emploi, ses conditions de travail, la date et le lieu de sa prise de fonction. Un mois plus tard, l'employeur lui indiquait par courrier qu'il n'entendait pas donner suite à cette promesse d'embauche. Le salarié a alors saisi la justice.
La Cour de cassation rappelle dans un premier temps que l'écrit qui précise l'emploi proposé et la date d'entrée en fonction constitue une promesse d'embauche et que cette promesse vaut contrat de travail. En conséquence, l'employeur ne peut pas se rétracter, peu importe l'acceptation ou non de la promesse par le salarié. Cette interdiction ne vaut pas cependant lorsque l'employeur a un motif légitime.
La Haute Juridiction décide ensuite que la rupture par l'employeur de son engagement doit s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Elle approuve les juges du fond d'avoir accordé au salarié les indemnités correspondantes : dommages et intérêts et indemnité compensatrice de préavis.
Selon les juges, la durée du préavis retenue correspond à celle applicable aux salariés licenciés ayant moins de 6 mois d'ancienneté.
En revanche, à défaut d'ancienneté suffisante, l'indemnité légale de licenciement ne saurait être due au salarié.
Ainsi, la Cour suprême abandonne sa jurisprudence antérieure qui accordait, en cas de rupture injustifiée par l'employeur d'une promesse d'embauche, des dommages et intérêts au salarié en fonction du préjudice subi (Cass. soc. 5 décembre 1989 n° 86-45556).
Pour tenter d'échapper aux conséquences indemnitaires d'un licenciement abusif, l'employeur faisait également valoir l'existence d'une période d'essai qui lui aurait permis de rompre son engagement sans motifs, ni indemnités. La Cour de cassation estime cet argument inopérant, dès lors que le contrat a été rompu avant tout commencement d'exécution. Cette solution est logique dans la mesure où l'objet de la période d'essai est d'apprécier les compétences du salarié. Elle ne saurait donc être invoquée avant le début de la relation de travail.
Cette décision devrait inciter les employeurs à la prudence en matière de promesse d'embauche. Sur le plan pratique, elle les oblige, d'une part, à avoir un motif légitime pour rompre leur engagement et, d'autre part, à mettre en place une procédure de licenciement à l'encontre d'un salarié dont le contrat de travail n'a pas commencé à être exécuté, ce qui n'est pas sans poser des difficultés.
Quant aux employeurs qui seraient tentés d'attendre le début d'exécution du contrat afin de mettre fin à une éventuelle période d'essai, ils prennent le risque de se voir condamnés pour rupture abusive de la période d'essai. Tel est le cas notamment lorsque la rupture intervient rapidement, sans que le salarié n'ait été en mesure de donner la preuve de ses qualités et capacités professionnelles (Cass. soc. 15 novembre 2005 n° 03-47546).
Source : Editions Francis Lefebvre