La responsabilité du syndic :
Des pouvoirs élargis au dépassement de ses pouvoirs
Par principe, le syndicat des copropriétaires doit disposer d’un syndic permettant de le représenter. Il est chargé d’administrer les parties communes. À l’inverse, les parties privatives relève de la jouissance personnelle de chaque copropriétaire.
Le syndic peut être un professionnel tel qu’une société agissant en son nom personnel ou être un non professionnel. Dans le cadre d’un syndic non professionnel, il peut s’agir d’un des copropriétaires ou de son conjoint. En revanche, le concubin ne peut pas avoir le rôle de syndic bénévole.
Pour qu’il puisse assumer pleinement ses fonctions, il doit au préalable justifier de certaines garanties (I) lui permettant d’exécuter les missions qui lui ont étés conférées par mandat de l’ensemble des copropriétaires (II) sans pour autant qu’il ne puisse outrepasser ses pouvoirs, à défaut il sera susceptible d’engager sa responsabilité à l’égard du syndicat des copropriétaires (III).
I) Garanties nécessaires à l’exercice des fonctions
Pour exercer sa mission, le syndic professionnel doit répondre à toutes les conditions suivantes :
- justifier d'une garantie financière suffisante destinée à assurer à la copropriété le remboursement de ses fonds en cas de faillite,
- justifier d'une assurance responsabilité civile professionnelle,
- ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom de la copropriété, sauf vote contraire de l'assemblée générale,
- et posséder une carte professionnelle de "gestion immobilière" délivrée par la préfecture.
En ce qui concerne le syndic non professionnel, il doit ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom de la copropriété.
Indifféremment de la qualité du syndic en question, cette obligation d’ouverture de compte bancaire séparé est d’autant plus fondamentale qu’en cas de violation, le syndic s’expose à une nullité de son mandat et à l’engagement de sa responsabilité personnelle.
Telle est ainsi la portée d’un arrêt récent de la Cour d’Appel de Paris en date du 3 octobre 2012, n° 10/15433. En effet, le syndic professionnel a l'obligation d'ouvrir un compte bancaire ou postal séparé au nom du syndicat dans les trois mois suivant sa désignation si l'assemblée générale n'en a pas décidé autrement, la méconnaissance par le syndic de cette obligation emporte la nullité de plein droit de son mandat. En conséquence, en l’espèce, faute de satisfaire à cette garantie bancaire conformément aux prescriptions de la loi du 10 juillet 1965 applicable en matière d’immeubles bâtis et de gestion de copropriété, son mandat est rétroactivement nul de plein droit. Au surplus, est nulle, l'assemblée générale convoquée par un syndic de copropriété qui n'a pas procédé à l'ouverture d'un compte séparé avant l'expiration du délai de trois mois.
De plus, le syndic de copropriété qui n'a pas ouvert de compte séparé au nom du syndicat sans avoir invité l'assemblée générale à délibérer sur la dispense d'ouverture du compte séparé, a commis une faute qui engage sa responsabilité personnelle. En n'ouvrant pas de compte séparé sans avoir invité l'assemblée générale à délibérer sur la dispense, le syndic commet une faute personnelle, peu importe que l'assemblée, si elle avait été saisie de la question, ait voté la dispense.
II) Pouvoirs étendus
En tant que représentant légal du syndicat des copropriétaires, le syndic a pour vocation principale de gérer l'immeuble, exécuter les décisions de l'assemblée générale et assumer un ensemble de tâches administratives, financières et comptables.
Aux termes de l’article 18 de la loi du 10 juillet 1965, il est ainsi chargé :
- d'assurer l'exécution des dispositions du règlement de copropriété et des délibérations de l'assemblée générale (AG). Il lui appartient en conséquence, de mettre en œuvre les décisions votées par l'AG et de faire en sorte que les copropriétaires et locataires respectent les dispositions du règlement de copropriété ;
- d'administrer l'immeuble, de pourvoir à sa conservation, à sa garde et à son entretien. Dans ce cadre, l'intervention du syndic est très large : il peut ainsi être chargé du recouvrement des charges, de préparer l'organisation des assemblées générales, de procéder au paiement des dépenses courantes, ainsi que de la souscription des contrats d'assurance (assurance des parties communes et assurance en cas de travaux notamment) et toutes les mesures nécessaires à son entretien (achat des produits, fournitures, réparations courantes, conclusion des divers contrats de maintenance, ...) et à sa garde (gestion du personnel - gardiens, concierges, ... - notamment) ;
- d'établir et de tenir à jour un carnet d'entretien de l'immeuble en vertu de la loi Sécurité et Renouvellement Urbain du 13 décembre 2000. Ce carnet devra être conforme à un modèle type défini par les pouvoirs publics ;
- d'établir le budget prévisionnel du syndicat et de le soumettre au vote de l'assemblée générale et de tenir pour chaque syndicat une comptabilité séparée qui fait apparaître la position de chaque copropriétaire à l'égard du syndicat, ainsi que la situation de trésorerie du syndicat ;
- de soumettre au vote de l'assemblée générale lors de sa première désignation puis au moins tous les 3 ans, la décision de constituer des provisions spéciales pour financer les travaux susceptibles d'être nécessaires dans les trois années à venir et non encore décidés par l'assemblée générale. Sont visés les travaux d'entretien et les travaux de conservation (ravalement, révision d'une toiture, ...) portant sur les parties communes de l'immeuble ou sur les éléments d'équipement communs (ascenseurs notamment) ;
- de représenter le syndicat des copropriétaires dans tous les actes de la vie civile (signature des contrats par exemple) et en justice : ainsi, il lui appartient exclusivement d’agir en justice au nom de la copropriété (sous réserve, sauf exceptions, d'avoir obtenu une autorisation en ce sens de l'AG) ; à l'inverse, si une action en justice est intentée contre le syndicat des copropriétaires, l'assignation devra être adressée au syndic ;
- En dernier lieu, en ce qui concerne ses fonctions administratives et comptables, il lui incombe de tenir à jour la liste des copropriétaires comportant tous les éléments d’état civil et l’indication des nombres de lots acquis. Il doit en outre archiver certains documents indispensables tels que le règlement de copropriété, état descriptif des divisions, plans de l’immeuble et tous les éléments comptables de la copropriété comme les recettes, les dépenses, situation de trésorerie.
III) Responsabilités multiples
Le syndic peut engager sa responsabilité s'il commet des fautes, erreurs, négligences dans l'exercice des missions dont il a la charge ou s'il outrepasse ses pouvoirs.
La responsabilité du syndic peut être engagée envers le syndicat des copropriétaires en tant que personne morale disposant de la personnalité juridique lui permettant d’ester en justice, et envers les copropriétaires pris à titre individuel.
La responsabilité du syndic est engagée devant les copropriétaires s'il n'exerce pas correctement ses fonctions ou s'il ne respecte pas les règles de fonctionnement de la copropriété. Il peut ainsi être condamné à verser des dommages-intérêts à la copropriété si ses actes ou ses négligences ont causé un préjudice financier ou contribué à la dégradation de l'immeuble. Toutefois, la mise en œuvre de la
Sa responsabilité ne peut plus toutefois être engagée si l'assemblée a approuvé les actes du syndic en accordant le quitus.
En outre, dans des circonstances demeurant exceptionnelles, le syndicat peut engager sa responsabilité pénale à l’égard des copropriétaires lorsqu’il commet des infractions pénales causant manifestement préjudices à la copropriété, notamment en cas de détournement de fonds ou de pièces appartenant au syndicat des copropriétaires, abus de confiance.
Ainsi, à titre d’exemple, le syndic pourra être responsable envers la copropriété :
- s'il néglige d'exécuter les décisions adoptées en AG, de procéder au recouvrement des charges, ou encore de convoquer l'AG,
- s'il fait exécuter des travaux non urgents sans accord préalable de la copropriété, ou à l'inverse s'il s'abstient de prendre les mesures urgentes que la situation exige,
- s'il oublie de consulter le conseil syndical lorsque la loi l'exige,
- s'il ne prend aucune mesure pour faire respecter les dispositions du règlement de copropriété,
- s'il oublie d'assurer l'immeuble (les parties communes évidemment, puisque l'assurance des parties privatives relève de chaque propriétaire),
- s'il démissionne dans des conditions qui causent un préjudice à la copropriété.
Pour ne retenir une seule illustration récente et exemplaire des pouvoirs outrepassés par le syndic, il est possible de souligner l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris en date du 22 novembre 2012 n°11/07425. Dans cette espèce, le contrat d'entretien conclu au nom et pour le compte du syndicat des copropriétaires a été rompu de façon anticipée et sans préavis par le syndic. Cette rupture est abusive dès lors qu'il ne peut imputer une faute grave au prestataire justifiant la résiliation immédiate.
En conséquence, le syndic engage sa responsabilité à l'égard du syndicat des copropriétaires dès lors qu'il a outrepassé ses pouvoirs en acceptant la modification des modalités de résiliation du contrat sans avoir été expressément mandaté à cette fin.
En effet, alors que le contrat initial avait été conclu pour une durée indéterminée révocable à tout moment, le nouveau contrat était irrévocable pour une durée d'un an. Si le syndic a été autorisé par une résolution adoptée en assemblée générale à rompre le contrat d'entretien, il n'avait pas été autorisé à le résilier avant terme. Dans ces conditions, le syndic doit garantir le syndicat des condamnations prononcées à son encontre lors de la rupture fautive du contrat. Le syndic ne saurait supporter le paiement des prestations d'entretien, mais seulement les dommages et intérêts alloués au prestataire.
Pour plus d’informations au sujet de la mise en œuvre de la responsabilité du syndic en cas de négligence ou fautes diverses portant préjudice à la copropriété, vous pouvez ainsi contacter :
Cabinet de Maître MARC WAHED
Avocat au Barreau de Marseille
23 Rue Breteuil 13006 Marseille
Tel : 04.91.98.96.58
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