Par deux décisions rendues par la chambre mixte de la Cour de cassation du 21 décembre 2012, la Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence et estime désormais que l’inobservation de l’obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique.
Il est convient de rappeler qu'un acte notarié constitue un titre exécutoire en application de l'article L.111-3 du code des procédures civiles d'exécution (anc. article 3 de la loi n°91-650 du 9 juillet 1991) de telle sorte qu'un créancier peut délivrer directement un commandement de payer valant saisie immobilière ou prendre une mesure conservatoire sur les biens immobiliers de son débiteur sans avoir à solliciter l'autorisation du juge.
En outre, selon l'article 21 du décret du 26 novembre 1971 relatif aux actes établis par les notaires, l'acte notarié porte mention des documents qui lui sont annexés. Concernant les procurations, elles sont, soit annexées à l'acte de prêt, soit déposées aux minutes du notaire chargé de recevoir l'acte.
Il s'ensuit que l'acte notarié qui ne satisfait pas aux exigences de l'article 21 du décret du 26 novembre 1971 perd son caractère authentique et par là même sa force exécutoire au regard des dispositions de l'article 1318 du code civil.
Par une série de décisions de Justice du 7 juin 2012, la Cour de cassation avait affirmé qu'il résultait de l'article 1318 du code civil, que l'acte notarié, qui ne satisfaisait pas aux prescriptions en matière de procurations de l'article 8 du décret n° 71-941 du 26 novembre 2001 (devenu l'article 21 par le décret n°2005-973 du 10 août 2005) relatif aux actes établis par les notaires, perdait son caractère authentique.
Dans les deux arrêts commentés, la Cour de cassation était une nouvelle fois saisie de la question.
Dans le premier arrêt (pourvoi n° 11-28.688), la Haute Cour juge que « l’inobservation de l’obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l’acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ».
Dans la seconde décision (pourvoi n° 12-15.063) où l’authenticité d’une copie exécutoire était contestée, elle considère que, si, selon l’article 8 (devenu l’article 21 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971), les procurations doivent être annexées à l’acte à moins qu’elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l’acte, « de la combinaison de l’article 23 (devenu art. 41) du même décret et de l’article 1318 du code civil », il résulte cependant que « l’inobservation de ces obligations ne fait pas perdre à l’acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ».
Dès lors, même si l’annexion demeure obligatoire, l’acte authentique « incomplet », minute ou copie exécutoire, ne dégénère pas en acte sous seing privé et conserve toute sa force exécutoire.
Autrement dit, le défaut d’annexion des procurations n’affecte pas l’intégrité de l’acte notarié et de sa copie exécutoire.
Il en résulte donc que l’acte authentique « imparfait » est un titre exécutoire pouvant fonder l'inscription d'une hypothèque provisoire ou l'engagement d'une procédure de saisie immobilière.
Je suis à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.
Cass., ch. mixte, 21 déc. 2012, n° 11-28.688
Cass., ch. mixte, 21 déc. 2012,n° 12-15.063