Les pouvoirs du juge en matière de clauses abusives dans les contrats de crédit
La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJCE) a considéré dans une décision du 30 mai 2013 que lorsqu’il constate l’existence d’une clause pénale abusive dans un contrat de consommation, le juge ne peut se limiter à en modérer le montant stipulé, mais il doit en écarter l’application.
Dans une affaire (C – 397/11) ayant pour cadre une convention de crédit octroyé à un consommateur par un établissement prêteur hongrois, la juridiction de ce pays a posé diverses questions préjudicielles à la juridiction Européenne portant sur l’interprétation de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec des consommateurs.
La CJCE a estimé que le juge national qui constate le caractère abusif d’une clause contractuelle doit, sans attendre que le consommateur forme une demande sur ce point, tirer toutes les conséquences qui découlent de cette constatation au regard du droit national afin de s’assurer que le consommateur n’est pas tenu par ladite clause litigieuse.
La juridiction Européenne précise que le juge doit apprécier, en principe sur la base de critères objectifs, si le contrat concerné peut subsister en l’absence d’application de la clause litigieuse.
Enfin, il appartiendra au juge national de faire application des règles de procédure internes afin que les exigences susvisées soient respectées.
Cette décision de Justice est très favorable au consommateur.
En effet, dès lors que le juge aura constaté la présence d’une clause abusive dans une convention de crédit, il devra d’office, c'est-à -dire sans attendre que le consommateur en formule la demande, écarter son application.
Dans les conventions de crédit, une clause intitulée « INDEMNITES – INTERETS DE RETARD » prévoit généralement que l’emprunteur devra régler une indemnité d’exigibilité anticipée de X % sur le capital restant dû.
L’article 1152 du code civil prévoit que « lorsque la convention porte que celui qui manquera de l'exécuter payera une certaine somme à titre de dommages-intérêts, il ne peut être alloué à l'autre partie une somme plus forte, ni moindre.
Néanmoins, le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire. Toute stipulation contraire sera réputée non écrite. »
Les tribunaux ont déjà eu l’opportunité de se prononcer sur les indemnités d’exigibilités anticipées stipulées par les banques dans les conventions de crédit, lesquelles s’analysent parfois en des clauses pénales manifestement excessives.
Les juges usent de leur pouvoir modérateur en application de l’article 1152 alinéa 2 du code civil, comme en témoigne de récentes décisions de Justice rendues par des juridictions d’appel (Cour d’appel de NANCY, chambre de l’Exécution – JEX, arrêt n° 925/13 du 8 avril 2013, Cour d’appel de REIMS, chambre civile du Juge de l’Exécution du 8 mars 2011, CA de PAU 2ème chambre 1ère section du 13 septembre 2012).
Si le juge considère que cette clause doit être considérée comme une clause pénale, il ne se contentera désormais plus a priori de faire application de son pouvoir modérateur en vertu des dispositions de l’article 1152 du code civil,  mais il devra d’office en écarter l’application eu égard aux termes de la décision rendue par la CJCE.
Je me tiens à votre disposition pour toutes informations complémentaires.
CJCE 30 mai 2013, affaire C-397/11