La 3ème chambre civile de la Cour de cassation a rendu un arrêt en date du 27 novembre 2013 qui apporte des précisions sur la sanction applicable en cas d’opposition irrégulière.
La Haute Cour considère (au visa de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 5-1 du décret du 17 mars 1967 et l'article 2374, 1° bis du code civil) que l’absence de distinction entre les quatre types de créances du syndicat, qui constitue un manquement à une condition de forme, a pour seul effet de faire perdre aux créances leur caractère de créances privilégiées et superprivilégiées, celles-ci ne pouvant alors valoir que comme créances hypothécaires ou chirographaires.
En l’espèce, une opposition mentionnait une somme globale.
Le vendeur a alors assigné le syndicat des copropriétaires en mainlevée de cet acte aux motifs que l’opposition était irrégulière en ce qu’elle violait les dispositions de l’article 5-1 du décret n° 67-223 du 17 mars 1967, exigeant de l’auteur de l’opposition de distinguer entre quatre types de créances.
L’article 20 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit que :
« Lors de la mutation à titre onéreux d'un lot, et si le vendeur n'a pas présenté au notaire un certificat du syndic ayant moins d'un mois de date, attestant qu'il est libre de toute obligation à l'égard du syndicat, avis de la mutation doit être donné par le notaire au syndic de l'immeuble par lettre recommandée avec avis de réception dans un délai de quinze jours à compter de la date du transfert de propriété. Avant l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la réception de cet avis, le syndic peut former au domicile élu, par acte extrajudiciaire, opposition au versement des fonds dans la limite ci-après pour obtenir le paiement des sommes restant dues par l'ancien propriétaire. Cette opposition contient élection de domicile dans le ressort du tribunal de grande instance de la situation de l'immeuble et, à peine de nullité, énonce le montant et les causes de la créance. Les effets de l'opposition sont limités au montant ainsi énoncé. (…) »
Une opposition régulière permettra à un syndicat de bénéficier d’un superprivilège, c'est-à-dire que celui-ci disposera d’un rang prioritaire afin d’obtenir le paiement des charges et de la quote-part due sur les travaux d’amélioration en application de la combinaison des 19-1 de la loi de 1965 et 2374, 1° bis, du code civil.
Dès lors, un syndicat des copropriétaires percevra les fonds lui revenant avant tout autre créancier pour les créances concernant les charges et les travaux de l’année courante et des deux dernières années échues. Il s’agit de la mise en œuvre du superprivilège qui permet même au syndicat de primer le vendeur et le prêteur de deniers.
S’agissant des créances concernant les charges et les travaux afférents aux troisième et quatrième années, le syndicat prendra rang concurremment avec le vendeur et le prêteur de deniers éventuel. Il s’agit de la mise en œuvre du privilège.
S’agissant des créances plus anciennes, celles-ci ne bénéficieront pas du privilège immobilier spécial prévu par l’article 2374 du code civil.
Dans le cadre du présent litige, les juges d’appel ont donné satisfaction à l’argumentation du vendeur.
Pour annuler l'opposition du syndicat, l'arrêt retient que « celle-ci a été faite pour une somme globale de 28 840,57 euros résultant d'un décompte informatique commençant par une reprise de solde antérieur pour 13 227,58 euros et n'opérant aucune distinction entre les différents chefs de créance ».
La Cour de cassation n’a pas suivi le raisonnement adopté par les juges d’appel.
La Haute Cour a confirmé sa jurisprudence en jugeant que "l’absence de distinction entre les quatre types de créances du syndicat, qui constitue un manquement à une condition de forme, a pour seul effet de faire perdre aux créances leur caractère de créances privilégiées et superprivilégiées, celles-ci ne pouvant alors valoir que comme créances hypothécaires ou chirographaires."
En d’autres termes, l’opposition irrégulière n’a pour conséquence que de déclasser les créances privilégiées et superprivilégiées du syndicat des copropriétaires ; en aucun cas, la sanction ne pourra être la nullité de l’opposition de telle sorte que le vendeur sera débouté de sa demande en mainlevée de l’acte.
(Cass. Civ. 3ème, 27 nov. 2013, n° 12-25.824)
Matthieu PUYBOURDIN
Avocat à la Cour
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