La responsabilité est le pendant de la liberté, elle en est à la fois la garantie et la justification.
Dans une société démocratique les individus sont présumés libres, car on les supposent conscients de leurs actes et par là même tenus à en réparer les effets néfastes pour autrui.
En droit français, l'article 1382 du Code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
De ce socle fondamental de la responsabilité civile, on tire l'idée qu'un dommage causé, doit être intégralement réparé, dans toutes ses conséquences, son entièreté, le dommage réparable peut être présent, ou même futur à condition qu'il possède un caractère certain.
En effet, le dommage réparable doit être certain, on ne saurait réparer un dommage simplement éventuel.
La chambre criminelle de la cour de cassation le 18 mars 1975 a reconnu une situation intermédiaire entre le dommage certain réparable et le dommage éventuel non réparable : La perte de chance
La Cour de cassation a identifié une hypothèse de perte de chance chaque fois que le dommage a fait disparaître une probabilité qu'un événement positif pour la victime se réalise, ou une probabilité qu'un événement négatif ne se réalise pas.
Pour qu'une situation de perte de chance puisse donner lieu à indemnisation, il faut que, par la faute de l'auteur du dommage la victime ait perdu « une éventualité favorable » selon la Cour de cassation.
La perte de chance ne doit pas avoir été causé du fait de la victime. De plus, l'événement favorable qui a disparu par la faute de l'auteur du dommage devait être doté d'une certaine probabilité.
On n'indemnise pas la perte d'une chance hypothétique ou négligeable.
La perte de chance indemnise pour la victime le fait d'avoir perdu une probabilité de réaliser un gain ou d'avoir perdu une opportunité d'éviter une perte (matérielle ou non).
Dans tous les cas on n'indemnise pas l'entier dommage, car il y a toujours un élément d'incertitude.
Pour indemniser la perte de chance, le juge va toujours évaluer, la valeur pour la victime qu'aurait représentée la réalisation de « l'éventualité favorable » qui a disparu par la faute de l'auteur.
Une fois celle-ci déterminée, le juge va appliquer un pourcentage de cette valeur qui fixera le montant de l'indemnisation.
En effet indemnisant la disparition de la probabilité qu'un événement favorable se produise, l'indemnisation de la perte de chance est toujours un pourcentage de l'indemnisation qui aurait été allouée pour réparer le dommage certain.
C'est le juge qui va déterminer ce pourcentage en prenant en compte les éléments de preuve à sa disposition.
Plus le juge considérera que l'événement positif avait de chance de se réaliser, ou l'événement négatif d'être évité, plus il fixera un pourcentage conséquent.
L'actualité juridique est féconde de ce point de vue, un arrêt de la Cour de cassation du 16 janvier 2014 a confirmé l'indemnisation de la perte de chance pour un fils de forains de reprendre l'activité de ses parents.
En effet le jeune homme avait subi une agression qui lui a laissé des séquelles importantes, notamment la cécité de l'oeil gauche (Cass civ 1ère, n°13-10566 )
Cette infirmité l'a empêché de pouvoir jamais prétendre à passer le permis de conduire poids lourd, qui est une condition sine qua none à l'exercice de l'activité de forain.
Sur ces constatations la Cour de cassation a reconnu que le dommage avait causé une perte de chance de pratiquer cette activité professionnelle, et qu'il devait donc être procédé à une indemnisation.
Il n'avait pas de certitude de réussir le permis de conduire poids lourd et de finalement pratiquer l'activité de ses parents, mais l'accident le prive d'une possibilité de succès.
Le juge évaluera alors la valeur de l'avantage attendu de l'événement qui a été rendu impossible et déterminera un pourcentage de celle-ci en fonction de la probabilité qu'avait la victime d'atteindre l'objectif qu'elle s'était donnée (évidemment une telle évaluation est toujours approximative, le juge se basera sur toute les preuves que pourra lui ramener la victime démontrant la crédibilité que l'événement positif se produise)
Pour l'indemnisation de la perte de chance qu'un événement négatif ne se réalise pas :
L'exemple le plus parlant est la perte d'une chance de survie, reconnue par la cour de cassation le 25 mars 1968 pour l'indemnisation de la perte « d'importantes chances de guérison » par la faute du médecin. Cette décision a depuis fait jurisprudence et est régulièrement au coeur de l'actualité de la responsabilité médicale.
Ainsi, prenons l'exemple d'un patient qui se fait opérer d'une tumeur au colon. L'opération se déroule bien mais dans les jours suivants, alors que l'alimentation est reprise trop tôt, le patient est victime d'une occlusion intestinale post opératoire non diagnostiquée alors que tous les signes visibles de l'occlusion existait (vomissements, difficultés respiratoires…) sans que les médecins qui l'examinent successivement ne décèle l'occlusion pendant plusieurs jours après les signes cliniques connus (données de la science).
Le patient qui décède des suites post opératoires où il est victime de complications est alors victime d'une perte de chance de survie et les proches subissent un préjudice d'affection.
Dans le cas où il y avait seulement une possibilité que la mort du patient soit évitée on se trouvera dans une hypothèse de perte de chance. Le juge appréciera en se fondant sur les éléments de preuve, l'importance de la chance d'éviter le dommage, et déterminera un pourcentage en conséquence pour calculer le montant du préjudice à indemniser.
Si vous vous trouvez dans une situation où par la faute ou le fait accidentel d'un tiers, vous ou l'un de vos proches a perdu une chance plausible de voir se réaliser un événement positif ou d'éviter un événement négatif vous pouvez demander l'indemnisation d'une perte de chance.
Maître PANNAGAS compétente en matière de responsabilité, d'indemnisation des victimes ou de défense des auteurs d'un dommage civil ou pénal vous aidera à obtenir réparation. N'hésitez pas à nous contacter.