On a beau parlé de management stratégique, de gestion des carrières, de plan de développement RH ou autre concept découlant de la notion « d’investissement » en entreprise, celle-ci et plus précisément les entreprises algériennes, manquent cruellement de recul pour percevoir l’ampleur et la valeur du capital humain autant que pièce angulaire de la croissance productive de l’entreprise.
L’élémentaire en management pour un chef d’entreprise, décrira à celui-ci l’approche à suivre pour non seulement gérer ses hommes, mais surtout « investir » sur ces hommes, afin d’espérer un retour sur investissement en misant sur « la formation, le coaching et/ou le mentorat ».
C’est ainsi, que nos managers adhèrent au concept du capital humain. Malheureusement, leurs perceptions ne reflètent guère (dans la plupart des cas), la dynamique souhaitée des entreprises algériennes, laissant ainsi place à de nombreux malaises sociaux au sein des employés.
- Capital humain et réalisme managérial
Loin d’être une simple théorie[1], le capital humain est une « réalité », c’est la dimension éducative du mangement, pour reprendre les termes du professeur Vincent CRISTALLINI[2], que doit avoir le chef d’entreprise, lui permettant de combiner trois notions :
- la ressource humaine (opérationnelle et directrice) ;
- le talent (réceptacle de qualité) et
- le profit.
Bien évidemment, la notion de profit est omniprésente, car il s’agit avant tout pour une entreprise de créer une richesse.
Cet état d’esprit doit constituer et représenter un réalisme managérial pour les chefs d’entreprises algériennes, qui relèvent surtout du secteur privé (le secteur public étant victime d’une centralisation sournoise laissant place à un autre état d’esprit, celui du BEYLEK dans le jargon populaire algérien).
- Capital humain et PDRH
Les départements ou directions des ressources humaines, au sein des entreprises algériennes se voient prises dans le filet de la gestion quotidienne et laborieuse de leurs entreprises, une gestion qui d’ailleurs est plus machinale que bénéfique, illustrant ainsi un manque cruel de réalisme managérial.
Prenons à titre d’exemple les litiges sociaux. En effet, la plupart des DRH en Algérie aborde « ce phénomène » de la manière la plus ordinaire du monde. En effet, sachant que la plupart des services juridiques dépendent et agissent sous la coupe des directions des ressources humaines,(chose qui n’est pas normale) qui représentent l’entreprise, quand celle-ci est montrée du doit devant une juridiction des affaires sociales ou de confier cela à un cabinet externe.
Quoi qu’il en soit, cet « automatisme » est le résultat d’une part, d’une indifférence totale à l’enjeu des actions judiciaires qui touchent à la crédibilité de l’entreprise et d’autre part, la défaillance du système RH en ce qui concerne la feuille de route des directions ou services juridiques.
Ces pratiques, dépendent donc de trois facteurs :
- absence d’un plan de développement RH (permettant la gestion des conflits dans l’exemple précédent) ;
- limitation du champ d’activité juridique à la simple mission de veille juridique, sans pour autant mettre l’accent sur le développement juridique ;
- manque de réalisme managérial mettant en corrélation le développement juridique établi via un plan de développement RH (PDRH) et l’image de marque de l’entreprise.
Bien évidemment, cela n’implique en aucun cas une indulgence et une passivité totale ou « faire du social » dans le jargon des entreprises algériennes, mais il s’agit de « démontrer » l’importance et la relation entre le PDRH et le capital humain.
- Le Talent
Réceptacle de qualité pour l’entreprise, le réalisme managérial du capital humain constitue avant tout « un talent » que possèdent les managers, afin qu’ils puissent justement repérer « les talents » dissimulés au sein de leurs entreprises.
Toutefois, l’identification des talents pourrait isoler, partager ou même dénigrer d’autres hommes en ayant une conception « classique » du talent, sachant que celui-ci s’est développé avec le temps et la dynamique des acteurs économique (activation du talent via un potentiel, un ressentiment d’utilité et le facteur temps). [3]
Cette conception classique pourrait en effet affaiblir le capital humain, qui ne saurai aboutir sans une vision commune, visant à optimiser le rendement collectif en renforçant le sentiment d’appartenance des employés à leur entreprise.
- Capital humain et entreprises algériennes
Ce n’est pas un mythe, ce n’est pas inaccessible, ça relève d’une « volonté » et « d’un acte réfléchit ». Ce n’est pas « une utopie » et loin d’être « une règle d’éthique accablant les entreprises dans leur vision de profit ». Au contraire, les entreprises algériennes dans leur plan de développement, doivent adopter ce concept et en faire la promotion via des rencontres, des forums, des journées d’étude et autres manifestations bénéfiques.
Toutefois, les pouvoirs publics veillant à encadrer l’activité économique en Algérie, devraient :
- réformer l’environnement légal et réglementaire, permettant une stabilité et un équilibre social au sein de l’entreprise algérienne.
- responsabiliser l’appareil judiciaire et le sensibiliser quant aux « préjugés ! » relatifs à l’image des entreprises algériennes du secteur privé (un jugement sur cinq et en faveur de l’entreprise dans les litiges sociaux).
- rappeler à la société civile le rôle de l’entreprise algérienne autant qu’acteur économique majeur et influant sur l’économie algérienne.
Une fois le capital humain valorisé, une fois ce réalisme managérial atteint, le statut d’acteur économique de l’entreprise algérienne sera complété et sa dynamique renforcée.
Par MEHDI Tarik Abdallah
Avocat et juriste d’entreprise
[1] Voir les travaux de Garry Becker sur le capital humain, notamment son livre : Human Capital : A Theoretical and Empirical Analysis, with Special Reference to Education, 1964.
[2] Vincent Cristallini : Maître de conférences. Habilité à Diriger des Recherches, à l'IAE de l'Université Jean Moulin Lyon 3, où il dirige le Master Management des Equipes et Qualité et le Master Vente et Management Commercial.
[3] Voir les travaux et recherches d’Yves Richez, coach et spécialiste en détection des talents, notamment le concept du MOON.