Un coup de foudre, c’est extraordinaire… pour le transporteur aérien!

Publié le Modifié le 17/09/2018 Vu 3 232 fois 0
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Un transporteur aérien peut valablement invoquer l’existence d’une circonstance extraordinaire lorsqu’un de ses appareils est foudroyé.

Un transporteur aérien peut valablement invoquer l’existence d’une circonstance extraordinaire lorsqu’u

Un coup de foudre, c’est extraordinaire… pour le transporteur aérien!

La Cour de Cassation vient tout juste de rendre une décision sur la notion de « circonstances extraordinaires » en matière de transport aérien de passagers, qui mérite une attention particulière (Cass. Civ. 1, 12 septembre 2018, n°17-11361).

Rappelons tout d’abord que le règlement n°261/2004 relatif aux droits des passagers aériens prévoit une indemnisation forfaitaire des passagers en cas d’annulation de vol ou de refus d’embarquement. Ce principe a été étendu en cas de retard à destination égal ou supérieur à trois heures (affaire Sturgeon).

Le transporteur aérien peut pour sa part espérer échapper à ce dispositif indemnitaire s’il justifie d’une « circonstance extraordinaire ».

La CJUE n’a donc de cesse depuis l’entrée en vigueur de ce règlement de préciser ce qu’il faut entendre par circonstance extraordinaire. Affinant sa jurisprudence au gré de ses décisions, elle donne une définition particulièrement restrictive, en faveur du passager.

Ainsi pour la CJUE, peuvent être qualifiés de circonstances extraordinaires, les événements qui, par leur nature ou leur origine, ne sont pas inhérents à l’exercice normal de l’activité du transporteur aérien concerné et échappent à la maîtrise effective de celui-ci (affaire Wallentin-Hermann / Alitalia).

Sans pour autant revenir sur sa jurisprudence, la CJUE s’attache à un autre objectif bien supérieur : celui de la sécurité des passagers. Désormais pour la CJUE, ne constituent pas de telles circonstances, les événements qui sont intrinsèquement liés au système de fonctionnement de l’appareil. A contrario, un évènement extrinsèque même s’il affecte au final le fonctionnement de l’appareil pouvant mettre en péril la sécurité des passagers pourra être exonératoire (affaire Pešková et Peška).

La Cour de Cassation a relevé cette subtilité et a rendu un arrêt particulièrement motivé dans les termes suivants :

Attendu, d’une part, qu’ayant constaté que l’avion stationné à l’aéroport de Bordeaux-Mérignac, dans lequel M. et Mme X... devaient embarquer, avait été foudroyé, la juridiction de proximité a pu retenir l’existence de circonstances extraordinaires, au sens de l’article 5, paragraphe 3, de nature à exonérer la société Easyjet Switzerland du paiement de l’indemnisation prévue à l’article 7, peu important que le juge du fond se soit référé, par suite d’une erreur de plume, à des circonstances particulières ;
Attendu, d’autre part, que le jugement relève que, conformément aux règles de l’aviation civile, l’appareil, touché par la foudre à 8 h 39, avait été minutieusement examiné par des ingénieurs aéronautiques, lesquels avaient déclaré, à 9 h 32, que celui-ci, endommagé, ne remplissait plus les conditions de sécurité optimales et qu’en conséquence, la société Easyjet Switzerland avait pris la décision, à 10 h 25, d’envoyer un avion de remplacement à Bordeaux-Mérignac, depuis sa base principale de Londres, ce qui avait nécessité de nombreuses formalités et autorisations préalables ; qu’il constate que le réacheminement des passagers vers le vol d’une autre compagnie n’aurait pu avoir lieu qu’à 18 h 20 ; qu’il ajoute que les allégations de M. et Mme X... selon lesquelles le retard de cinq heures et demie qu’ils avaient subi n’était pas justifié, dès lors qu’en dépit des circonstances avancées par la société Easyjet Switzerland, l’avion de secours aurait pu être disponible en moins de quatre heures, constituent de simples supputations ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, dont il résulte que le transporteur aérien avait établi, ainsi qu’il le lui incombait, que, même en prenant toutes les mesures raisonnables, au sens de l’article 5, paragraphe 3, tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, il n’aurait manifestement pas pu éviter que les circonstances extraordinaires auxquelles il était confronté ne conduisent à l’annulation du vol litigieux, la juridiction de proximité, qui a fait la recherche invoquée par la troisième branche et énoncé que les passagers ne pouvaient se borner à contester cette situation par de simples allégations, a légalement justifié sa décision de ce chef.

Il en résulte que la foudre, qui avait été en l’espèce à l’origine d’une défaillance sérieuse de l’appareil, peut valablement être invoquée par une compagnie aérienne pour s’exonérer de son obligation d’indemnisation en cas de retard ou d’annulation de vol.

Un tel évènement (la foudre) n'est d'évidence pas intrinsèquement lié au foncionnement de l'appareil et n'est pas sans rappeler les circonstances ayant donné lieu à une décision de la CJUE l'an passé suite à une collision aviaire (affaire Pešková et Peška).

La solution de la Cour de Cassation doit bien évidemment être approuvée.

V.A.

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