LA REGLEMENTATION APPLICABLE AUX TRICYCLES A MOTEUR : LE SORT CONTROVERSE DES « TUK-TUKS ».
L’été 2011 a vu se multiplier sur les places touristiques des petits tricycles à moteur. A la manière des « tuk-tuks » dans les rues de Bangkok, la capitale a vu fleurir ce type de transporteurs de personnes.
En expansion depuis 2009, cette activité à fait l’objet d’une très lourde répression au cours de l’année 2011.
Du fait, d’une part, d’un intérêt médiatique poussé – nombreux reportages sur TF1, LCI, Le Parisien et autre chaînes d’infos – et, d’autre part, du fait de l’application du décret d’octobre 2010 relatif aux transports publics de personnes avec conducteur, plus connu sous le nom de décret taxis-motos qui est venu réglementer l’activité de taxi-moto dans des conditions extrêmement spécifiques.
Les autorités ont eu pour instruction d’appliquer ce texte à l’exploitation des tuk-tuks à Paris sans répondre au question suivantes :
Le tuk-tuk, tricycle à moteur, peut-il être assimilé à un taxi-moto ?
Quelle conséquence pour les exploitants de ce type d’activité ?
N’y a-t-il pas là, en l’espèce, une erreur de droit au préjudice des exploitants ?...
1) Le TUK TUK n’est pas un tricycle à moteur au sens du Code la Route
Les instructions des autorités hiérarchiques de la préfecture de Police de Paris et de la police ont été claires au cours de l’année 2011, les tuk-tuks ne peuvent circuler en tant que transporteurs de personnes sans se conformer aux conditions définies par le décret d’octobre 2010 sur les taxi-motos.
La conséquence est donc la suivante :
- pour conduire ce type de véhicules, comme le titulaire d’une carte professionnelle d’un taxi-moto, l’exploitant d’un tuk-tuk doit être titulaire d’un permis moto de catégorie A en cours de validité,
- d’une attestation délivrée par le préfet après vérification médicale de l’aptitude physique,
- d’une carte professionnelle délivrée par le département, cette carte professionnelle étant elle-même délivrée sous condition d’un casier judiciaire vierge et d’une absence d’annulation ou suspension du permis de conduire,
- d’une visite médicale obligatoire chaque année.
La réglementation des motos-taxis impose également une attestation d’entretien, qui doit être renouvelée tous les ans, qui doit permettre d’attester que le véhicule a fait l’objet d’un entretien concernant les systèmes de freinage, de direction, de suspension, de visibilité.
L’utilisation du véhicule, qui doit être âgé de moins de 4 ans, est limitée à 3 ans ou à 200 000 km.
Enfin et surtout, mesure la plus contraignante et qui inquiète les exploitants en pleine expansion de ces fameux tuk-tuks, le conducteur doit pouvoir justifier d’une réservation préalable. Les véhicules tricycles ou motos transporteurs de personnes ne peuvent ni circuler ni stationner sur la voie publique en quête de clients.
L’application de ce décret aux tuk-tuks pose néanmoins un problème puisqu’il s’agit d’une application par assimilation. On considère le tuk-tuk comme un tricycle à moteur de manière péremptoire et en contradiction avec les textes des catégories de véhicules visées au Code de la route.
2 ) Le Tuk tuk se conduit avec un permis B sauf pour le transport de personnes
En effet, le Code de la route définit le tricycle à moteur comme « un véhicule à trois roues symétriques à moteur doit le poids à vide n’e xcède pas 1 000 kilogrammes, la charge utile n’excède pas 1 500 kilogrammes pour les tricycles destinés au transport de marchandise, et 300 kilogrammes pour les tricycles destinés au transport de personnes et qui ne réponde pas à la définition du cyclomoteur ».
Cette définition de l’article R311-1 du Code de la route vient s’appliquer en combinaison avec l’article R221-4 du Code de la route qui prévoit les catégories de permis pour chaque catégorie de véhicules, vise expressément les véhicules « ayant un poids total autorisé en charge (PTAC) qui n’excède pas 3,5 tonnes, affectés au transport de personnes et comportant, outre le siège du conducteur, huit places assises au maximum, etc… ». Ce type de véhicules peut être conduit par un permis B.
Aussi, en application stricte du Code de la route sur la définition de catégorie du tricycle à moteur, de type tuk-tuk et sur les catégories de permis, il est indiqué que le tricycle à moteur peut être conduit avec un permis B, y compris dans le transport de personnes.
C’est cette distinction que ne semble pas vouloir retenir les pouvoirs publics en assimilant purement et simplement le tricycle à moteur à un deux-roues en application du Code des transports.
Il réside donc là une incohérence juridique manifeste et tout simplement une absence de statut pour l’exploitation des tuk-tuks. Priver les tuk-tuks de toute possibilité de procéder à transports sans réservation est synonyme d’une perte d’exploitation considérable. Il est bien évident que par la nature même de ce type de véhicule, la réservation n’est pas envisageable. Il s’agit d’un véhicule qui suscite une envie tout à fait ponctuelle et spontanée compte tenu de son aspect tout à fait attrayant.
Mon cabinet est sollicité dans le cadre de la défense pénale de nombreux exploitants poursuivis en correctionnelle pour avoir commis le délit de « circulation sur la voie publique en quête de clients, au moyen d’un tricycle à moteur sans avoir été mis préalablement à disposition de la clientèle » : fait prévu par les articles L3124-9, L3123-1 et L3123-2 alinéa 1 du Code des transports.
Le Tribunal correctionnel va donc être saisi d’une question de principe entre une disposition du Code des transports qui vise les tricycles à moteur, contradictoire avec la définition du tricycle à moteur telle qu’elle est exposée au Code de la route.
Quel texte va primer ?
Nous ne manquerons pas de faire valoir nos arguments pour plaider, d’une part la bonne foi, bien entendu, des exploitants et d’autre part, la grande carence législative en la matière. Les tuk-tuks font ils du mal aux sites touristiques ? Ne sont-ils pas attrayants ? Ne sont-ils pas sympathiques ?
Ils sont en tout cas considérés comme des concurrents dangereux pour les taxis-motos et les taxis, c’est ce qui explique sans doute cette répression aussi sévère…