Par son arrêt rendu le 14 janvier 2016 (Cass. soc. 14 janvier 2016 pourvoi n° 14-26.220) la chambre sociale de la Cour de cassation précise que le Conseil de prud’hommes (juge judiciaire) ne peut pas homologuer une rupture conventionnelle à la place de l’autorité administrative face à un refus de cette dernière.
L’article 1237-14 alinéa 4 du Code du travail sur la rupture conventionnelle prévoit pourtant que « Tout litige concernant la convention [de rupture], l'homologation ou le refus d'homologation relève de la compétence du conseil des prud'hommes, à l'exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif. »
Ainsi, dans le cas d’un salarié non protégé, la partie (salarié ou employeur) qui conteste le refus d’homologation d’une rupture conventionnelle par l’administration peut saisir le Conseil de prud’hommes, seule juridiction compétente pour connaître de tout litige concernant la convention de rupture, son homologation ou le refus d’homologation.
Toutefois, cette compétence judiciaire a ses limites !
En effet, la Cour de cassation vient, pour la première fois, de se prononcer sur la question de savoir si juge judiciaire (juge prud’homal en première instance) était ou non compétent pour homologuer lui-même la convention de rupture s’il estimait non justifié le refus d’homologation émanant de l’administration.
Par cet arrêt du 14 janvier 2016, la Cour de cassation met fin à des divergences de positions émanant des juges du fond. Ainsi par exemple, la Cour d’appel de Versailles avait elle admis cette possibilité (CA Versailles 14 juin 2011 n° 10-01005), tandis que la Cour d’appel de Montpellier s’y opposait (CA Montpellier 30 janvier 2013 n° 11-7070).
De son côté, l’administration du travail, dans sa circulaire du 17 mars 2009 (Circ. DGT 2009-5 du 17-3-2009 n° 6), considérait déjà que le juge judiciaire n’avait pas le pouvoir d’homologuer la rupture conventionnelle d’un salarié, en lieu et place de l’autorité administrative (DIRECCTE).
Près de 7 ans après, la Haute juridiction française adopte la même position que celle de l’administration, en jugeant, dans son attendu de principe, qu’ « il n'entre pas dans les pouvoirs du juge judiciaire de prononcer, en lieu et place de l'autorité administrative, l'homologation d'une convention de rupture conclue en application des articles L. 1237-11 et suivants du code du travail ».
Par conséquent, s’il estime le refus d’homologation injustifié, le Conseil de prud’hommes peut seulement annuler le refus d’homologation. Selon l’administration (circulaire susvisée), cette situation aura pour effet de saisir à nouveau la DIRECCTE, qui devra alors statuer en tenant compte de l’autorité de la chose jugée, ce qui signifie que l’administration n’aura pas d’autre choix que d’homologuer la rupture conventionnelle.
Néanmoins, relativisons…En effet, compte tenu des délais des contentieux judiciaires, il existe peu d’intérêt en pratique à saisir le juge judiciaire en cas de refus d’homologation. Les parties auront davantage intérêt à reprendre entièrement la procédure de rupture conventionnelle et à saisir à nouveau la DIRECCTE, en rectifiant les points qui avaient amenés l’administration à refuser l’homologation de la rupture.
Pour prendre connaissance de l’arrêt du 14 janvier 2016 de la chambre sociale de la Cour de cassation : https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000031864079&fastReqId=154926320&fastPos=1