La mise en œuvre par le procureur de la république d’un dispositif de vidéosurveillance sur la voie publique aux fins de recherche de preuves relatives à une infraction pénale n’est pas contraire à l’article 8 de la CEDH, dans la mesure où elle n’occasionne qu’une ingérence limitée dans la vie privée, proportionnée au but poursuivie.
Cette mise en œuvre suppose cependant l’autorisation du Procureur de la République, les enquêteurs ne pouvant en prendre la décision de leur propre initiative.
Arrêt n°2739 du 8 décembre 2020 (20-83.885) - Cour de cassation - Chambre criminelle :
« 9. Le procureur de la République tient des articles 39-3 et 41 du code de procédure pénale le pouvoir de faire procéder, sous son contrôle effectif et selon les modalités qu’il autorise s’agissant de sa durée et de son périmètre, à une vidéosurveillance sur la voie publique, aux fins de rechercher la preuve des infractions à la loi pénale.
10. L’ingérence dans la vie privée qui résulte d’une telle mesure présentant par sa nature même un caractère limité et étant proportionnée au regard de l’objectif poursuivi, elle n’est pas contraire à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.
11. Pour écarter le moyen d’annulation pris de l’irrégularité, au regard de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, de la pose d’un moyen de vidéosurveillance sur la voie publique n’ayant pas été autorisée par un magistrat du siège indépendant, l’arrêt attaqué retient que l’installation de vidéosurveillance enregistrant l’image d’une ou plusieurs personnes présentes dans un lieu public est étrangère aux dispositions de l’article 706-96 du code de procédure pénale, le législateur ayant estimé que la présence d’un individu, dans un tel lieu, étant par nature susceptible d’être vue par quiconque, il n’y avait pas lieu de prévoir un dispositif légal spécifique pour en capter et fixer l’image.
12. L’arrêt indique en outre que la mise en oeuvre d’un tel dispositif n’implique pas d’acte de contrainte, ni d’atteinte à l’intégrité des personnes dont l’image est ainsi recueillie, ni de saisie, d’interception ou d’enregistrement des paroles de ces personnes et que les officiers de police judiciaire, agissant en préliminaire, tiennent de l’article 14 du code de procédure pénale le droit de mettre en place et d’exploiter, au surplus avec l’autorisation préalable du procureur de la République et sous le contrôle de celui-ci, un dispositif de vidéosurveillance ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, de capter, fixer et enregistrer les images de personnes se trouvant dans un lieu public, afin d’identifier les auteurs ou complices d’infractions.
13. C’est à tort que l’arrêt écarte toute atteinte à la vie privée pouvant résulter de la mise en oeuvre d’une vidéosurveillance sur la voie publique, et considère que les enquêteurs pouvaient y procéder sans autorisation du procureur de la République.
14. L’arrêt n’encourt cependant pas la censure, dès lors qu’il résulte de ses propres constatations que le procureur de la République a spécialement autorisé les enquêteurs à installer le dispositif contesté selon des modalités précises et qu’il en a effectivement assuré le contrôle. »