Encore une insomnie, une de trop...et tout ça à cause de cette élection, encore une fois ! C'est que voilà, universitaire de 41 ans, j'avais fait une promesse que je n'ai pas respecté. Ce deuxième tour est de ma faute je vais vous expliquer pourquoi.
J'ai connu 2002 et j'en ai gardé un souvenir plus que vivace ! Jeune universitaire, je me souviens de mon TD de l'entre-deux tours. Comme j'étais fier, j'avais bien indiqué aux étudiants pour qui voter. J'avais simplement pris le programme, enfin le programme, disons plutôt le "torchon" de M. Le Pen pour expliquer à quel point il était dangereux. J'avais même manifesté...deux fois...
Pourquoi était-il arrivé là ? J'en voulais à ce premier ministre candidat, qui n'avait pas vraiment fait campagne, certain de se retrouver au second tour face à Jacques Chirac, qui aimait bien parler aux journalistes et ne faisait pas vraiment rêver la jeunesse...
Lorsque Jacques Chirac a été élu avec plus de 80% des voix j'étais soulagé et bêtement je me suis dit "plus jamais ça, je vais m'engager en politique pour m'en assurer". Et, je n'ai rien fait !
Cela fait 15 ans que je ne fais rien...politiquement j'entends ! Et pourtant, cela fait 5 ans que je sais que Marine Le Pen sera au 2nd tour. Moi aussi, j'ai adoré l'anaphore de François Hollande "moi président...". Moi aussi, je n'ai pas compris la campagne de 2012 de Nicolas Sarkozy. Est-il si difficile de dire aux français "je n'ai pas pu respecter le programme de 2007 car dès 2008, j'ai dû faire face à une crise imprévu et dévastatrice...." ? Il faut croire que oui !
Dès 2012, j'ai compris que l'extrême droite était aux portes du pouvoir. Il suffisait de presque rien pour en arriver là.
Depuis 10 jours, je suis heurté, choqué par ses appels d'intellectuels, de footballeurs, d'avocats, d'universitaires... à voter Emmanuel Macron. Non, le suffrage censitaire ou capacitaire n'existe pas et chaque voix compte autant. Pourquoi une partie non négligeable de la population vote pour de telles idées ? Parce tout simplement, on ne les juge pas à l'extrême droite...
Comment je le sais ? Simplement, parce que je discute avec les gens, des jeunes, des runners, des étudiants, des vieux... et que tous ont une bonne raison de voter Le Pen. Plus encore, depuis des années, je travaille en Province, à Amiens, qui a été la semaine dernière, pendant quelques heures, le lieu de convergence de la France. Et non Paris ce n'est pas la France. C'est facile, au cours d'un dîner avec des amis de faire des leçons de morale républicaine, c'est beaucoup plus dur d'essayer d'échanger avec une personne en colère brisée par la vie et qui se demande simplement comment se loger ou trouver un emploi.
Comment expliquer que le candidat de la droite ait cherché à "prendre en otage" l'élection ? François Fillon a longtemps expliquer qu'il ne voyait pas le général De Gaulle être mis en examen. Intéressant ! J'ai failli écrire un article sur ce blog pour expliquer que 1) la mise en examen date de 1993 et qu'effectivement, il aurait été difficile de mettre en examen une personne déjà décédée et que 2) la mise en examen est la garante du respect des droits de la défense et n'est en aucun cas une déclaration de pré-culpabilité ! Mais je n'ai pas écrit cet article...
Je me sens responsable parce que non tous ceux qui votent Marine Le Pen ne sont pas des fachos et des illettrés. Ils n'ont pas besoin qu'on leur dise pour qui voter. En revanche, ils ont envie qu'on leur parle de l'essentiel...la France : celle d'hier, d'aujourd'hui, de demain. Ils ont envie qu'on leur présente un projet de société. Mais, je ne suis pas le seul à être responsable. Si le Front National est si dangereux, pourquoi l'inviter partout ? Pourquoi traiter Marine Le Pen comme une candidate "normale" ?
Pourquoi cet article ? Parce que je me sens responsable de cette situation. J'ai de nombreux étudiants, je suis présent sur les réseaux sociaux et je perçois des choses que - semble-t-il - de nombreux politologues ignorent. Je vois fleurir des tribunes pro Le Pen partout ! Dans un groupe facebook que je dirige, je bloque de nombreuses publications liées aux élections parce qu'elles n'ont aucun lien avec l'objet de ce groupe. Les gens revendiquent leur appartenance. Ils ont voté, fait un choix, il faut les respecter et discuter avec eux, pas leur imposer un point de vue en leur parlant du passé, mais en évoquant l'avenir. Projet contre projet, parce que c'est la démocratie. Les arguments d'autorité et les leçons de morale ne fonctionnent plus si tant est que cela ait fonctionné un jour.
Dimanche, je voterai comme à chaque élection et j'attendrai fébrilement les résultats en espérant que le candidat pour qui j'ai voté, en l'occurence Emmanuel Macron dont le programme économique et sociétal me plaît davantage, soit élu ! Je n'ai pas à juger qui que ce soit et je ne donne aucune leçon...